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Critique de ManouParis


Histoires de femmes hautes en couleurs, ce recueil de treize nouvelles nous fait entendre la voix d'un pays méconnu, le Bhoutan. Son auteure, Kunzang Choden, y est née en 1952. Au coeur des villages, dans une société qui hésite entre tradition et modernité, sa langue est une invitation au voyage...

Que signifie être une femme au Bhoutan ? En réponse à cette question, toutes les nouvelles qui composent ce recueil dessinent le portrait de femmes fortes, qui font face aux épreuves de l'existence, s'entraident bon gré mal gré et ne baissent (presque) jamais les bras. Tandis que l'une a dû arrêter les études pour s'occuper de sa famille, l'autre a été abandonnée par son mari. Sangye Lhamo prend soin de sa mère alcoolique, pendant que Tsewang Doma rêve de la capitale... Autour d'elles, les hommes gravitent, souvent lâches, absents, voleurs, idiots et infidèles. Rares sont ceux qui échappent aux critiques. Quand c'est le cas, c'est toujours le regard d'une femme qui les sauve de l'ornière. Regard d'une fille, qui aime son père malgré ses défauts. D'une femme, qui défend son mari contre toute raison. D'une mère, qui couvre les agissements de son fils. Malgré quelques exceptions donc, ce sont les femmes qui mènent la danse. Bon an, mal an. Avec les moyens du bord, les terres que leurs mères leur ont légué ; parce qu'au Bhoutan, ce ne sont pas forcément les hommes qui héritent. Les filles ne portent pas forcément le nom de leur mère. Les mères célibataires ne sont pas mises au ban de la communauté ; elles font l'objet de commérages, mais pas plus que les autres familles.

Les nouvelles décrivent la vie dans les villages ; on y découvre la dureté du travail aux champs, les tâches domestiques lourdes incombant aux femmes ; tout nous parait d'un autre âge. Par opposition, la capitale Timphu exerce une force d'attraction sans pareille pour certains jeunes. Elle siginifie l'accès aux conforts les plus basiques comme l'électricité et la techonologie "domestique" (la télévision, l'électroménager). Sont également dépeintes les relations entre voisins ; l'entraide, indispensable, et son pendant négatif, le regard permanent des autres. Tout semble se faire ensemble, dans ces sociétés où la solitude voue à la mort. Les mariages, les enterrements, les joies comme les peines se partagent. Les rites religieux viennent cimenter ces étapes de la vie ; les mediums, humains qui représentent une divinité, ont une place de choix dans les communautés. L'alcool est également présent à tous les moments importants ; l'ara, l'alcool de céréales distillé, est bu comme de l'eau mais fait des ravages sur ceux qui le consomme exagérément.

De cette lecture, je retiendrais le plaisir éprouvé à être en compagnie de ces femmes. Chacune possède sa propre personnalité, son caractère, mais toutes font preuve du même courage, de la même liberté de penser. Bien que peu instruites parfois, elles font montre d'un bon sens remarquable et d'une intelligence pratique désarçonnante. Ne connaissant rien au Bhoutan, j'ai adoré voyager dans leur pays, les observer le temps de quelques pages, sans jamais rester sur ma faim, ce qui est parfois le risque avec le risque avec les nouvelles. J'ai ressenti une forme de mélancolie, (le spleen bhoutanais ?) durant ma lecture, quelque chose de doux et amer à la fois. J'ai également éprouvé, plus que jamais, un sentiment de sororité, d'amour profond pour toutes les femmes et une admiration inconditionnelle pour leur force. Je vous recommande vivement de céder à leur appel...
Lien : http://manouselivre.com/hist..
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