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EAN : 9782707320094
158 pages
Editions de Minuit (06/09/2007)
3.34/5   110 notes
Résumé :
Cet écrivain aime sa chambre, sa table, sa chaise, dans la pénombre : on l'envoie en Afrique où sont les lions, dans le soleil. Que va-t-il chercher là-bas ? Un grand poème, dit-il. Ou ne serait-ce pas plutôt l'inévitable récit de voyage que tant d'autres avant lui ont rapporté ? On l'a lu déjà, et relu. L'auteur va prétendre que des indigènes l'ont sacré roi de leur village. Il aura percé à jour les secrets des marabouts et appris de la bouche d'un griot vieux comm... >Voir plus
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L'écrivain en Afrique, tout anti-héros soit-il, qu'il se nommât Jean-Léon ici ou Oreille rouge là-bas, n'est guère parvenu à dérouiller mes zygomatiques malgré l'ironie de l'écrivain en France. L'écrivain au Mali dans les mots de l'écrivain de Minuit est pourtant épinglé comme un papillon exotique, aux ridicules ailes cloquées.

Fat à souhait, autocentré dans ses pauvres pérégrinations qui ne le conduisent qu'à peaufiner son image, n'apprenant rien à force de plaquer ce qu'il pense savoir, imperméable à tout sauf à sa propre transpiration, Oreille rouge a l'oeil voilé de celui qui ne voit que ce qu'il souhaitait trouver. Et encore, pas toujours. L'hippopotame se dérobe. L'éléphant entre dans sa valise (8 cm par 15).

De plus, le bonhomme est aussi couard que satisfait.
“Les touristes l'indisposent avec leurs gros sabots. Il va pied nus. Métaphoriquement, il va pieds nus, car il y a tout de même l'inquiétant grouillement des vipères et des scorpions dans la brousse."
Il n'est là que pour piller. Dans son carnet de moleskine noir les notes promettent le grand poème sur l'Afrique. "Tout ce qu'il est possible d'extraire, de puiser, de capturer, de cueillir, de produire en Afrique sera extrait, puisé, capturé, cueilli et produit puis précipité pêle-mêle dans son poème.”

Le retour le rend insupportable. A tous. "Ses doigts tambourinent sur les tables, sur le capot des automobiles, sur tout ce qui sonne". Tout est percussion pour lui. On doit le menotter pour qu'il cesse de nous tapoter le crâne."

Oui mais… Si le nom de l'écrivain voyageur importe peu (les marchandises maliennes), celui de l'écrivain de Paris m'importe davantage: Chevillard n'est pas Echenoz. Ironique, certes mais d'une ironie émoussée. La formule se délaie, s'obscurcit, peine. Il me manque cette fulgurance echenozienne, la nonchalance du dandy, le lapidaire brillant.
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Un écrivain est invité à résider et écrire au Mali, mais le monsieur est casanier ; pas question de partir. Oui, mais comment résister au plaisir de lancer négligemment dans la conversation : « Peut-être vais-je aller en Afrique au début de l'année prochaine, je ne sais pas encore. Je me tâte. »
Bref, il reçoit son passeport, fait ses vaccins et part.
C'est de la fiction, mais ce n'est pas un roman. Ça parle d'écrivain et d'écriture, mais ce n'est pas un essai. C'est un texte humoristique, ironique, mais qui m'a plus ennuyée qu'autre chose.
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Du même auteur, que je ne connaissais pas, Il y a quelques semaines j'avais été enthousiasmé par la lecture de « L'autofictif ». Éric Chevillard excelle dans les formats courts ; Aphorismes, pensées et autres pirouettes littéraires, mais avec un roman ... ? Et qui plus est, un roman de voyage ... ! Et bien, il s'en sort pas mal, même s'il explore davantage les possibles de la narration écrite que le Mali lui-même. Parce que ce qui est important ici c'est le style ; inventif, libre et personnel. Oreille rouge est un écrivain casanier, on lui propose une résidence d'écriture au Mali ... quelques semaines ... il hésite, tergiverse ... mais bon ... il y va. Il veut voir la girafe et le lion, et surtout l'hippopotame (les autres ne sont pas au Mali), il va méditer au pied du baobab, il doit écrire « le grand poème de l'Afrique », il y croit ... mais déception ! Il n'est pas le grand-T-écrivain-aventurier romantique. Il n'est qu'un pâle touriste égaré, qui au mieux, invente des proverbes africains.
Le lecteur, lui, doit être concentré, plus concerné, plus imaginatif aussi, car l'auteur mieux que d'autres favorise l'abstraction. Éric Chevillard prend du recul ; Oreille rouge c'est lui. L'autodérision, la liberté de ton, la richesse et les jeux de l'écriture, voila de quoi est fait cet étonnant petit roman (158 p.). Allez, salut.
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Reprenant les mots de Beckett, Deleuze disait dans son abécédaire, à propos des intellectuels qui vont au bout du monde pour parler ou écrire : «On est con quand même, mais pas au point de voyager pour le plaisir». Éric Chevillard transforme cette assertion en une chose délectable et féroce, avec le voyage d'Oreille rouge au Mali.

L'homme est écrivain, invité en résidence d'écriture en Afrique. Il ne compte pas y aller, casanier, pleutre et ne connaissant rien, mais il jouit d'étaler cette perspective, se voit grand voyageur, le clame sur tous les toits.

«Négligemment lâchée dans toutes ses conversations, l'information fascine. Il en tire sans bouger tous les prestiges du voyageur. Voyons-nous l'hiver prochain, dit-il, puis ajoute à moins que je ne sois en Afrique. Je me demande si je ne vais pas faire un saut au Mali en janvier, murmure-t-il, songeur, comme pour lui-même. Écoute, je ne peux pas m'engager, il n'est pas impossible que je sois en Afrique à ce moment-là.
Pour qui nous prend-il ?»

Piégé par la perspective qu'il a lui-même tracée, il s'apprête à partir, mais en fait des cauchemars. Continuant de se fabriquer un personnage idéal et grotesque, il fait l'acquisition d'un carnet de moleskine pour y consigner ses précieux écrits de voyage. Il rêve d'être l'élu, l'homme blanc dont la plume capturera l'essence de l'Afrique.

Le voyage finalement entrepris est un extraordinaire chapelet de poncifs et un portrait jouissif et ridicule du touriste écrivain voyageur, cristallisé autour du carnet de moleskine et de la quête d'Oreille rouge pour apercevoir des hippopotames ou autres bêtes sauvages depuis longtemps disparues.

Oreille rouge écrit dans son carnet de moleskine le titre de son grand poème sur l'Afrique car c'est tout ce qui lui vient. Et si les mots se font rares, c'est parce qu'il est le seul, à parfaitement saisir l'essence aride de l'Afrique. Oreille rouge se voit en homme libre en Afrique, car il écrit hors des lignes de son petit carnet. Mais homme gris et conformiste il est et restera, et tel un Adrien Deume, à son retour, il reportera tout sur des fiches bristol classées par thème dans un beau classeur neuf.

Oreille rouge est pathétiquement comique, une outre de clichés, un exploiteur inconscient, tourné en ridicule par les habitants du village, tel Toka qui prétend lui faire découvrir les hippopotames.

«Tout ce qu'il est possible d'extraire, de puiser, de capturer, de cueillir, de produire en Afrique sera extrait, puisé, capturé, cueilli et produit puis précipité pêle-mêle dans son poème.»

Et son retour en France ne pourra rien changer, car si cet homme s'est rêvé «polyglotte, piroguier, danseur, musicien», il demeure tel qu'il a toujours été, lourd et rabougri, simplement affublé d'une paire d'oreilles plus rouges.
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Eric Chevillard, né en 1964 à La Roche-sur-Yon, est un écrivain français auteur de très nombreux ouvrages. Son roman, Oreille rouge, date de 2005.
Le héros du roman est un écrivain invité au Mali pour une résidence d'écriture. Certains sauteraient au plafond d'excitation, pas lui. Notre homme aime ses habitudes et n'est pas un fanatique des voyages (« Au nom de quoi faudrait-il partir ? Et s'il était plus aventureux de rester ? ») mais finalement il va se décider favorablement. Déjà on commence à cerner le bonhomme, les préparatifs ne sont pas une mince affaire pour lui, passeport, vaccins, penser à emporter tout un tas de médicaments… Un début d'intérêt pour ce voyage commence à poindre quand il annonce autour de lui qu'il va partir pour l'Afrique, ça lui donne une petite importance.
Un gentil petit roman qui a certainement beaucoup amusé Eric Chevillard quand il l'a écrit. le texte est en trois parties, avant, pendant et après le voyage, fait de très courts paragraphes enchainant faits et réflexions divers, toujours sur un mode humoristique léger (« La grenouille ne risquait pas de se faire aussi grosse que le boeuf dans la fontaine : la chose eut donc lieu dans le fleuve. »).
Le thème du bouquin est donc le voyage. le voyage vers l'exotique Afrique et qui plus est, par un écrivain sensé en retirer quelque chose, genre littérature de voyage. Notre homme se propose ainsi d'écrire le grand poème de l'Afrique, pas moins. Vous l'avez compris, Eric Chevillard fait dans la satire, satire douce et molle, mais satire quand même.
Muni d'un petit carnet en moleskine, l'arme absolue de l'écrivain-voyageur, notre homme au Mali y consigne des faits insignifiants, compile les idées reçues et les images convenues, tout en s'imaginant et s'étonnant lui-même d'être un grand voyageur. Venir ici et ne pas croiser d'hippopotames, serait une hérésie, vous allez tout savoir du bestiau en lisant ce bouquin. de retour en France, tout comme les soirées diapos d'autrefois saoulaient les malheureux amis conviés, la ramener sans arrêt pour tout et n'importe quoi, en se référant au Mali finit par lasser les proches les plus aimables.
Notons que certains passages sont assez poétiques, litote polie pour dire qu'on ne comprend pas trop ce que veux dire l'écrivain à cet instant. Alors que dire pour conclure ? Certes c'est amusant et souvent bien vu mais comment dire, c'est un peu lisse, ça manque d'aspérités (dans le sens positif ou négatif) pour en faire une tartine.
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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
Albert Moindre croyait avoir fait le tour de l’éléphant.
Il ne lui avait fallu pas moins de quinze années, sans jamais ralentir le pas. Mais cette fois il arrivait au bout de son périple. Ne commençait-il pas à reconnaître des choses qu’il avait vues déjà, des gens et des lieux ? Il continuait pourtant. Car dès qu’il prenait la décision de s’arrêter et de poser son sac, le doute s’insinuait en lui : et s’il ne s’agissait que de ressemblances, de similitudes fortuites ? Et il repartait. Il allait voir plus loin.
Le malheureux, il marche encore.
A-t-on jamais fait le tour de l’éléphant ? se demande Albert Moindre en allongeant le pas
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Lorsque l'Européen pose le pied sur le sol africain, il est d'abord désemparé. L'appareil des cinq sens en surchauffe se détraque : est-ce beau, est-ce laid? Est-ce infect ou savoureux? Parfums ou miasmes? On ne sait pas.
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Il retrouve Rouki et ses sœurs pour une promenade dans la savane. C'est un gri-gri, disent les enfants en désignant une corne enveloppée dans des bandes de tissu et de plastique suspendue à une branche de manguier à l'aplomb d'un crâne de mouton. Je l'aurais parié, dit Oreille rouge. On ne doit pas y toucher disent les enfants. Mais ils rient en approchant les doigts de la chose. Cependant, ils n'y toucheront pas.Lui, vous pensez s'il s'en moque, il s'est fabriqué un gratte-dos avec l'annulaire de Catherine de Sienne dérobé dans son reliquaire.
Mais il respectera les croyances locales.
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Roulements de tambour. Applaudissements. Une femme arrive qui porte sur la tête un ballot de vingt ou trente calebasses emprisonnées dans un filet. Et telle cependant elle se fond dans la foule. Deux exploits impossibles pour Oreille rouge. Certaines portent l'eau, d'autres la terre ou le sable. Celles qui n'ont qu'un foulard soutiennent certainement le ciel. Longues et fines,ondulantes, elles défilent le long du fleuve, top-modèles sans rivales, la collection printemps-été en boule dans la bassine en fer blanc posée sur leur tête.
Oreille rouge défend avec ardeur la cause de la femme africaine en lorgnant ses fesses hautes d'un œil fou.
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En attendant, il vient de recevoir son passeport. J’ai dû le faire refaire, dit-il. Mais c’est évidemment la première fois qu’il possède un passeport. Il attrape l’objet plat par un angle et l’agite devant son visage, puis tapote avec la paume de sa main gauche. Il caresse du bout des doigts la couverture lisse et luisante, très légèrement grenue. Jusqu’alors il n’avait connu ces sensations extrêmes qu’en dorlotant son livret de caisse d’épargne.
C'est pourtant le contraire. Finie l'économie mesquine.
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Vidéo de Éric Chevillard
«Bêtes de littératures» avec Éric Chevillard Hérissons, orangs-outans, tortues, flamants roses, insectes… Les bêtes peuplent les livres d’Éric Chevillard. S’interrogent à cette occasion les enjeux de la présence d’animaux, et par là d’altérités non humaines, dans la littérature. Comment rendre compte, avec l’écriture, d’intensités animales au-delà de l’allégorie ou de la fable ? Donner vraiment la parole aux animaux, est-ce pour autant se couper du symbolique ? Et l’humour dans tout cela ? L’entretien sera ponctué d’une lecture d’extraits de «Zoologiques» (Fata Morgana, 2020). - Modération : Sandra de Vivies La Fondation Jan Michalski, le 11 septembre 2021
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