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EAN : 9782070300662
213 pages
Gallimard (22/01/1969)
4.5/5   112 notes
Résumé :
« Combien souffre ce monde, pour devenir celui de l'homme, d'être façonné entre les quatre murs d'un livre ! Qu'il soit ensuite remis aux mains de spéculateurs et d'extravagants qui le pressent d'avancer plus vite que son propre mouvement, comment ne pas voir là plus que de la malchance ? Combattre vaille que vaille cette fatalité à l'aide de sa magie, ouvrir dans l'aile de la route, de ce qui en tient lieu, d'insatiables randonnées, c'est la tâche des Matinaux. L... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
C'est toujours pour moi un sentiment singulier que de retrouver l'écriture de René Char, un sentiment d'attachement qui me relie d'emblée à des saisons passées, à la beauté du Lubéron, à l'éclat lumineux de ses paysages. La générosité de ses senteurs, de ses couleurs, celles des terres arides et du Mont-Ventoux battus par la Tramontane et adoucies par le cours de la Sorgue, tout un arrière-pays d'origine à l'oeuvre dans la poésie de René Char.

Dans "Les Matinaux" et "La Parole en archipel" (édités respectivement et pour la première fois en 1950 et en 1962), c'est toujours la même et saisissante impression, celle d'un monde en dislocation, désagrégé, mais dans lequel se meut la recherche d'une unité, d'une humanité, d'une générosité à préserver. le poème devient comme une parole adressée à tout homme.

"Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. À te regarder, ils s'habitueront." *
Toute vérité est personnelle, intime et impérieuse. Elle confond l'homme et le récit de son histoire. La poésie de René Char ne transige pas, elle est, en quelque sorte, à prendre ou à laisser. le combat (le poète fut très engagé dans la Résistance lors de la Seconde Guerre mondiale) du Verbe mène à une prise de conscience, à une lutte intérieure, à l'usage d'un don particulier, celui de reconnaître la beauté, partout où elle se loge, au plus proche de nous-mêmes, au plus près de notre regard.
"Ne cherche pas les limites de la mer. Tu les détiens. Elles te sont offertes au même instant que ta vie évaporée. le sentiment comme tu sais, est enfant de la matière ; il est son regard admirablement nuancé." **

Poèmes en prose et en vers, nombreux aphorismes composent ce très beau recueil à l'harmonie et aux résonances très singulières. Entre les pages, entre les lignes des textes, se créé un enchantement « étrange et familier », celui qui va des yeux vers le coeur, tel un éclair de chaleur qui traverse la nuit d'été.


(*) extrait de "Joue et dors" - p. 75
(**) extrait de "Le Rempart de brindilles" / "Poèmes des deux années" - p.119
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Voilà le deuxième recueil de René Char que j'aborde, après Feuillets d'Hypnos, je voulais m'assurer de son génie, ainsi que de sa capacité à m'émouvoir, je n'ai pas été déçu...


On a l'habitude de dire d'un recueil de poésie que l'on peut le picorer, le lire en commençant par la fin, rebrousser chemin vers le milieu, avancer un petit peu pour repartir du début... Je ne saurai que trop vous le déconseiller si vous choisissez de lire René Char, car chacun de ces poèmes, qu'il soit en prose ou en vers, est une partie de l'histoire narrée par ce recueil. Il ne s'agit pas d'un puzzle, car un puzzle ne nécessite pas de "première pièce", l'on peut les placer comme on le désire, sans s'embarrasser de l'ordre, en l'occurrence ce n'est pas le cas, il y a un début et une fin qui sont définis, sans pour autant paraître indispensables.
Cette logique de lecture n'apparaît pas clairement comme dans un roman, elle ne s'appréhende et ne se comprend qu'une fois la découverte de l'ouvrage achevée, lorsque l'on en prend conscience, que l'on essaie de le lire avec ce prisme de l'écoulement, elle devient parfaitement claire.
Mis à part ce conseil que vous choisirez de respecter ou non, il est je pense difficile de "résumer" un recueil poétique, je ne m'attarderai donc pas trop sur cette tentative. Sachez simplement que vous découvrirez la vision et la sensibilité de René Char au sujet de la splendeur de la vie, de sa fécondité, de tout ce qu'elle nous offre ; mais également dans sa manière d'appréhender ce qui suit notre existence, la façon dont la poésie lui "volera sa mort" -il s'agit là bien évidemment d'un ordre d'idées extrêmement bref et ô combien non exhaustif.


Pour conclure, bien que René Char soit loin d'être le poète le plus connu du XXème, il est pour l'instant l'un de ceux qui aura le mieux su m'émouvoir. Je ne revendique pas un avis d'expert en la matière, je ne suis d'ailleurs qu'un néophyte en poésie, pour autant, c'est par l'intermédiaire de cet auteur que je me suis réellement intéressé à ce genre littéraire, lorsqu'au regard de celui-ci, je constate qu'il prend de plus en plus de place durant mes longues heures de lecture, je ne saurai suffisamment admirer ce génie qui m'a ouvert les portes d'une littérature dont j'ignorais l'incroyable puissance évocatrice.
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La poésie de René Char se donne comme on cueille une fleur. Elle est à la fois symbole et vérité. C'est la poésie d'une nature et d'un temps à la fois beaux, sévères et consolateurs. Les mots tombent d'un jardin à portée de ciel, une philosophie s'y dessine toute en aphorismes. R. Char plonge dans son réel sensible pour le rendre universel. Il choisit des mots simples, fuit la complication mais en même temps, ses métaphores restent inédites. Pluies, femmes, aubes, feux de bois, ruisseaux, animaux en liberté, plantes et champs, l'oeil poétique distille tout ce qui passe en quelques vers tout aussi libres, où la nature humaine se confond aux éléments de base, pierres, eau, air et feu. Ce sont des graines d'où poussent nos rêves apaisés.
Malgré une mort omniprésente, on reste éveillé et émerveillé par ces lunes qui passent et ces animaux des champs, ces oiseaux devenus presque mythologiques.
"Un poète doit laisser des traces de son passage
non des preuves. Seules les traces font rêver."
On pourrait résumer ainsi les "traces" poétiques de Char s'il n'avait eu de cesse de définir la poésie, sa propre vision de la vie poétique qui prit source chez les surréalistes mais qui a su d'autant mieux s'en détacher pour devenir unique.
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Toujours l'amour pour la nature, notamment provençale, dans les poèmes de Char, des sensations cotoyant des souvenirs d'enfance, des instants de vie foudroyants, atteignant l'invisible, l'indicible, le mystérieux. Char est l'un des rares poètes, dans l'état actuel de mes connaissances, à entrouvrir les portes des zones d'ombre de notre existence.
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Le plus grand poète du XXème siècle à mon sens.
Avec un texte, "l'éternité à Lourmarin" dédié à Albert Camus, un merveilleux hommage d'amitié et d'amour (voir citations).
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Citations et extraits (75) Voir plus Ajouter une citation
L'ETERNITE A LOURMARIN
Albert Camus

Il n'y a plus de ligne droite ni de route éclairée avec un être qui nous a quittés. Où s'étourdit notre affection ? Cerne après cerne, s'il approche c'est pour aussitôt s'enfouir. Son visage parfois vient s'appliquer contre le nôtre, ne produisant qu'un éclair glacé. Le jour qui allongeait le bonheur entre lui et nous n'est nulle part. Toutes les parties - presque excessives - d'une présence se sont d'un coup disloquées. Routine de notre vigilance... Pourtant cet être supprimé se tient dans quelque chose de rigide, de désert, d'essentiel en nous, où nos millénaires ensemble font juste l'épaisseur d'une paupière tirée.
Avec celui que nous aimons, nous avons cessé de parler, et ce n'est pas le silence. Qu'en est-il alors ? Nous savons, ou croyons savoir. Mais seulement quand le passé qui signifie s'ouvre pour lui livrer passage. Le voici à notre hauteur, puis loin, devant.
A l'heure de nouveau contenue où nous questionnons tout le poids d'énigme, soudain commence la douleur, celle de compagnon à compagnon, que l'archer, cette fois, ne transperce pas.
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Dans mon pays, les tendres preuves du printemps et les oiseaux mal habillés sont préférés aux buts lointains.
La vérité attend l'aurore à côté d'une bougie. Le verre de fenêtre est négligé. Qu'importe à l'attentif.
Dans mon pays, on ne questionne pas un homme ému.
Bonjour à peine est inconnu dans mon pays.
Dans mon pays, on remercie.


QU'IL VIVE!
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«Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. A te regarder, ils s’habitueront".
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LE REMPART DE BRINDILLES

Le dessein de la poésie étant de nous rendre souverains en nous impersonnalisant, nous touchons, grâce au poème, à la plénitude de ce qui n'était qu'esquissé ou déformé par les vantardises de l'individu.

Les poèmes sont des bouts d'existence incorruptibles que nous lançons à la gueule répugnante de la mort, mais assez haut pour que, ricochant sur elle, ils tombent dans le monde nominateur de l'unité.

Nous sommes déroutés et sans rêve. Mais il y a toujours une bougie qui danse dans notre main. Ainsi l'ombre où nous entrons est notre sommeil futur sans cesse raccourci.
[...]

(extrait de "La Parole en archipel" / "Poèmes des deux années") - p. 118
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Pour renouer

Nous nous sommes soudain trop approchés de quelque chose dont on nous tenait à une distance mystérieusement favorable et mesurée. Depuis lors, c'est le rongement. Notre appui -tête a disparu.

Il est insupportable de se sentir part solidaire et impuissante d'une beauté en train de mourir par la faute d'autrui. Solidaire dans la poitrine et impuissant dans le mouvement de son esprit.

Si ce que je te montre et ce que je te donne te semblent moindres que ce que je te cache, ma balance est pauvre, ma glane est sans vertu.

Tu es reposoir d'obscurité sur ma face trop offerte, poème. Ma splendeur et ma souffrance se sont glissées entre les deux.

Jeter bas l'existence laidement accumulée et retrouver le regard qui l'anima assez à son début pour en étaler le fondement. Ce qui me reste à vivre est dans cet assaut, dans ce frisson.
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Videos de René Char (57) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de René Char
Les grands classiques du répertoire N°1 : René Char. “Claire”, suivi de “Fêtes des Arbres et du Chasseur” - Première diffusion sur la Radiodiffusion-Télévision Française : 14/05/1955. Réalisation : Alain Trutat. Musique originale : Pierick Houdy. Chef d'orchestre : Pierre Michel Le Conte. Avec Jacqueline Pagnol, Pierre Vaneck, Roger Blin, Madeleine Sylvain, Jean Mauvais, Pierre Leproux, Gaetan Jor, Jean-Jacques Morvan, Jean Péméja, Roger Pigaut, Jean Topart, Paul Emile Deiber, Lucienne Bogaert, Pierre Larquey, Michel Dumur, Catherine Goetgheluck. Et Cyril Dives à la guitare et l’Orchestre National de la RTF. “Claire” Dans cette suite, René Char suit le cours d’une rivière à laquelle il donne le nom familier de Claire. Il imagine que dans les villages et les lieux qu’elle traverse vivent, participant de l’existence de tous, des jeunes filles et des jeunes femmes appelées également Claire. Mais elles ne sont que des personnifications vivantes de la rivière elle-même. Claire est celle que le poète attend, la “Rencontrée” qui seule lui permet de chasser ses fantômes et de continuer à vivre. Claire est une et plusieurs, toutes celles qui “aiment, rêvent, attendent, souffrent, questionnent, espèrent, travaillent”. À travers les personnages d’un chef d’opérations dans le maquis puis d’un chargé de mission de la Résistance, ce sont ses propres contradictions qu’interroge le poète des “Feuillets d’Hypnos”. Dans “Claire”, il poursuit sous une forme dramatique son analyse à la fois poétique et politique du réel, avoue ses déceptions face à l’hostilité d’un monde qui aurait dû changer et s’est reconstruit, étranger à cette espérance. “Fêtes des Arbres et du chasseur” Poème pour voix et guitare. Deux joueurs de guitare sont assis en plein air dans l’attente du chasseur. Ils échangent des poèmes. Thèmes : Création Radiophonique| Radiodiffusion-Télévision Française| Grands Classiques| Poésie| France Culture| René Char
Source : France Culture
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