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Citations sur Les pompes de Ricardo Jesus (19)

Tout à coup, j'ai hurlé :
- Stop, je descends !
Je venais d'apercevoir un véhicule de police à l'affut devant un supermarché en feu.
Exactement l'image qui résumait la situation. En rejoignant ces flics je pourrais travailler un peu plus sereinement.
C'est seulement quand le van de CBS est reparti en trombe que je me suis posé des questions :
- Que fait une voiture de police isolée au milieu de cet enfer, ça n'est pas très prudent !?
Au fur et à mesure de mon approche, la réponse se précise, jusqu'à devenir une terrible évidence :
- Oups, il n'y a personne !
La voiture est abandonnée. J'en fais rapidement le tour. Les indices ne sont pas rassurants. Les vitres sont brisées, il y a du sang sur les sièges, les pneus sont crevés.
Me voila seul, blanc, en pleine émeute. Il y a des grands moments de solitude dans ce métier, cette nuit-là en fait partie. (pages 219 et 220)
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- Vous n'avez rien à faire ici, c'est un camp militaire!
Le gnome est sorti de la brume en criant.Il interpelle Marion qui porte une veste militaire, elle l'enlève, il perd la voix.
Torse nu, les fesses dans la brume, un petit sourire au coin des lèvres, face au sergent qui s'est statufié, elles est charmante!
Quatre civils qui semblent nus, la brume cachant nos slips, notre seul vêtement, face à des hommes en uniforme, c'en est trop pour Berthier. Il se ressaisit et pousse un barrissement qui cloue le bec aux autres espèces de la jungle.
On s'en va. (pages.256 et 257)
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- Que fait-on à vingt et une heures ? J'ai un papier et des légendes photo à écrire.
-Traître, fais ta sale besogne rapidement et sois à l'heure, c'est important. Ce soir tu te maries !
Je le regarde pendant un long moment sans rien dire. Il a l'air très sérieux.
Finalement, de la voix la plus douce possible, comme pour parler à un enfant, je lui demande s'il n'est pas complètement siphonné :
-Tu es devenu loco, mon ami !
Il se tourne vers moi, étonné, et insiste :
- Tout est organisé, tu verras, ça va être une fiesta énorme, ce soir, tu m'épouses !
Effaré de devant cette soudaine et inattendue demande en mariage, je lui propose de réviser son idée.
- Mon cher Juan, je suis très touché par ta proposition, mais en dehors du fait qu'on se connaît à peine, je tiens à te rappeler que je suis résolument hétéro. Donc, je te prie de respirer par le nez et d'annuler ta soirée.
Il me regarde interloqué, puis part dans un fou rire énorme qui manque de nous envoyer dans le fossé. Il est obligé de se garer.
Finalement, entre deux hoquets, il réussit à dire, sous la forme d'un croassement :
- Pardon, je me suis mal exprimé, c'est ma cousine qui se marie, pas toi, pas moi, encore moins nous deux.
Je ne résiste pas au plaisir pervers de lui dire que je suis très déçu. On repart hilares, il me dépose devant l'hôtel, où le portier semble perplexe devant tant de bonne humeur. Ça lui paraît suspect en ces temps difficiles, voire dangereux. Il regarde autour de lui, inquiet, et s'écarte pour me laisser passer comme si j'étais un projectile.
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Je suis poussé vigoureusement vers une cage en bambou. Après une fouille brutale qui me soulage de mon passeport, de mon argent et de tout mon équipement, on m'enferme dans cette mini-prison.
Accroupi en plein soleil, surveillé par des dizaines de regards haineux, je prends conscience que le cauchemar absolu vient de ses réaliser en même temps que le succès de mon reportage.
Je voulais rencontrer les tueurs de l'Angkar...
Eh bien c'est fait. Mission accomplie. (page 204)
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Je raccroche et descends rejoindre Juan à la réception, il traduit le récit de mon combat contre le ventilateur à son remplaçant, qui répond, impassible :
- je félicite monsieur pour ses réflexes. Nous sommes désolés de cet incident. N'oubliez pas que c'est l'embargo des gringos qui provoque ce genre de situation. Nous n'avons plus de pièces de rechange. Les criminels, ce sont eux. Ce sont les Américains qui vous ont lancé ce ventilateur à la figure. Soyez le bienvenu à Cuba, signor, et racontez ce qui s'y passe. Merci d'être là, nous allons régler votre problème, nous les Cubains nous réglons toujours les problèmes... (page 157)
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C'est arrivé au moment où je baissais la tête pour prendre mon appareil photo dans ma sacoche.
Le craquement très présent d'une détonation a interrompu l'homélie de monseigneur Romero, suivi d'un silence absolu, où le temps s'est arrêté, comme mon cerveau, qui refusait d'enregistrer l'événement.
Puis le son est revenu, timidement d'abord, avec un bruit de chute, lourd et mat.
Puis un cri terrible a retenti, déchirant tout l'espace de la chapelle.
J'ai levé les yeux, Romero n'était plus devant son autel.
Il y avait deux bonnes soeurs qui semblaient figées, les mains appuyées sur leurs joues, elles regardaient vers le sol.
Tout le monde était en arrêt, on aurait pu croire que les gens posaient pour un peintre, que tout ça n'était pas vrai.
C'était comme une photo, mais avant que je la fasse. (pages 75 et 76)
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On arrive par une piste dans un petit village à flanc de colline qui donne sur la mer, la vue est splendide, le vent de la mer apporte une brise qui diminue la chaleur tropicale renvoyée par la jungle proche. Tout le village accourt en criant, il y a beaucoup d'enfants, ils prennent la main du chanteur. Un vieil homme habillé d'un pagne rouge dont la peau très sombre souligne le torse maigre et musclé s'avance vers nous, il prend les deux mains de Bob dans les siennes, le salue longuement, puis rassemble les villageois autour de lui et se met à chanter, aussitôt imité par tout le monde.
C'est magique, j'en oublie de faire des images. De toute façon il y a des situations où la photo gâcherait tout et serait réductrice. Il n'y a pas assez de place dans un petit rectangle 24 x 36 pour contenir autant d'émotion, rien que pour la mienne, il faudrait du Cinémascope et une mise en scène, alors, pour une chanson comme celle-ci, entamée par tout un village, il n'y a que les mots qui puissent transmettre la pureté de ce moment-là.
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Le Jamaïquain ne répond pas, il jette un coup d'oeil dans la rue, puis va pour refermer la porte. Je lui tends la main et me présente :
- My name is Patrick Chauvel, I would like to meet Bob Marley, it would be an honor...
- Meet Bob Marley an honor? répète mécaniquement l'homme qui me barre l'entrée.
Mon chauffeur me redonne un coup de coude, il commence à m'agacer celui-là. Je me tourne vers lui pour le lui signifier, il interrompt mon geste en me redonnant un autre coup et dit à voix basse :
- The King ! The King !
Bêtement, je me tourne vers le petit homme qui semble perdre patience et répète :
- Yes, the King, I would like to meet the King !
Mon chauffeur lève les yeux au ciel et marmonne quelques mots incompréhensibles à l'intention de son compatriote, qui se tourne vers moi et annonce d'une voix très calme, comme s'il parlait à un demeuré :
- I and I am the King !
Je répond un peu sèchement :
- Très amusing, c'est quoi cet I and I ?
- Me and me, if you prefer, continu le Jamaïquain toujours aussi calme, avec en prime un petit sourire au bord des lèvres.
Je sens la moutarde me monter au nez, je réplique :
- Bon, if you are Bob Marley the King, I moi-même am the queen of England ! Voila !
Satisfait de ma sortie, je me tourne en souriant vers mon chauffeur, qui me regarde effaré. Il pointe le doigt vers le rasta, va pour dire quelque chose, mais est interrompu par un autre homme qui apparaît à la porte.
- Désolé, Bob, j'étais aux toilettes, il y a un problème?
- Non, on a l'honneur d'avoir la reine d'Angleterre qui veut nous interviewer... Elle est fan de reggae... répond Bob Marley, car il s'agit bien de lui.
Le King en personne. (Pages 26 et 27)
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Ils deviendront, au 125e de seconde, une image qui se glissera entre deux pépées à poil dans les grands magazines.
Leurs têtes effarées feront le tour du monde, avec un peu de chance ça remuera suffisamment de merde pour qu'une décision soit prise et que quelque chose change.
Je me concentre sur mon travail, mise au point, lumière, cadre.
Être actlf, ça aide à croire à l'utilité de ma présence. (page 150)
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De retour à l'hôtel, je constate que le plafond de ma chambre tourne, puis descend et remonte vers moi dans un mouvement de pompe, c'est effrayant, je referme les yeux. Protégé par le noir, je tente de retrouver mes idées. C'est le vide, je rouvre les yeux pour les refermer immédiatement. Je viens de voir la tête de Bob Marley, elle est incrustée dans le plafond, un énorme joint planté dans la bouche, tournée vers moi elle ricane. Je fais une nouvelle tentative et entrouvre les yeux. C'est pire, la tête est devenue énorme et change de couleur, elle passe du vert au noir puis au jaune en se tordant à chaque fois. Tout à coup, le joint se détache de la bouche grimaçante et m'arrive dessus comme une balle, je me dégage brutalement. Je refuse d'être tué par une clope de ganja. Je tombe du lit et part dans un fou rire qui se transforme en crampe géante, tout mon corps se paralyse. Même au Cambodge, quand j'ai été touché par mon "Cher Obus", je n'ai pas senti quelque chose d'aussi effrayant. Je vais mourir ! C'est ridicule, je me rendors en maudissant Bob et son herbe du diable, j'ai juste le temps de me dire qu'il faut que je sois en forme pour seize heures.
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