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Critique de BazaR


Je suis presque raccord là.
Alors qu'en France sort le dernier recueil de nouvelles de Ted Chiang, je termine son premier : La tour de Babylone.

Huit nouvelles dans l'ensemble assez longues où se déploie une méthode plutôt unique mais habillée de couleurs très variées.
Quand je dis méthode, c'est parce que je sens que le scientifique dirige l'auteur. J'ai toujours eu l'impression de voir se déployer la résolution d'un problème selon une méthodologie bien établie : on pose le problème, on amasse des données, on teste des hypothèses. Les personnages ont dans l'ensemble tous accès à la raison bien qu'ils puissent être névrosés (de la même façon qu'un tueur en série peut déployer une méthodologie d'action d'une logique sans faille et d'une grande complexité). C'est un peu comme si chaque nouvelle était une expérience de laboratoire confinée.

Mais quand j'ai dit ça, je n'ai rien dit. Cette méthode sous-jacente s'habille d'une variété de forme remarquable. Les sujets traités et les décors dans lesquels ils s'animent dévoilent une imagination débordante. Une cosmologie antique prend vie dans La tour de Babylone. Les affres d'une mathématicienne devenant cinglée face à sa découverte dans Division par zéro rappelle les psychoses des grands logiciens (voir Logicomix). L'animation de la matière par l'intermédiaire du nom devient une vraie technique industrielle de la fin du 19ème siècle dans 72 lettres. Et la mythologie biblique prend réalité avec nombre de dégâts collatéraux dans L'Enfer, quand Dieu n'est pas présent. Quant à la possibilité d'éliminer le concept de beauté des relations humaines, il prend la forme d'un documentaire à multiples témoignages façon Antoine Bello dans Aimer ce que l'on voit : un documentaire.
Je garde le plus connu pour la fin : qui a vu le superbe film Premier Contact, de Denis Villeneuve ? Eh bien il s'agit d'une adaptation de L'Histoire de ta vie.

Contrepartie de la beauté formelle de ces nouvelles, le langage employé utilisant largement les sciences est parfois opaque quand on ne possède pas de connaissances détaillées. Ted Chiang fait parfois des efforts de vulgarisation – dans L'Histoire de ta vie par exemple, et il y en a besoin tellement les concepts nécessitant un éclairage sont nombreux. Mais quand on capte, c'est du plaisir à l'état brut – et parfois pas du tout comme dans Comprends (mais dans cette nouvelle l'opacité participe de la démonstration que le narrateur a atteint un niveau intellectuel qui dépasse les simples humains). Je crains que cela ne laisse du monde sur le bord de la route.

A noter aussi que la fin du livre contient une explication par l'auteur de la genèse de chaque nouvelle, du pourquoi il a eu envie de l'écrire. Un plus très apprécié.

Mais personnellement j'ai beaucoup aimé. A petite dose cependant. Je ne me sens pas de me lancer dès aujourd'hui dans son recueil récent.
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