AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Madame (26)

Je dois à l'honnêteté de dire que Dieu, je ne suis pas sûre qu'Il existe. Peut-être oui. Peut-être non. Beaucoup sont morts pour cette idée ou l'idée qu'ils avaient de Lui. Moi, de Dieu, je peux me passer. En revanche, ce dont je ne peux me passer, c'est de tout ce qu'on a créé autour de Lui pour Lui faire part de notre existence : ces monuments, ces églises, ces textes si savants, ces costumes, ces musiques, ces chants, ces tableaux. Tout ce qui chaque jour nous occupe pour penser un peu moins à nous-mêmes. [...] Pour finir, mon garçon, je n’ai pas besoin de Dieu, j’ai besoin de religion. (p. 132)
Commenter  J’apprécie          150
Tout de suite elle n'a d'yeux que pour ses chaussures orange et noir. Le sport a besoin de couleurs vives pour faire croire à l'enthousiasme qu'il suscite.
Commenter  J’apprécie          140
Quand Guillaume plaque son corps à la paroi, la pierre est glacée. Il reste un moment sans bouger pour que les deux natures qui les composent, la minérale et l'animale, s'éprouvent l'une l'autre. Puis il se colle à elle, l'épouse comme s'il était une pâte à modeler, une limace.
Commenter  J’apprécie          120
Il marche lentement sur le chemin qui conduit chez lui, attendant que la route familière dont il connaît chaque arbre, chaque buisson, chaque pierre, le réintègre dans son être. Que ce soir est calme. Pas un souffle d'air. Il déteste le vent, le plus faible suffit à le troubler. Le ciel est tranquille. Le soleil a disparu ne laissant qu'une lueur qui s'attarde où se découpent les silhouettes sombres des grands chênes qui bordent les champs. Sa frayeur s'éloigne. Le pelage des vaches blanches est encore visible sur le noir des près. Elles sont immobiles, figées par l'ombre. La solitude est de bonne compagnie, il ralentit son pas, retarde le plus possible le moment où il va devoir pousser la porte de la cuisine familiale, affronter la lumière violente de l'ampoule qui éclaire la table, voir l'assiette qui l'attend, sa fourchette et son verre et ses parents qui le regardent en attendant de se servir la soupe qui fume dans la casserole en inox posée au centre de la toile cirée. Il voudrait ne jamais arriver.
Commenter  J’apprécie          100
Quand la fumée des Gauloises ne suffit pas à soulager le dégoût qu’elle a d’elle-même, à renouer avec sa grandeur méconnaissable sous ses oripeaux, elle s’accorde un peu de vin. Assez peu. Son organisme le tolère mal et l’entraîne vite dans un trouble mélancolique, sans qu’elle puisse le prévoir, et qu’elle doit corriger à l’aide d’autres verres jusqu’à tomber dans un sommeil pâteux.
Commenter  J’apprécie          90
- Nous serions plus tranquilles ici, dit-il. Alexandrine a beau être sourde, sa présence m’aurait gêné.
- Je ne la vois plus. Elle dort du matin au soir dans son fauteuil. Elle a du mal à monter dans sa chambre. Je vais être obligée de mettre un lit près de la cuisinière. Elle va mourir où elle a passé sa vie.
- Je me souviens des petits plats qu’elle confectionnait uniquement pour nous : ses œufs au lait, ses sablés.
Cette évocation les laisse rêveurs.
- Tu pourrais la mettre dans une maison de retraite, reprend-il.
Madame se révolte :
- Tu n’y penses pas ! L’arracher au château… elle n’a rien connu d’autre, ni mari, ni enfant, à part nous qui étions les siens plus que ceux de nos parents. Je préfèrerais la tuer.
Il sait que ce ne sont pas des mots en l’air, qu’elle pourrait lui envoyer une décharge de chevrotine dans le cœur plutôt que de la confier à des aides-soignantes indifférentes dans un hospice de vieillards.
Commenter  J’apprécie          90
« La nuit est profonde. Cette semaine la lune n'apparaît pas mais il connaît le chemin et il voit luire, là-bas, entre les ramures des taillis, la faible lumière d'une pièce éclairée. C'est une heure où le petit animal humain qu'il est découvre la liberté ; c'est la jeunesse qui arrive, qui ouvre sa conscience, qui lui permet d'aller à l'encontre de ce que l'on veut lui imposer, qui fait naître en lui le courage de dire non. La route est noire et invisible au début mais s'éclaire peu à peu au progrès de ses yeux. Il est un chat, un renard, un hibou, une bête nocturne capable de voir dans l'obscurité et les branches qui lui griffent le visage quand il s'écarte du chemin sont là pour le guider, le remettre sur la voie.
La petite lumière grandit. Il est maintenant dans la cour. Il avance à pas rapide. À pas d'homme. Mais devant la porte-fenêtre de la cuisine, celle où brillait la clarté d'une faible ampoule, il hésite un instant et, avant de frapper au carreau, il met ses mains en oeillères autour de ses yeux pour voir à l'intérieur de la pièce. Madame est là. Elle fait sa toilette. »
Commenter  J’apprécie          80
Madame n’a qu’une robe. Plutôt un seul modèle de robe car, avec le peu de soin qu’elle en prend, un seul vêtement tomberait vite en lambeaux. Elle les fait faire sur mesure chez une couturière à façon qui habite à quelques kilomètres et dont elle est l’unique cliente. La robe est longue, elle tombe jusqu’aux pieds, elle est toujours noire et porte, sur chaque cuisse, deux poches plaquées assez vastes pour y loger des fruits, des légumes, du petit bois pour allumer le feu, qu’elle glane au passage. Le haut est ajusté sur sa poitrine plate avec deux autres poches au niveau des seins qui achèvent de dissimuler leur faible renflement. Dans l’une elle met son paquet de Gauloises et un briquet, toujours bleu et jetable. Dans l’autre, un petit carnet de moleskine avec un œilleton où se glisse un crayon noir. Elle a aussi un couteau. Un laguiole à manche d’ivoire qui se ferme dans un claquement sec, qu’elle glisse dans une gaine cousue au niveau de la taille, comme le pommeau d’une épée. Une concession à une vague coquetterie serait peut-être le col Claudine qui enserre autour de son cou les membranes de deux fanons tremblants.
Commenter  J’apprécie          50
On ne se méfie pas assez des écrivains. Ils font croire à ceux qui ne le peuvent pas qu’ils pourraient être les personnages d’exception qu’ils mettent en scène.
Commenter  J’apprécie          50
« Il doit tenir ça de son grand-père Guillaume, le goût de la terre. Un goût physique. Il aime la toucher, marcher dessus, la sentir sous ses semelles, soit dure et sèche, soit molle et mouillée. Ce qu'il aime aussi, c'est la voir labourée, telle qu'il va la découvrir après le travail de son père, les sillons bien droits, repliés sur eux-mêmes comme une mer figée de vagues noires avec, à cette saison, les fines toiles que tissent les araignées pendant la nuit et que la rosée rend visible, le matin, comme des traces d'écume. C'est de la terre qu'il attend des réponses. Mais elle est bien silencieuse. Alors en cours de route, à un endroit où une bête l'a grattée, un blaireau, un sanglier, quelque museau fouisseur, il s'arrête et se couche sur elle. Il croit percevoir un grondement, un bruit venu du fond, le roulement de quelque chose qui passe, un charroi, le bruit de son sang qui court dans son corps, qui lui dit qu'il est lui. »
Commenter  J’apprécie          40






    Lecteurs (165) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Et s'il faut commencer par les coups de pied au cul

    Dans un film de Jim Jarmush, un tout jeune couple d'adolescents se demande : Y a-t-il encore des anarchistes à -------- à part nous ? Peu de chances. Où çà exactement ?

    Paterson
    Livingston
    Harrison
    New York

    10 questions
    23 lecteurs ont répondu
    Thèmes : anarchie , éducation , cinéma americain , histoireCréer un quiz sur ce livre

    {* *}