Comment expliquer qu'un mince recueil de poésie, un jour, vous interpelle ?
Qu'en l'ouvrant au hasard et en lisant quelques lignes deci delà, vos yeux accrochent des mots, qu'une musique nait doucement dans votre tête, que ces mots rencontrent un souvenir sensible, évoquent un vécu ou un rêve, qu'ils s'insinuent en vous et vous charment, vous entraînent loin, ailleurs.
C'est cela une rencontre poétique et bien plus aussi. Ça ne s'explique pas totalement, comme une rencontre amoureuse finalement.
À la question anodine posée par un proche intrigué par mon regard vague :
" Où es-tu ? ", j'ai répondu rêveusement mais sans hésitation : "
le long d'un amour ! ".
N'est ce pas une fabuleuse aventure ?
Vagabonder au hasard des pages le long d'une méditation poétique sur l'amour éternel, simple, évidente mêlant infini et finitude humaine, dicible et indicible, parsemée de visages, de voix, de mains, d'yeux, de regards.
Saisir le murmure de l'amour, quête tout autant humaine que spirituelle pour
François Cheng.
Puis, réaliser en refermant le recueil que son vocabulaire simple, son expression limpide servent ici avantageusement la pensée du poète et favorisent l'émergence d'un ressenti personnel du lecteur.
" Aimer c'est être en avant de soi
Aimer c'est dire " Tu ne mourras pas ! "
J'ajoute juste qu'une note biographique en fin d'ouvrage nous apprend que
François Cheng, chinois d'origine, est arrivé en 1949 à Paris à l'âge de 20 ans, ne connaissant personne et pas un mot de français. Quel parcours donc pour obtenir la naturalisation française en 1971 et être élu à l'Académie française en 2002, et quelle richesse manifeste dans cette double culture.