Citations sur Falalalala (55)
On ne prend pas toujours la peine, quand on vit ensemble jour après jour et ce des années durant, de regarder vraiment ceux qui nous entourent. On ne distingue pas les angles pointant sous la chair plus fine et molle, les ondes s'imprimant sur la peau de plus en plus tachée, de moins en moins lisible. On ne les voit pas s'épaissir de-ci de-là, blanchir dans les entournures.
Il faut la distance pour ça. Un léger oubli de l'autre. Se détourner suffisamment longtemps, et revenir, pour être frappé de conscience.
Un cerveau humain pèse environ 1,5 kg, et engendre approximativement 7 263 872 milliards de questions par an.
Dès que ce petit organe rose et spongieux sort de sa période de rodage pour fonctionner à plein régime, nous nous mettons à entailler, déchiqueter et décortiquer infatigablement notre paisible quotidien avec les petits scalpels tranchants de nos existentielles et souvent stériles interrogations.
Nous déambulons sur les trottoirs de notre conscience, tranquilles, habités seulement de nos émotions habituelles, quand soudain ils surgissent, tel un prédateur sexuel jaillissant du local à poubelles de notre psyché.
« Ils » : les « pourquoi », les « et si » et autres « est-ce que ».
Et là, c’est déjà foutu.
Qui suis-je, pourquoi-je et Dieu dans tout ça ?
Tu me manques, Papa. Tous les jours. Parfois, juste un peu. Comme quand il fait tellement chaud qu'on se sent écrasé, aplati, et qu'on pense à la brise, tu sais ? Voilà, tu me manques comme le vent. Et à d'autres moments, comme l'air tout court. Ton absence m'étouffe presque.
Il y a des silences, des regards – et des absences de regards, aussi – qui dispensent de paroles.
"La vie est courte", c'est certainement la formule la plus connue après E=MC2. Elle est ultra-commode, justifie à peu près le moindre de nos choix et donne un alibi à tous les débordements imaginables. En dépit du gigantesque potentiel de ridicule ratatiné dans cette minuscule expression poncée jusqu'au trou, elle n'en est pas moins vraie. Implacable.
Les humains sont de la 3-D. Hauteur, largeur, profondeur. On occupe de la surface, on absorbe de l'oxygène, on produit du dioxyde de carbone. On est chimie, on est physique. Or, ce qui est incompréhensible, dans la mort, c'est cette disparition si soudaine de la masse. Cette soustraction totale et permanente. On est là et, la seconde d'après, on n'est plus. C'est illogique, strictement abracadabrant. C'est même falalalesque.
- Il ne m'a pas forcée, Richard. Pas du tout. On est amoureux et c'est ce que font les gens amoureux.
- Non-non-non ! Quand on est amoureux, on se tient la main, on regarde les nuages en se disant « Oh un lapin ! », on rit et on s'embrasse. Point !
- Bah oui, c'est ce qu'on a fait ! Sauf que nous on a regardé les nuages en se disant « Oh une bite ! » et ça nous a donné des idées. Ce n'est pas notre faute !
Prenez un grand homme, mettez-le devant une petite femme, et il ne sera pas de taille.
Ludovika, elle avale des tas de bouquins. Pièces de théâtre, essais, nouvelles, elle a tout le temps un livre à la main et des citations en tête. Si on la scalpait, on trouverait une bibliothèque dans son crâne, c'est certain ! Quand elle est dans sa chambre et moi dans l'atelier, si sa fenêtre est ouverte, je peux l'entendre rire. Elle rit seule. Et ça fait sourire toute la maison. Et puis parfois, comme ça, elle pleure à gros bouillons. Le nez dégoulinant entre deux pages, elle se mouche dans tout un chapitre. Elle vit des trucs qui m'échappent ! Qui nous échappent à tous. Elle est dense, complexe, multiple. Jamais limpide, cernée, finie... Elle traverse d'autres vies que la sienne. Elle est pleine de gens et de mondes et de paysages ...
Il aurait dû savoir que, même lorsque le mensonge prend l'ascenseur et la vérité, l'escalier, ils finissent tous deux par arriver au même étage.