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EAN : 9782707318435
272 pages
Editions de Minuit (03/10/2003)
3.75/5   52 notes
Résumé :
On se croyait quitte de ces sornettes, pour parler franc. L’enfance est derrière nous. Et le conte du vaillant petit tueur de mouches est une vieille histoire. Or voici qu’un écrivain prétend soudain devenir l’auteur conscient et responsable qui fait défaut à celle-ci, enfantée négligemment par l’imagination populaire, soumise à tous les avatars de la tradition orale puis recueillie en ce lamentable état par les frères Grimm au début du XIXe siècle. Il a des ambitio... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
TOUT ÇA POUR ÇA ?

D'une manière générale, je n'aime guère descendre un livre. D'abord parce qu'il en faut pour tous les goûts, ensuite parce que selon l'humeur du moment, on peut aussi bien passer à côté d'un ouvrage génial qu'en trouver un autre bien mieux qu'il n'est en réalité, parce qu'on a eu l'idée de l'ouvrir pile dans la seule bonne fenêtre de tir de sa propre petite existence. Bref, trop d'irrationnel et de subjectivation pour se donner le droit de dire à son prochain tout le mal qu'on pense du bouquin que l'on referme à peine.

Pourtant... Combien je regrette parfois de n'être pas de ces lecteurs qui savent mettre un bouquin qui ne leur plait pas au rencard ; combien je désespère, parfois, de m'astreindre à aller jusqu'au bout du bout d'un pensum entamé la veille ou l'avant veille ; combien je me hais, parfois, d'avoir ce genre de TOC du lecteur viscéral et compulsif incapable de s'avouer vaincu par un texte qui se rebiffe, qui se dérobe, qui agace !

Car de l'agacement, j'en ai éprouvé presque dès la première page, dans cet avant-dire prétentieux qui sert de préambule au livre que j'achève à l'instant, en sueur et décati, le vaillant petit tailleur de M. Eric Chevillard.

Pour ma défense, je dois avouer que c'était un livre offert à ma Douce -et que je n'aurais très probablement jamais acheté et lu sans cela -, que je ne suis pas très fan des ouvrages publiés aux éditions de Minuit d'une manière générale (A l'exception notable des ouvrages de Claude Simon), et que je n'avais a priori rien contre Eric Chevillard, mais rien pour non plus. En bref : le bouquin qui traîne depuis si longtemps sur sa table de chevet qu'un beau matin on s'en empare en se disant qu'après tout, pourquoi pas ?

Hélas, cette exaspération des premières pages s'est très vite transformée en horripilation, en crispation. N'était le fait que je déteste me fâcher, la colère n'était pas bien éloignée.

Car de quoi s'agit-il au fond ? D'un exercice de style -brillamment exécuté mais insupportable -, d'une broderie -au sens propre et avec jeu de mot- autour du conte, il est vrai pas des plus passionnants, du vaillant petit tailleur que l'on peut découvrir parmi Les contes de Grimm, des fameux frères du même nom. J'avoue aussi -puisque nous en sommes aux aveux de toute sorte- leur préférer, et de loin, ceux de Perrault ou ceux d'Anderson, pour ne citer que ces deux-là. Mais bon, pas de quoi en faire un fromage. Ni une tapisserie, fût-elle de Bayeux ou d'Aubusson. Or, notre auteur (il s'en vante assez, de l'être, sous forme d'auto-dérision tellement répétée qu'elle en devient parfaitement factice et suspecte) a décidé, sans que nul ne lui le demande probablement jamais, de couvrir de ses points -de croix ou d'Alençon, qu'importe- de ses virgules, et de toutes autres matières vocabulistiques de remplissage quelques deux cent pages d'un humour qui ne cesse de se répéter, d'une écriture certes vive et enjouée mais qui sent à mille lieues (sans les bottes) son faiseur, son fabriquant de bons mots à la chaîne. Qui, comble du comble, semble m'avoir à ce point contaminé que je ne puis, sans prétendre au talent de M. Chevillard vous voudrez bien m'en excuser, m'empêcher de me rendre coupable des mêmes vices, des mêmes ficelles, des mêmes facilités.

Alors oui, c'est parfaitement exsangue, épuisé, malmené mais sans joie - certains autres livres peuvent tout à la fois vous pousser au bout de vous même, et vous trouver grandit et heureux tout en même temps. Ici, non -, énervé d'avoir passé temps de temps à parcourir ces pages tellement suffisantes, aux ressorts repris, réutilisés autant de fois que possible, aux loufoqueries attendues et sans drôlerie à force de pousser à la roue, d'un auteur qui ne cesse de nous expliquer combien il déteste/adore les contes, les Grimm, les mondes merveilleux de l'enfance, sa vie, le petit tailleur, l'armée, son fusil à plomb, etc. A force, on finit par ne plus bien savoir et le comble, c'est qu'on prend le parti de s'en ficher. Ainsi en est-il, en tout cas me concernant, pour les auteurs qui, sans doute trop doués du verbe, finissent par se regarder écrire comme d'autres s'écoutent parler. Je crains -mais sur un seul ouvrage, c'est tout de même une lourde accusation- qu'Eric Chevillard ne soit de ces écrivains-là. Dommage.

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Eric Chevillard a le don d'irriter de nombreux lecteurs. Ses romans dérangent. D'ailleurs sont-ils bien des romans? Ce Vaillant Petit Tailleur est-il un roman? Cette tentative de détournement d'un conte populaire, entrecoupée (que dis-je, interrompue!) constamment par les digressions d'un auteur aussi bavard que Diderot dans Jacques le Fataliste ou Sterne dans Tristam Shandy, ne peut pas être un roman!
Mais un écrivain du XXIe siècle doit-il encore écrire comme Balzac, comme Zola, comme Diderot, comme les frères Grimm? Un artiste doit-il peindre encore comme Raphaël, le Caravage ou Delacroix?
Eric Chevillard fait partie de ses auteurs qui écrivent avec une conscience aiguë de la langue, de l'histoire littéraire et de l'intelligence humaine. Pas sûr qu'il plaise à la majorité des grands lecteurs qui goûtent avant tout la non-littérature.
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Le Vaillant petit tailleur, nous dit l'histoire de la littérature, est le fruit, comme tant d'autres contes, des pérégrinations, au début du XIXème siècle, des frères Grimm, à travers la Hesse, la Saxe et la Thuringe, en quête de récits populaires. le narrateur, guère indulgent envers eux, les jugeant de trop serviles et naïfs scribes des élucubrations des veuves de Kassel, entend compléter, et pour tout dire parachever, ce conte qu'il considère un peu faiblard. Ainsi l'écrivain se donnant toute licence, remodèle l'histoire à sa guise, toujours sur le point d'y trouver une fin abrupte rendant caduque toutes les élucubrations subséquentes, usant et abusant des digressions, se complaisant en précisions dilatoires, sur sa propre existence d'écrivain, interpellant à plaisir le lecteur.

Les créations d'Éric Chevillard sont fort sympathiques, l'auteur ne semblant guère se prendre au sérieux, la littérature n'est pas une si grave affaire pour lui. Il est toujours prodigue en trouvailles, il déborde d'espiègleries formelles, pour composer des histoires drolatiques qui ne versent jamais dans la complète bouffonnerie et qui ont de réelles qualités littéraires.
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Conte visité, revisité, détails poussés à l'extrême, loin, bien loin parfois de la version originale, mais pour notre plus grand plaisir et toujours avec maestria.
Lecture agréable, je me suis beaucoup amusée et je me suis même prise au jeu d'extrapoler, j'ai musardé sur les traces d'autres héros des contes de mon enfance : et si...
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Commencé une première fois et vite abandonné, j'ai retenté le coup. Sachant à quoi m'attendre, je me suis davantage donnée au jeu. J'ai ri quelques fois. Mais c'est lassant à la longue, cette suite ininterrompue de digressions, et le mépris affiché à l'égard de son sujet.
Je dirais que c'est déjà vieilli, cette manière cynique et auto-centrée de faire de la littérature.
Certes, Éric Chevillard sait écrire, il le fait avec panache et brio. Et c'est plaisant.
Mais si c'est pour ne rien dire?
Bon, je ne lui laisse pas de chance parce que je l'abandonne en cours de route.
Peut-être parvient-il à ficeler un récit où tout prend sens?
Mais il n'est pas nécessairement obligatoire de tout bien ficeler.
On pourrait avoir une suite de digressions, mais qu'au moins il y ait quelque chose à prendre pour le lecteur!
Ici je ne peux qu'accompagner l'auteur d'un rire moqueur qui fait écho au sien ou l'admirer pour son habileté.
Ça m'ennuie à la longue.
Donc je repasse min tour...
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Si bien que notre fanfaron se trouve simultanément projeté dans les airs et à une altitude telle que nous voici tous autant que nous sommes privés de héros pour un bon bout de temps, que faire, que faire, je profiterai si vous voulez bien de son absence pour débattre d'un point qui me paraît capital : j'ai suivi pour raconter cette scène la leçon des frères Grimm, elle-même fondée, dois-je le rappeler, sur le récit chevrotant de Kassel.
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Ce nuage de poussière à l'horizon, c'est la cavalerie du vaillant petit tailleur. Cette forme sombre et imposante qui se découpe au loin sur le ciel, c'est le château. Il se rapprochent. Ils se rencontreront avant la nuit, ayant parcouru chacun la moitié du chemin.
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Le vaillant petit tailleur ne serait-il donc pour l'auteur de ces lignes qu'une figure de rhétorique, un élément juste un peu plus voyant et sautillant de sa syntaxe, l'agent grammatical chargé des tours nouveaux et des effets de poésie? Voilà comment il faudrait comprendre et chérir le marmouset? Et ne point s'émouvoir jamais que de sa culbute et de son rétablissement? Applaudir ses sauts périlleux, sa marche sur les braises, sa course en rond avec la queue du tigre entre les dents, la musique de la scie sur ses os et le prodige de sa résurrection, sa danse au-dessus de l'abîme sur le fil de son lacet dénoué, mais refuser d'y croire quand simplement il se mouche, quand il pleure, quand il demande l'heure, quand il est visité par un songe?
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Pour vous débarrasser d'un géant, donnez-lui un livre. Car il en va ainsi de tous les géants, et c'est pourquoi il est si rare d'en rencontrer un, ils lisent recroquevillés sur des livres aux formats trop petits pour eux et néanmoins capables de les absorber complètement, littéralement, ils disparaissent.
Je rappelle en passant que le souci de vraisemblance est une préoccupation de menteur.
Lorsque les géants émergent de leur lecture, on parle de tremblements de terre, d'éruptions volcaniques, d'avalanches, d'éclipses, leur grosse tête occultant le disque solaire, ce dont ils sont les premiers contrits puisque cette obscurité les empêche de lire.
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Le jour où le vaillant petit tailleur remplira de poissons rouges le bassin de son parc (économie d'eau : le poisson nage aussi bien dans le poisson), je m'assoirai avec lui sur le rebord de pierre et nous resterons là, apaisés enfin, parvenus au terme de notre errance, le vaste monde dans notre dos réduit à l'étroit chemin qui nous a menés là.
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Vidéo de Éric Chevillard
«Bêtes de littératures» avec Éric Chevillard Hérissons, orangs-outans, tortues, flamants roses, insectes… Les bêtes peuplent les livres d’Éric Chevillard. S’interrogent à cette occasion les enjeux de la présence d’animaux, et par là d’altérités non humaines, dans la littérature. Comment rendre compte, avec l’écriture, d’intensités animales au-delà de l’allégorie ou de la fable ? Donner vraiment la parole aux animaux, est-ce pour autant se couper du symbolique ? Et l’humour dans tout cela ? L’entretien sera ponctué d’une lecture d’extraits de «Zoologiques» (Fata Morgana, 2020). - Modération : Sandra de Vivies La Fondation Jan Michalski, le 11 septembre 2021
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