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Citations sur La part du sarrasin (26)

- Oh les chieurs ! Jamais vu des mecs aussi susceptibles ! Un rien vous vexe, vous n'arrêtez pas, les gars, la semaine dernière et l'autre avant, c'était le même cirque, vous confondez fiction et réalité, c'est chiant ! Séparez-les une fois pour toutes ! C'est vrai, on peut plus rien vous dire. Si on vous réclame de la distance, ça vous vexe, vous identifier comme Français c'est vous diminuer, vous traiter en Arabes c'est quasi une insulte, vous vouvoyer c'est faute grave, vous tutoyer, la pire des insultes et toucher vos sœurs, un crime... Consultez, les gars !
On est devenus blêmes. Pierrick qui hier encore buvait mes paroles venait de résumer en quelques phrases vingt ans de dérobades et d'esquives, une fessée.
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D'élargir le répertoire on se sentait mieux, chanter le désespoir consolidait nos os, on grandissait, c'est donc qu'on avançait. Enfin nous quittions nos dix-sept ans épileptiques et joyeux pour une gravité salvatrice. Sans doute il avait fallu qu'on tombe ensemble et d'un même étage pour être à égalité de fractures.
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Quant à Greg, bien élevé, il eût été "le beau Greg" mais la rareté des neurones effaçait la beauté et la douceur possibles, l'intelligence chez lui semblait battue en brèche, elle décampait au moindre affolement émotionnel et laissait place net au lièvre face aux phares. Sans cette absence de matière grise, on l'aurait trouvé beau avec des yeux en eau de mer, une mâchoire certes pointue mais qui lui donnait des airs de mannequin de l'Est. Des fois, même blond, la pauvreté vous fait moche.
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Bébert a tiré une longueur chargée d'effets sur sa corde de mi et c'était parti pour deux heures de transe électrique où j'ahurissais l'assistance en sautant aux quatre coins de la scène comme un cabri, un public épars m'interdisant de me jeter tel un fauve sur sa proie. Je débitais comme un marteau-piqueur des phrases incompréhensibles tant le rythme était soutenu. Faut dire que le public n'en avait cure de mes métaphores sanglantes, il aspirait à l'apocalypse sonore, à l'ébullition, à la crémation des tympans. Il ne cherchait pas l'originalité d'un accord ou la subtilité d'un pont en ré, rien de musical mais tout simplement l'avènement d'un chaos chamarré et ses vœux étaient exaucés.
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- Ecoute, Madge, vis ton bonheur à fond même si c'est les yeux ouverts, ça restera ton meilleur souvenir. Ne fais pas comme moi, j'ai laissé partir des tas de petits bonheurs et je les regrette, ne rate pas les tiens.
J'ai frémi de ce regret, de ce soudain avertissement, que regrettait-elle ? Est-ce qu'en abandonnant le groupe, je ne commettais pas la plus grosse erreur de ma vie ? Et puis Samir et Momo ? N'avais-je pas, en désertant l'asso, trahi nos rêves de refonder le monde ?
- Ne gâche pas, insistait-elle.
Elle me disait tout cela comme si elle craignait que je devienne, comme elle, une machine à gamberges, un sacrifié de la cause.
- On a droit à soi, disait-elle, moi je me suis perdue, j'ai tout perdu.
Le "droit à soi" me parlait. Plus je m'échinais à construire des "bandes", plus l'appel de "moi-même" me siliconait de son écho.
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Au sortir de l'entretien, je me suis massé le visage avec mes paumes pour effacer le sourire contenu de main ferme devant ce trader de cuisine, à la vue de cette verrue dégoûtante qui n'avait d'humain que le goût de marcher sur la gueule du plus faible.
Putain ! me suis dit, ils vont m'appeler Chris, si ma mère entend ça, elle déchire ma page du livret de famille, si mes frères, mes soeurs, tous mes potes apprennent que j'ai cédé à cette injonction c'est pas Chris qu'ils vont m'appeler mais Salam, genre, Adieu on te connaît plus. Ou Sale con, et je l'aurai bien mérité. Toutes ces années passées dans la cité à haranguer pour la dignité cognaient à la porte de ma conscience, tout ce temps à bassiner les copains jouaient les boomerangs.
"Nous devons montrer qu'il n'y a pas de fatalité et pour montrer faut se montrer, lever la tête et dire non à toute discrimination. " Tu parles.
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- Qu’est-ce qu’il voulait ?
- J’sais pas, avec ces mecs t’es coupable même de rien.
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Non, ce n'était pas une simple bagarre [des skinheads ont attaqué le groupe de Magyd en plein concert], c'était un combat d'idée : la France blanche, immortelle et chrétienne contre celle des Arabes, voilà ce que je voulais qu'on dise. C'était un combat qui nécessitait qu'on s'informe et se forme sur l'état du pays. C'était un combat qui imposait qu'on lise et, comme le répétait Pierrick, qu'on aille sur le terrain vérifier l'état de démembrement des populations étrangères.
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Ils ont chaviré deux heures durant, vogué par-dessus les têtes, chanté à en perdre le souffle mais dans cette immensité fraternelle et dansante, pas un visage reconnaissable, une masse mouvante qui s'attachait plus à un symbole qu'à ma personne, je n'étais tout à coup qu'une image figée. Ils applaudissaient ce qu'ils croyaient être moi, une illusion accrochée au mur de leur chambre. Dans cette foule bienheureuse, je ne voyais pas un Reubeu de quartier, pas le moindre fils de la cité, rien qui m'eût définitivement consolé. Ces Arabes étaient-ils ailleurs ? Ont-ils seulement existé ? Est-ce que cette armée basanée n'était que le doux rêve d'un français qui n'a été algérien que le jour de sa naissance ? Peut-être avais-je oublié qu'ils étaient français mais, à ne pas se l'entendre dire, on tourne le dos à la vérité pour préférer sa part d'ombre. Au milieu de la foule transie, j'ai retrouvé la solitude des salles vides qui, elles, au moins, vous font espérer. Rêver qu'elles se rempliront un jour.
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- Mais c'est quoi un Français ?
- C'est toi ! Un Français c'est grand, blanc, beau, ça lit Rimbaud, Balzac ou Montherlant, ça cherche à casser les codes, à bousiller les a priori, à couper la tête d'un roi, les couilles à Dieu et surtout ça veut la femme de son voisin.
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