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3,55

sur 192 notes
C'est un roman coup de poing! On en ressort assommé, et il faut un peu de temps pour s'en remettre.
Il faut dire que ce que l'auteur nous confie au cours de ces pages est loin d'être anodin. Certes même si, pour citer Tolstoï,

"Toutes les familles heureuses le sont de la même manière, les familles malheureuses le sont chacune à leur façon."

Le malheur au malheur ressemble et se fonde le plus souvent sur le fonctionnement complexe voire pathologique de ces groupes inventés par la civilisation que sont les familles. Traumatisme de l'enfance, fondé sur des malentendus ou des trop bien entendus, lestés par la maladie, l'hérédité et les flèches du hasard?. Dans ce roman, tout y est, avec comme couvercle de plomb la maladie mentale qui frappe inexorablement les femmes générations après génération. le miroir est monstrueux, superposant à l'infini les portraits féminins.

Mais ce n'est pas là que se situe la prouesse.

Elle est dans l'écriture, riche, juxtaposant les procédés, des lettres, avec leurs révélations violentes, des dialogues , bien ancrés dans le réel, des fragments de conférence, dont le contenu collapsologique crée une mise à distance drastique de tout ce qui constitue la trame du roman, à savoir les blessures individuelles,.

Elle est aussi dans la façon dont est retranscrit le tourbillon des idées et des réflexions qui vont de l'intime à l'universel. Et le lecteur est emporté dans ce maelström vertigineux, qui met en abyme les tourments individuels. Ce qui pourrait être nombrilisme devient partie du tout.

Et le plus étonnant c'est que ce récit n'est pas sombre, il offre une lueur d'espoir, par la voix de la femme qui ose jeter un sort à la malédiction, en l'attaquant avec ses propres armes puisqu'elle devient psychanalyste. Sans oublier que le dernier chapitre est intitulé une fin heureuse.

Lecture forte et marquante.
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🌪Turbulences psychogénéalogiques, historiques, sentimentales et climatologiques.

L'écriture de Sarah Chiche, percutante, flamboyante, nerveuse, excessive et hypnotique laisse à bout de souffle et entraîne des pauses respiratoires.
La narratrice, psychanalyste et journaliste, vivant avec l'homme qu'elle aime, père de sa fille, est irrésistiblement attirée par un violoncelliste de renom, plus âgé, rencontré lors d'un séjour professionnel à Vienne. Attraction partagée.
Impossible de lutter, il envahit son coeur, son corps, sa psyché. La dépendance à l'autre s'installe. le don de soi atteint des extrêmes.
Ils s'aimeront passionnément en parallèle de leurs histoires conjugales respectives de Vienne à Paris.
Engluée dans cette relation adultère, ce double amour va durer et la consumer, elle se morcelle peu à peu.
Mais le roman ne se résume pas à cette passion amoureuse, il est bien plus riche.
L'auteure part enquêter en Autriche sur l'Aktion T4 et son programme d'extermination d'enfants dans les décombres de l'hôpital psychiatrique Otto Wagner.
La Grande Histoire, de la Shoah à la crise politique ivoirienne, va alors se mêler à la sienne. Folie de l'humanité et folies plus intimes entrent en résonance car resurgit sa lourde histoire familiale avec des figures maternelles bancales, frappées de maladie mentale et des profils d'hommes destructeurs (son grand père notamment, ancien déporté).
Elle souffre du mal de mère et du manque de père, décédé alors qu'elle était très jeune.
On discerne aussi la peur de la transmission transgénérationnelle de la folie, sorte d'inconscient familial dont on hériterait et dont l'exploration mènerait à la connaissance de soi et serait un moyen de lutte contre cet atavisme.

Le tout sur fond de dérèglement climatique paroxysmique conséquence des activités humaines semant le chaos dans un monde à l'agonie avec des descriptions ahurissantes de ses effets.
A signaler quelques scènes de sexe trash qui peuvent déranger mais ajoutent assurément de l'intensité à ce récit tourbillonnant et incandescent proche de la transe qui nous emporte de bout en bout dans un vortex d'images et de mots directs et ardents.

Magnétique.



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Pour parler des Enténébrés il faudrait y voir un peu clair.

Ça commence mal, cette critique, mais je n'y peux rien: le livre tout entier se perd dans les ténèbres du mal, il  commence mal, finit mal, s'ouvre sur des abysses de mal.

Trop c'est trop. Pour reprendre un apophtegme qui m' a valu les foudres divines,   il y a peu:  tout ce qui est excessif est insignifiant.

Difficile de trouver la sortie du labyrinthe, d'exhumer le message d'un  chaos de feu, de cendres et de sang.

 Or, tout dans les Enténébrés est excessif: la passion amoureuse, le délire des sens, la généalogie -compliquée à loisir dans un récit volontairement désordonné- d'une tare mentale portée comme une malédiction familiale, les plongeons dans le passé -la solution finale testée et validée sur les malades mentaux-  les ouvertures vers le futur -l'apocalypse écologique consécutive à la crise climatique en action-,   les irruptions de l'actualité -terrorisme , guerres et génocides, comme s'il en pleuvait.
 
J'ai bien une petite explication à tant de noirceur et à ce maelstrom de ténèbres.. .mais vous me direz que j'ai mauvais esprit: la culpabilité de la narratrice. 

Elle qui a réussi un miracle de résilience , échappant à la fatalité qui a poussé toutes les femmes de sa famille dans la maladie mentale, en retournant à Sainte-Anne, mais du côté des thérapeutes,  dont elle est, on l'a compris, une des plus brillantes représentantes, elle qui a résisté à la mort prématurée d'un père qu'elle n'a pour ainsi dire pas connu, qui a su dépasser et pardonner les mauvais traitements d'une mère toxique, en épousant un homme équilibré,  aimant, la tête sur les épaules, qui l'a faite mère d'une fille adorée,  élevée avec amour, voilà t'y pas que cette femme exceptionnelle, belle, intelligente, lucide, courageuse, aimante - n'en jetez plus!-   rencontre un musicien ( elle qui ne comprend rien à la musique), qui a l'âge d'être son père -tiens, tiens, tiens...- et qu'elle en tombe éperdument amoureuse.

Au point de tout f..en l'air, et pas seulement sa paire de gambettes avec celles de son partenaire.

A part ce qu'il lui fait au lit, on ne voit pas bien comment ce papy autrichien peut déclencher un tel cataclysme auprès d'une héroïne si belle, si intelligente...mais je crois que je me répète.. .

Car cette autofiction, pour être romanesque, a le son du vrai: Sarah Chiche vit , a vécu,  sûrement, une passion adultère destructrice pour tout son entourage.

Acte manqué ou maladresse, elle met, effectivement, toute sa vie en l'air.

Alors, rien de plus efficace qu'un bon cataclysme universel pour noyer son impuissance à choisir, à épargner ses hommes, sa fille. À peine suffisant pour venir à bout d'un ego aussi surdimensionné.

Non? J'exagère? Ah bon...

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Le puzzle reconstitué

Dans son nouveau roman Sarah Chiche explore les failles de l'intime et celles du monde. Une plongée vertigineuse de l'écologie terrestre à l'écologie psychique qui se lit comme l'assemblage d'un puzzle. Fascinant!

Au moment d'écrire «quel extraordinaire roman», je me prends à douter. Peut-on vraiment parler de roman? S'agit-il plus précisément d'autofiction? Mais dans ce cas alors Sarah Chiche ne nous cacherait rien de sa vie la plus intime… À moins que finalement la romancière ne vienne prendre le pas sur la biographe pour transcender le réel, l'enrichir, le nourrir de fantasmes, de lectures. C'est cette variante que je crois la plus proche de la vérité, notamment après avoir entendu Sarah Chiche parler de ce roman lors d'une rencontre en librairie.
Sarah mène une vie de famille assez ordinaire, entourée d'un mari qu'elle aime et d'une petite fille adorable. Elle travaille comme psy dans dans un hôpital et aime se plonger dans les livres et écrire. Elle se passionne notamment pour l'oeuvre de Fernando Pessoa. Seulement voilà, ce bel équilibre va soudain être remis en question par les soubresauts de l'Histoire. Quand l'intranquillité, pour reprendre un terme cher à Pessoa, vient bousculer «l'écologie terrestre et l'écologie psychique».
Le choc a lieu en Autriche le 28 septembre 2015: «La gare centrale de Vienne, où je me trouvais cette nuit-là, cette gare n'était plus une gare. C'était le ventre débondé, crevé, excrémentiel de la route des Balkans, recrachant sans cesse, sur ces quais balayés par le vent, des milliers de gens qui descendaient des trains et titubaient hagards, tels des automates, leurs enfants dans les bras, sous les applaudissements des Viennois venus les accueillir, leur porter à manger dans des cantines de métal, ou des plats enveloppés dans du papier d'aluminium, leur distribuer des vêtements, des brosses à dents et des couvertures. Leur bonté, comme l'éclaircie dans l'orage, comme un souffle frais et paradoxal dans le brasier qui s'écroule sur lui- même, ne dura qu'un temps.»
Dans la construction de son roman, Sarah Chiche a choisi de nous livrer les pièces d'un puzzle qui, au fil du récit, vont s'assembler pour nous donner une vision d'ensemble, mais aussi pour démontrer combien une vie s'imbrique dans celle des autres, au fil des rencontres et au fil des événements, des émotions qu'ils suscitent, des failles qu'ils mettent à jour ou, au contraire, qu'ils cicatrisent. Une manière aussi de reprendre la théorie du chaos chère à Edward Lorenz et son effet papillon. Et de l'illustrer. Car si en 2010 le climat de la planète n'avait pas commencé à se dérégler, Sarah ne se serait pas retrouvée dans une chambre d'hôtel à tromper son mari avec Richard, un célèbre violoncelliste. La voici prise au piège, la voici affublée d'une part d'ombre, la voici «enténébrée» à son tour. La romancière a eu jolie formule pour résumer cette liaison: «Sarah et Richard, c'est la rencontre de deux fantômes et de deux fantasmes».
Car ce roman-gigogne nous l'indique dès son titre: tous les personnages que nous allons croiser ici sont des enténébrés qui mènent une double-vie, qui derrière leur façade respectable, ont leur part d'ombre, de souffrance, quand ce ne sont pas des pulsions plus morbides. On voit alors les réfugiés d'aujourd'hui se télescoper avec les déportés d'hier, l'Histoire broyer les destins individuels et laisser des marques indélébiles de génération en génération. Oui les fantômes sont bien présents. Ceux qui viennent hanter la mère de Sarah qui a perdu son mari trop jeune et n'a jamais pu se guérir de cette perte, ceux de ces centaines de victimes ayant servi à des expériences menées par les nazis et qui ont fini dans les sous-sols d'un hôpital, ceux imaginés par Elfriede Jelinek et Robert Musil
Sarah Chiche réussit un roman d'une rare densité. À la manière d'une équilibriste sur une corde raide, elle nous fait partager la peur, nous laisse imaginer que le prochain pas pourrait être fatal. La tension est extrême, mais la «fin heureuse» reste aussi une option.


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L'écriture de Sarah Chiche est fascinante et hypnotisante, je l'avais déjà vivement ressentie à la lecture de : Saturne.
Écouter et voir Sarah Chiche est captivant , les mots qu'elle laisse tomber nous médusent et nous interpellent, ils font mouche.
La lire est cet indispensable complément, on entend sa voix percer les fantômes de la folie, de l'amour triomphant quoi qu'il en coûte.
Les enténébrés nous renvoient à tous ces êtres qui vivent dans l'ombre , dans l'indignité, c'est le cas pour tous ces exilés, ces migrants qui ont fui leur pays pour des raisons diverses et qu'ils les font devenir des sous-hommes loin de leurs racines
Les enténébrés, ce sont aussi les victimes de l'HISTOIRE, que d'émotions et de tristesse en découvrant le sort d'enfants et d'adultes malades mentaux dont le sort a été scellé dans l'asile "Steinhof" en Autriche, tout près de Vienne. Ils serviront de cobayes pour toutes sortes d'expériences scientifiques pendant la seconde guerre mondiale.
Les enténébrés, ce sont aussi des femmes, des enfants qui subissent une malédiction familiale : la folie ou bipolarité de leurs mères les meurtrissant dans leur vie entière.
Sarah Chiche connait bien cet univers-là, elle y a échappé de peu et survit grâce à la psychanalyse qui l'a aidé et aujourd'hui, elle s'en sert pour aider les autres à aller mieux.
Les enténébrés, c'est aussi l'histoire de l'amour, une femme : Sarah aime deux hommes, son compagnon avec qui elle a eu une petite fille et un vieux violoncelliste autrichien qu'elle rencontre par hasard à Vienne . Leur relation amoureuse lui permet de se confronter aux fantômes de sa famille, de son enfance.
" Nous avons beau nous mettre en route vers le monde, sur le chemin de la vie, arrive toujours un moment, une station de notre voyage, où nous sommes ramenés à cette question : mais de quoi sommes -nous la faute ? "
Pour toutes ces raisons , ces absences de réponses, je vous recommande inconditionnellement la lecture des enténébrés.
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Au coeur des ténèbres.
Sarah, la quarantaine, psychologue parisienne, en couple et mère d'une fillette, rencontre Richard K., sexagénaire, violoncelliste autrichien renommé, époux, père et grand-père, dans un musée de Vienne. C'est le début d'une liaison passionnée, de celles dont on ne sort pas indemne, surtout si l'on trimballe déjà un lourd héritage.

Certes, il s'agit d'une énième histoire d'adultère, mais celle-ci se distingue des autres par son cadre : le microcosme intello-psychanalytique, où les personnages analysent et s'auto-analysent en permanence, et se croient à l'abri (ou au-dessus) des affres de l'amour et du désir. le récit est très dense, très intériorisé -très "français", dans le genre rohmérien (pour donner une image cinématographique).
Mais l'ensemble n'est jamais ennuyeux, car l'auteur inscrit son histoire sous le signe du mal, en faisant s'entrecroiser nombre de tares de notre monde : crises climatique et migratoire, déportation et expériences nazies, folie héréditaire, colonies d'Afrique et exploitation sexuelle, inceste et maltraitance, etc.

C'est donc dur et très sombre, mais étrangement prenant. L'écriture clinique et maîtrisée de Sarah Chiche, et la sincérité de son personnage principal, sont hypnotisantes. J'ai été fascinée par les immersions éthérées dans le passé, entre cauchemar et réalité, et je garderai longtemps en mémoire certaines scènes et images, tant la puissance d'évocation de l'auteur est violente.
J'ai beaucoup aimé ce roman sans concessions, ce portrait peu amène d'une femme qui n'hésite pas à rogner jusqu'à l'os l'histoire familiale et la sienne pour toucher la vérité. J'ignore s'il s'agit d'une autobiographie, d'une autofiction ou d'une pure fiction, mais le résultat est saisissant, dérangeant, asphyxiant. Et tellement humain.
Forcément, on en sort un peu cabossé.
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Dans Les enténébrés, l'écrivaine et psychologue Sarah Chiche nous entraîne dans les méandres d'un chemin tortueux et torturé.
Est-ce un roman ? Est-ce une autobiographie ? Est-ce un puzzle ? La narratrice s'appelle justement Sarah et elle est psychologue.
Parfois le chemin le plus court d'un point à un autre n'est pas toujours une droite.
C'est une exploration à la fois dans nos intériorités et dans les enjeux collectifs que nous offrent les blessures du monde : deux contrées abyssales...
Tout paraît dissolu au premier abord lorsqu'on accoste au bord de cet étrange territoire qui ressemble plus à des sables mouvants qu'à un livre.
J'ai peut-être l'âme d'un explorateur, bien qu'aimant aussi la tranquillité des forêts et des jardins un peu en friche. Ici le texte est violent, impudique, déstabilisant, déroutant, sauvage, il y a dans la violence parfois une rage étonnante. Parfois on voudrait tout de suite y trouver des réponses.
C'est notre erreur. Vouloir tout expliquer, tout comprendre aussi, ce qui n'est pas tout à fait la même chose. Mieux vaut l'errance à l'erreur...
J'ai trouvé le récit de Sarah Chiche d'une écriture magnifique et cela m'a aidé à poursuivre mon cheminement dans cette lecture parfois ardue. Il y a une infinie poésie dans cette écriture, autant dans les joies ivres que dans les déchirures douloureuses.
Je suis incapable de tenter, non pas un résumé, mais un semblant de démarrage de récit, tenter au moins une introduction, tant il y a d'histoires dans ce récit. Il y a même ici la grande Histoire.
Je pourrais vous dire que c'est l'histoire d'une psychologue, Sarah, vivant à Paris avec Paul, ils ont un enfant, une fille et Sarah rencontre à Vienne un musicien célèbre, Richard, plus âgé qu'elle, ils vont vivre une passion dévorante, mais Sarah ne veut pas quitter Paul, veut les aimer tous les deux.
Je pourrais vous dire que les femmes de la famille de Sarah, sa mère, sa grand-mère, elle-même, vivent des troubles mentaux qui viennent questionner des sujets tels que la filiation, la génétique, l'héritage, l'environnement, l'histoire des familles.
Je pourrais vous dire que Sarah est attentive aux malheurs du monde que nous vivons plus que jamais autour de nous, le réchauffement climatique, le terrorisme, la crise des réfugiés...
Je pourrais vous dire que ce texte plonge aussi dans les affres de la grande Histoire, les camps de concentrations et le difficile retour des prisonniers, comment ils sont revenus à la vie, à la vraie vie si on peut dire les choses ainsi... Ou peut-être certains même vivants sont revenus à ce semblant de vie, comme le grand-père de Sarah...
J'ai eu le sentiment que ce texte me résistait à chaque instant, me séduisait en même temps à l'instant d'après, me parlait, me faisait peur aussi à l'instant suivant, et pour toutes ces raisons j'avais envie de continuer sa lecture, de trébucher, de me relever, d'aller jusqu'au bout du chemin, voir jusqu'au bout où tous ces mots voulaient m'entraîner. Pas seulement que des mots d'ailleurs, ce serait trop facile de réduire cela à une poignée de mots...
Ce texte parle de la famille, de nos héritages, des blessures enfantines... Forcément, ce texte remue. Il suffit parfois d'appuyer sur la touche « famille » pour déclencher des séismes...
Ce récit est un puzzle où il faut rassembler des fragments dispersés d'un itinéraire, peut-être aussi celui de nos vies. Ce qui nous fait mal peut-être dans cette lecture, une sorte de chemin avec des pierres où l'on marcherait pieds-nus, ce sont ici nos propres représentations qui sont interrogées aussi, les thèmes que ce récit cruel nous renvoie...
Parce qu'un moment, brusquement, tous les éléments du puzzle sont assemblés et il faut saisir la vie avec cela, avec cet ouragan, ce séisme, ce vide sidéral...
Même l'amour ici est violent. Même l'amour ici est violent physiquement. C'est la manière de Sarah, la narratrice de nous dire sa manière d'aimer deux hommes à la fois. Ce n'est pas le fait d'aimer deux hommes qui est violent, c'est l'amour physique au sens sexuel, sa manière de dire l'amour. La narratrice ne nous cache rien de sa sexualité, tant avec lui qu'avec l'autre... Cela est un morceau du puzzle, séparé du reste, pourrait paraître très impudique, et même pire, mais ramené à l'ensemble trouve son harmonie.
En définitive, peut-être une question vous taraude : ai-je aimé ou pas ce roman ? Je préfère vous répondre : avec un tel texte, je ne sais pas vous répondre à une telle question. Par contre il m'a touché. Et j'ai envie de vous entraîner vers sa lecture, même si elle est ardue... Comme un chemin épineux qu'on découvre enfin...
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Vers la lumière ! « les enténébrés ». « Ce mot existe ? » m'a demandé le libraire lorsque qu'il a posé ce livre sur le comptoir… « Oui, il existe, il est devant vous ». Lui ai-je répondu. Simplement. Ils existent. Les enténébrés existent. Enténébrés, enterrés, noyés, recouverts, ensevelis, .. oubliés par des vies, des silences, par le vide. Les enténébrés existent. Nous existons. Lumière comme connaissance, connaître, bien mieux que renaître...naître. N'être que Lumière comme Amour.
Il peut être du mal de vivre mais jamais ne peut exister le mal d'aimer.
Sa douleur oui mais pas le mal.
Composer avec ses seules images est impossible. Nos images sont faites de la clarté et de l'obscurité de toutes les images « phantômes » qui nous donnent forme, qui nous font signes, qui nous donnent gestes. Nous donnent-elles pour autant...réalité ? Nous donnent elles les clés pour rejoindre la réalité ?
Superpositions de blessures, de doutes, de peurs , de joies, images de beauté, images de regards, de corps, de nuit intenses, images de gestes, images de souffles, d'abandon, de fuites. J'aime ce livre. Ce mille feuilles de vies. Il faut traverser les ténèbres pour atteindre la rive des clartés. Passer les rouleaux, plonger, au risque de ne jamais pouvoir remonter. Je suis revenue. Tu vois je suis revenue.. Oui images phantômes.. Les enténébrés existent, ils sortent du noir. Par la musique, les sons, par le cinéma, par les livres, par mille souvenirs, par photographies, par dessous nos paupières, ils sortent de la noirceur de nos mémoires, par chacun de nos pores. Ils marchent , hantent. Les rejoindre c'est un risque. Une chance. Un choix aussi. Mais avons-nous vraiment le choix ? Morale ou éthique, entrechoquements des espaces où nous nous accordons entre toutes nos vies.
Des images me sont revenues à cette lecture, où ai-je rejoint certaines images ? En ai-je fait le choix ?
On choisit un livre. Pourquoi celui là et pas un autre ? Pourquoi aime-t-on , pourquoi celui-ci, ou celle -là, pourquoi maintenant, pourquoi à cet instant si obscur, si désarmant ?
Oui j ai retrouvé des images que je croyais être miennes. Empreintes digitales de ma mémoire.
Lire quelles sont siennes et qu'elles se rejoignent toutes, pour réaliser qu'elles sont nôtres.
Ce livre ne fait pas juste entrer un petit rayon de lumière artificielle. Non, il met en lumière, d'une lumière naturelle. Nue, crue, et pour celles et ceux aux larges paupières, une lumière pure.
On ne peut comprendre le désordre du monde, le désastre annoncé du monde sans se connaître soi même. Savoir la part de mémoire qui réside dans la part des ténèbres qui s'annoncent, qui nous annoncent.
L'espoir que nous portons au monde doit être contenu en nous mêmes. Mais pour cela il faut faire face, dialoguer avec nos phantômes.
Images qui m'ont traversée.., traversées d'images... La jeune fille morte à Nevers de Duras, «  je n'ai rien vu à Vienne « ... Jacques Austerlitz et son diorama, les mots et la pensée de Didi-Huberman.
Association d'images et de pensées, de colères, d'intelligences. Je porte une mémoire qui ne m'appartient pas... Comme l'enfant que l'on porte, à qui nous donnons vie. Et qui transportera, fera vivre et survivra . Ce livre porte l'espoir d'un renouveau. La souvenance de nos survies. Pour peu qu'on veuille bien traverser les miroirs de notre mémoire, pour peu qu'on ait la force d'entendre de voir de penser et de comprendre ce qu'ils contiennent.
J'aime les livres, aucun ne sont miens, mais je les porte tous. Et ce livre je le porterai toujours.
La lecture est un bonheur, ou plus exactement comme Sarah le transmet à sa fille, c'est le moment où tu t'aperçois que tu sais lire qui est merveilleux. le bonheur né de la prise de connaissance d'un savoir. Avant, avant la lecture c'était la nuit, et puis le jour se lève sur les mots et le bonheur d'être grandit. Sur l'esquisse sublime d'autres bonheurs sourit tous les visages d'un avenir possible .
La lecture et l'écriture ont cette même capacité. Elles nous font sortir des ténèbres, en détruisant les ténèbres qui sont en nous.

Nous appartenons au désastre du monde et le désastre du monde nous appartient, ou plus exactement , nous revient. Nous sommes liés.
Ce que nous appelons désastre peut devenir chance, renouveau. Ce que nous appelons aujourd'hui bonheur peut être demain le géniteur de la fin de notre temps.
C'est l'ignorance de ce que nous vivons , dans le présent, qui condamne, seule la connaissance d'un tout pourra faire naissance. C'est un peu faire langage de résilience.
Mais comment survivre sans espoir, sans le goût de la lumière qui est toujours en nous ?
Je ne peux que vous conseiller d'aller à la rencontre du dernier né de Sarah Chiche.
Si je peux émettre un souhait, c'est que nous prenions tous conscience que notre possibilité d'aimer chassera la volonté d'ignorer.
Merci à Sarah Chiche pour cette bouleversante histoire d'humanité.
Merci, pour ce voyage à travers la nuit de tous nos temps.
Vers l'infini , à la Vie, et à la demeure de l'Amour !
« « … il crée de toutes pièces, à contre –courant du monde et de sa cruauté, une situation dans laquelle un enfant existe, fût-il déjà mort. Pour que nous-mêmes sortions du noir de cette atroce histoire, de ce “ trou noir ” de l'histoire. » Georges Didi-Huberman , lettre à László Nemes réalisateur du film, le Fils de Saul, extrait.

« S'il n'est de dieux sur terre,
Nous serons Dieu nous-mêmes ». Wilhem Müller, le voyage d'hiver.

Astrid Shriqui Garain








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J'ai beaucoup de mal, même après un temps de latence, à faire une critique de ce roman que j'ai pourtant adoré. Il est tellement intense ! C'est un texte dense, d'une grande passion, qui aborde de nombreux thèmes : la musique (Richard est violoncelliste), la maladie (mentale notamment), la psychologie (Sarah est psychanalyste), la transmission (3 générations de mère sont mises en exergue) et la résilience (comment se construire après une histoire personnelle difficile ou suite aux méfaits de la guerre ?). C'est aussi (et surtout) le récit d'une passion amoureuse entre deux protagonistes mariés , avec toute la violence que cela induit dans un couple, une famille, reflet d'un monde moderne décrit ici par l’auteure à travers ses catastrophes. Passionnant !
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Les quatre premières pages posent un constat terrible : l'impact négatif des hommes sur le climat via une pollution dont ils semblent avoir bien du mal à limiter l'expansion produit un effet domino absolument terrifiant : récoltes insuffisantes, famines, révoltes, guerres, déplacement de populations, montée des nationalismes. L'enfer. L'époque que nous vivons n'a rien de réjouissant, d'autant qu'on ne perçoit aucune petite lumière à l'horizon permettant d'imaginer un avenir meilleur dans un délai raisonnable.
Une première question se pose alors : que faire ? Continuer d'y croire, de croire en la vie, de donner la vie ou bien renoncer ? Vivre au mieux ou bien considérer toute chose comme vaine, absurde ?
Second point et, j'allais dire, autre problématique apparemment : hérite-t-on de la folie de nos parents ? Sommes-nous libres d'être autrement, différents, ou bien, prisonniers d'une espèce de cercle infernal nommé hérédité, sommes-nous condamnés à reproduire ce qu'ils ont été sans autre forme d'échappatoire possible ?
Enfin, et l'on abordera ici le dernier volet de cette ambitieuse réflexion : imaginez que la passion amoureuse embrase votre pauvre être et que vous sentiez que cette flamme va mettre à mal, voire réduire à néant votre famille et vous-même, résisteriez-vous à l'irrésistible ? Autrement dit, comment expliquer l'emprise qu'exerce une passion amoureuse au point que l'on s'y jette la tête la première comme l'on se jetterait dans le vide ?
Prenez ces trois points, entrelacez-les, tissez-les serrés et vous obtiendrez le dernier roman de Sarah Chiche : un texte dense, saturé parfois, intense, puissant, sombre, torturé et beau, oui très beau. Certaines scènes d'une force terrible me resteront à jamais. Je ressors de cette lecture dans un drôle d'état comme on dit, et j'ai l'impression d'être passée par tous les sentiments : la fascination, la colère, la tristesse, l'épuisement, l'accablement, l'admiration, la curiosité, l'irritation… C'est peu dire que ce roman m'a touchée et qu'il reste indiscutablement un des grands de cette rentrée littéraire.
Que je vous présente un peu les personnages : Sarah, psychologue et journaliste, vit à Paris avec son mari Paul, un intellectuel persuadé que la fin des temps est proche, et sa fille. Lors d'un déplacement à Vienne où elle doit rencontrer des réfugiés afin d'écrire un article sur la façon dont ils sont accueillis, elle croise Richard K., un violoncelliste célèbre, marié et plus âgé qu'elle dont elle va tomber follement amoureuse au risque de perdre tout ce qu'elle a construit, ce dont elle a pleinement conscience : « La pensée me traverse de me défenestrer tout de suite pour nous épargner d'avoir à vivre la joie dévastatrice des années qui viendront. »
« J'ai pensé qu'il fallait le faire. Me laisser traverser de part en part par cet amour. Nous sommes dévastés. Dévastés de joie. Dévastés que chacun de nos gestes, chacun de nos mots confirme en tout point la façon dont nous nous étions rêvés l'un l'autre. Dévastés que les limites de nos corps nous empêchent de pénétrer plus profondément l'un dans l'autre. »
La passions amoureuse vécue par Sarah est parfaitement décrite à travers la folie des corps et des âmes, le don complet de soi, la soumission totale, l'abandon à l'autre mais aussi les arrangements avec le réel et son lot de petites misères : les mensonges, l'absence, la double vie, la peur d'être découverte - toute l'énergie que cela suppose - et donc la grande fatigue qui en découle, forcément.
Il faut savoir aussi que Sarah vit avec un passé pesant qui semble parfois l'empêcher d'avancer : son arrière-grand-mère  (Cécile), sa grand-mère (Lyne) et sa mère (Ève) ont toutes les trois souffert de troubles psychologiques importants dont Sarah craint d'être aussi la victime. Enfant, ayant perdu très jeune son père d'une leucémie foudroyante, elle s'est retrouvée avec une mère instable et mythomane, « héroïne de sa propre fiction », qui la battait et l'humiliait, une mère qui lui a dit, par exemple, alors qu'elle était encore très jeune : « Si tu n'avais pas été normale, Sarah, on t'aurait étouffée sous l'oreiller à ta naissance. Ton père me l'avait promis. On avait tout prévu, au cas où. » Terribles paroles traumatisantes s'il en est…
Afin de faire cesser ce qu'elle nomme « la malédiction familiale », expression qui revient de manière obsessionnelle dans ce texte, la narratrice va, plus ou moins inconsciemment, en rechercher l'origine : « Plus tard, j'ai compris que ce que ma mère m'avait fait, son père le lui avait fait, et que ce que son père lui avait fait, on le lui avait fait à lui dans les camps. »
En effet, après la Libération, Pierre B., son grand-père, déporté à Buchenwald comme prisonnier politique, a quitté sa femme, ainsi que sa propre fille, la mère de Sarah, et a fui en Côte d'Ivoire où il est devenu photographe. Il reverra tout de même sa fille mais il l'obligera à faire l'impensable. « Il a creusé des trous pour y jeter les cadavres de ses camarades. Il a survécu à deux camps de concentration et aux Marches de la mort à la libération des camps. Après la guerre, on lui a refilé une femme folle. Il a payé. Il a déjà payé. Il est parti enterrer sa honte dans les colonies où il a mené la vie banale d'un pauvre type, comme beaucoup de pauvres types qui vivaient dans les colonies. » Oui, ce grand-père, qui a vécu le pire dans les camps, fit le mal, à son tour, en Afrique. En est-il responsable ? N'est-il pas devenu ce que L Histoire en a fait ? A-t-il eu la liberté d'être autrement ? Aurait-il pu être autrement ?
Ne sommes-nous pas la somme de choses qui nous dépassent, que nous ne connaissons peut-être même pas, dont personne ne nous a jamais parlé, d'une histoire familiale qui est la nôtre et dont nous héritons sans toujours bien comprendre la personnalité profonde des principaux protagonistes, quelle a été la cause de leurs actes... A quoi rêvaient-ils, ces aïeux souvent inconnus dont nous sommes les dépositaires, ces étrangers qui sont en nous et avec lesquels nous devons nous arranger, chaque jour ? Que faire de ce qu'ils nous ont laissé, de ce qu'ils nous ont transmis ? Comment supporter parfois leurs actes insupportables ? Comment ne pas être hanté par leurs crimes ?
Tant bien que mal, il nous faut avancer en portant le poids de nos origines, de l'Histoire qui nous a faits et qui a fait ceux dont nous venons. Et ce passé est tellement encombrant que l'on risque à chaque instant de se prendre les pieds dedans. Avons-nous la possibilité de nous en libérer ? Existe-t-il une faille, un interstice,une légère fissure qui nous offrirait la possibilité d'être sans eux ?
« Je ne pleure pas sur moi, explique Sarah à Richard, je pleure parce que, malgré nos gestes, nos décisions, et alors même que nous croyons faire entendre notre voix, nous ne sommes que des pantins ventriloques par ce qui nous dépasse. Nous avons beau nous mettre en route vers le monde, sur le chemin de la vie, arrive toujours un moment, une station de notre voyage, où nous sommes ramenés à cette question : mais de quoi sommes-nous la faute ? »
Certaines scènes de ce roman sont absolument magistrales dans leur construction, le point de vue adopté ou l'écriture qui exprime toute la tension que ressent Sarah : celle par exemple qui décrit Sarah visitant l'hôpital psychiatrique de Steinhof à Vienne, où, dans le pavillon appelé le Spiegelgrund, les nazis avaient procédé à des expérimentations sur de jeunes enfants handicapés mentaux dont les cerveaux ont été conservés dans du formol… Je repense aussi à la scène du dîner chez les Popesco, dans leur maison de vacances, alors que le risotto à la fleur de courgette et à la truffe n'arrive pas... (Je reste volontairement allusive...)
Parfois le « je » de Sarah cède le pas à un « elle », ce qui permet à la romancière de montrer un personnage fantomatique en train de se dédoubler : « survient toujours un moment où je regarde tout cela depuis un lieu où tout est calciné et où je suis déjà morte » ; Sarah vit et s'analyse vivre, avance et se regarde avancer (il n'y a rien de pire pour se casser la figure d'ailleurs, mais peut-elle faire autrement ?) ; parfois la romancière superpose sur une même page, dans une même phrase, des événements qui ont des temporalités différentes, mêlant un élément du passé à l'instant présent vécu par son personnage. Ce télescopage des différentes temporalités mime tout ce qui se joue dans l'esprit du personnage au moment où il vit un moment fort de son existence.
Il faut peut-être préciser aussi que si Les enténébrés nous présente des époques, des lieux, des gens très différents, ce roman offre aussi une quantité importante de formes littéraires telles que le journal, la lettre, la pensée, la scène, le récit et j'allais dire aussi des écritures différentes, bien évidemment adaptées au propos, ce qui m'a semblé un sacré tour de force !
L'écriture précise (chaque geste est décrit, observé), parfois ardente, souvent abondante et pleine d'urgence donne l'impression par moments d'un trop plein qui ne demande qu'à sortir, à se déverser, à se révéler. Sarah Chiche dit sans détour, sans fard, sans pudeur, l'indicible, l'intime; elle tire le secret vers le grand jour, l'amène à la lumière comme pour en ôter les ténèbres, afin de le faire accéder à une certaine forme de vérité (de lumière) dont ce livre permet la révélation (puisque, comme elle le dit, « la vérité, c'est pour les romans… ») Aurait-elle pu en dire « autant » sans, précisément, le mot « roman » sur la couverture de ce texte ? Ce mot « roman » n'est-il pas ce qui permet justement à la narratrice d'ôter un peu de ces ténèbres qui assombrissent depuis si longtemps sa famille - ne nous dit-elle pas qu'au fond et malgré tout, ni sa mère, ni son grand-père ne sont responsables, coupables mais plutôt des victimes de l'Histoire ? Ne cherche-t-elle pas à mettre fin à cette tragique « malédiction familiale », à cette répétition infernale et ce, avec courage, parce qu'il faut se replonger dans le passé, avec tous les risques que cela comporte ?
Ces ténèbres, elle tente (et c'est un exercice difficile que l'auteur - la narratrice - entreprend là) de les atténuer un tant soit peu comme on passe la main sur la vitre embuée d'une salle de bain afin de se deviner un peu dans la glace : le texte ne se termine-t-il pas par cette magnifique remarque de Paul son mari : « Tu as dans les yeux un trait de lumière en plus » ?
Finalement, rien de ce qui devait détruire (la passion amoureuse notamment) n'a détruit. Au contraire, l'amour fou a apporté un plus, un supplément, une petite lumière qui peut-être servira de guide à la narratrice et lui permettra d'avoir un peu plus la force d'avancer.
Je ne sais pas pourquoi, soudain, aussi paradoxal que cela puisse paraître, Sarah me fait penser au personnage d'Antigone dans sa volonté d'aller jusqu'au bout tout en sachant qu'elle risque le pire. Antigone est d'ailleurs décrite comme « la jeune fille noiraude » dans le texte d'Anouilh (n'est-elle pas, elle aussi, une « enténébrée », écrasée par l'histoire de sa famille (Oedipe/Jocaste), l'histoire de Thèbes et l'histoire de cet amour immense pour son frère ?)
Les enténébrés est un texte qui tend vers la lumière. « Le désert le plus aride du monde se couvrit de millions de fleurs blanches et roses. » C'est en ces termes que s'achève le roman. Et je ne peux m'empêcher de citer les derniers vers qui concluent magnifiquement ce très beau texte porteur d'un espoir, d'une volonté de jouir du monde quel qu'il soit et qui que nous soyons devenus :  « Seuls se plaignent les sots. / Courons gaiement le monde / Contre vents et marées ! / S'il n'est de dieux sur terres,/ Nous serons Dieu nous-mêmes. » (Wilhelm Müller, le Voyage d'hiver)
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