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Citations sur Le revenant (10)

Ainsi, je voudrais une nuit, quand l'heure des voluptés sonne, vers les trésors de ta personne, comme un lâche, ramper sans bruit, pour châtier ta chair joyeuse, pour meurtrir ton sein pardonné et faire à ton flanc étonné une blessure large et creuse.
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Il n'a que 21 ans et vient de débuter Les Fleurs du mal, le parfum vénéneux des adolescences des siècles à venir. (p. 11)
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Ne vous demandez pas quelle malédiction l’a arraché aux ténèbres car, comme chacun sait, dans le cinéma populaire et dans la littérature de gare, un mystère nimbe toujours la zombification des mortels. Peu importe qu’il s’agisse d’un champignon toxique inconnu, d’une bactérie mystérieuse ou d’une source radioactive, Charles est bel et bien de retour parmi les vivants. Ce pauvre hère à la morsure vaine et à la bave torrentielle ignore quasiment tout, cependant, de son existence passée, qui il fut, qui il aima, ce qu’il transgressa et, surtout, ce qu’il écrivit et sous l’influence de quelle muse adorée. Il n’a qu’une extrêmement vague impression de cette existence. La souffrance de se découvrir en génie avili, aussi piteusement déclassé, ne lui cause aucun tourment puisque le voilà privé de toute capacité à raisonner et à éprouver. Il n’est rien de plus qu’un esprit primitif enfermé dans un corps humain délabré. Mais un esprit soumis à l’addiction de la morphine, comme pour augmenter un peu plus la charge de malédiction qui le frappe. Dans le Paris de la disruption, de ses limbes de morts-vivants, il traque des motifs de soulagement. Mais ne subsistent en lui que des idées fantômes et des sensations pâles. Il ne peut rien exprimer de sa quête passée et de sa damnation éternelle. Même si des souvenirs précis venaient à hanter son esprit demeuré, il ne pourrait rien en dire. Cette aphasie est peut-être une résurgence de ses troubles cérébraux, nous n’en savons rien. Pour l’heure, il ne peut que geindre, souffler, cracher et, lorsqu’il entrevoit un peu de ce qu’il fut, derrière les brumes épaisses des siècles passés, hurler.
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"Car c'est bien lui, l'hominidé vautré dans son vomi, qui a pour la première fois compris l'ivresse de se mouvoir au cœur vivant et vibrant d'un flux d'humain."
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La téléphonie mobile, c'est l'avenir. L'événementiel, tout ça. Elle pense à lui, au fait qu'on la trouve jolie et cela, tout de même, elle y songe maintenant en voyant Charles, ne peut constituer un argument recevable. Que seules les jolies femmes puissent startuper entérine au final une sorte d'injustice fondatrice des rapports entre les hommes qui startupent et les femmes qui startupent.
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De s’être débattu comme un diable dans le cœur sombre du XIXe siècle n’aura pas suffi. Rappelons les faits, pourtant extraordinaires. Né le 9 avril 1821 à Paris, Charles Baudelaire est âgé de 6 ans lorsque succombe son géniteur, disparition qui va influencer sa vie dans les grandes largeurs. De ce drame personnel naîtra une poésie universelle. Sans la mort de son père, notre homme n’aurait probablement jamais porté sa croix de poète maudit. Peut-être même serait-il devenu fonctionnaire, marchand d’art, ou pire encore. Il n’aurait pas passé son existence à honnir son beau-père, Jacques Aupick, ce général d’armée, autoritaire par profession, qui va involontairement nourrir la révolte de l’adolescent, le plongeant tout de go dans une insondable névrose et le frappant, pour ainsi dire, de malédiction. La mère symbolisera l’élan sensible et créatif, le père, la basse-fosse où agonisent les rêves et leur pendant sacré, la poésie. Prisonnier de ce schéma difficile, pour ne pas dire délétère, Charles va transgresser comme il respire. Renvoyé en 1838 du lycée Louis-le-Grand, il s’échine à mener une vie à l’encontre des valeurs bourgeoises qu’incarne la famille. Ce dégoût devient le nœud gordien de son inspiration. Il passe son bac, dernier repère du conformisme, mais replonge, comme l’opiomane (qu’il n’est pas encore), dans sa drogue : la sédition de principe. Jugeant la vie de l’adolescent scandaleuse et désireux de l’assagir, Aupick le fait, dit-on, embarquer pour Calcutta. Mais ce périple mystérieux, imparfaitement documenté, ne sert à Charles qu’à colorer sa révolte totale menée au nom de la Beauté : elle sera exotique ou ne sera pas. Jacques a raté son coup et, finalement, on ne sait si Charles devient poète précisément afin que le coup rate. Quoi qu’il en soit, le voilà désormais toisant les sensualités inédites de ce monde, méprisant la médiocrité comme d’autres se préservent d’une maladie mortelle. En 1840, à l’âge de 19 ans, le cours des choses s’accélère comme il était prévu, pour ce grand torturé, qu’il s’accélérât. Par provocation et par amour, il se lie à Jeanne Duval, à ce point citée par les futurs exégètes de l’œuvre de Charles, qu’elle semble, avec le temps, avoir revêtu le masque du personnage central. À en juger par son endettement, sa mise sous tutelle, sa vie dissolue, Charles serait sans doute pris pour un parfait raté s’il ne produisait une poésie absolument révolutionnaire relevée d’une posture de dandy qui magnifie sa vie de débauche. Pour parachever cette débâcle personnelle, lui, le jeune homme bien né, va contracter la syphilis. Il en combattra les douleurs grâce au haschich dont il devient dépendant. Il n’a que 21 ans et vient de débuter Les Fleurs du mal, le parfum vénéneux des adolescences des siècles à venir. Ce n’est qu’en 1857 que paraît l’ouvrage, aussitôt interdit pour offense à la religion et outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs. En attendant, Charles sera critique d’art, journaliste, défenseur de la liberté sur les barricades de la « Révolution de février ». Souffrant toujours d’addiction et d’endettement, il fuira en Belgique et connaîtra ce que l’on nomme alors des « troubles cérébraux ». Épuisé par quatre décennies de tourments créateurs, il meurt une première fois à 46 ans, en 1869, l’année où paraît son autre chef-d’œuvre, Le Spleen de Paris. Tant d’affres, d’aventures, de dérives, toutes aussi intenses que mille vies vécues, n’auront pas suffi à souffler l’existence de Charles Baudelaire : le 18 janvier 2018, 149 ans après sa mise officielle au tombeau, dans le quartier du Marais, entre une sortie de métro et un kiosque à journaux, Charles revient – si l’on peut dire – à la vie, sous la forme d’un zombi syphilitique.
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Elle s'est peu à peu convaincue que son corps était attirant pour des hommes pauvres ou des hommes riches, mais pervers. Sa dose quotidienne de crack l'aide à accepter cette situation qui, sans cela, démoraliserait n'importe qui. Elle le fixe, non parce qu'elle le trouve beau, non plus pour l'attirer en vue d'une passe. Non, elle le fixe ainsi parce que, ravagée par le crack qu'elle vient de fumer en trop grande quantité, elle ne peut faire autrement que de se tenir là, à genoux devant le monstre qui se vautre dans les restes de son repas. Le monstre qui se réveille et tente d'abord de griffer avant, soudainement, de se rétracter comme si lui revenait le souvenir d'un soir chaud d'automne, l'odeur d'un sein chaleureux. Il la regarde et voit se dérouler des rivages heureux, qu'éblouissent les feux d'un soleil monotone.
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Leur générosité s'exprime tout juste dans le charity business télévisé ou par une donation abstraite à une ONG. La pauvreté, lorsqu'elle est saleté, les décourage vite et les répugne. Il leur faut des pauvres affables, magnétiques, rutilants. Sans ces conditions, ils se mettraient même en colère, invectivant le laisser-aller de l'État, de la police et des juges. Ils ne savent pas cependant (ou feignent de ne pas savoir) que cette répugnance qu'ils ressentent est le produit d'un calcul froid les poussant à ne pas s'embarrasser de ce qui freinerait leur ascension personnelle ; or, la pitié figure évidemment parmi ces sources d'embarras en ce qu'elle nous plonge dans un marigot d'émotions suspectes
.
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Dans sa vie d'enfant et d'adolescent, Charles a connu le Paris révolu, congestionné, pauvre et dangereux. Humides, insalubres et propices au développement des maladies mortelles, les bâtiments ne sont alors que rarement pénétrés par le soleil. En 1832 – qui le sait ? –, 25 000 Parisiens meurent du choléra au cœur même de la capitale (Charles a 11 ans). En 1848, ce sont 20 000 individus de plus qui succombent (Charles a 27 ans). Sans égouts, sans eau courante, sans arbres, Paris est pour ainsi dire médiévale.
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Charles Baudelaire est âgé de 6 ans lorsque succombe son géniteur, disparition qui va influencer sa vie dans les grandes largeurs. De ce drame personnel naîtra une poésie universelle. Sans la mort de son père, notre homme n'aurait probablement jamais porté sa croix de poète maudit. Peut-être même serait-il devenu fonctionnaire, marchand d'art, ou pire encore. Il n'aurait pas passé son existence à honnir son beau-père, Jacques Aupick, ce général d'armée, autoritaire par profession, qui va involontairement nourrir la révolte de l'adolescent, le plongeant tout de go dans une insondable névrose et le frappant, pour ainsi dire, de malédiction. plonge, comme l'opiomane (qu'il n'est pas encore), dans sa drogue : la sédition de principe.
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