Roger Salengro était le ministre de l'intérieur de Léon Blum et du Front Populaire en 1936, un poste à hauts risques. Il s'agissait de préserver l'ordre républicain pendant les grèves de l'été 1936 qui paralysaient le pays tout en comprenant les aspirations à plus de justice sociale. Salengro s'était attiré les inimitiés des communistes qu'il critiquait après la scission de Tours en 1920 lorsqu'il avait refusé l'adhésion à l'Internationale. Il s'attira surtout la haine de l'Extrême droite après la dissolution des ligues (Croix de Feu, Jeunesses Patriotes). Accusé injustement, calomnié par des journaux d'extrême droite tels Gringoire d'avoir trahi et déserté en 1915. Accusation gravissime pour un ministre de l'intérieur en 1936 face à 3 millions d'anciens combattants (imaginons un ministre du budget chargé de lutter contre l'évasion fiscale qui aurait un compte caché en Suisse, non je déconne, c'est impossible...). Salengro, homme du Nord, maire de Lille, homme loyal, pudique, intègre, issu d'un milieu modeste et mal à l'aise dans les milieux bourgeois parisiens trouva cette accusation insupportable. Vulnérable, il aurait dû se faire aider, s'entourer, il s'est isolé, calomnié, il aurait du de ne pas répondre comme le lui conseillait Blum, il a tenté de se justifier ce qui face à une calomnie ne fait qu'empirer les choses. Epuisé, miné, torturé, il se suicide en novembre 1936, laissant un mot expliquant son geste. Emotion considérable dans le pays (jamais des obsèques n'avaient réuni autant de monde depuis Victor Hugo). L'auteur établit un parallèle avec Pierre Bérégovoy issu lui aussi d'un milieu modeste et auquel il manquait certainement les codes sociaux. Les mots tuent aussi sûrement que des balles.
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Exposé sous les lumières de l'injustice, Salengro, défendu, soutenu par Blum, ne se relevait pas, englué dans la spirale des réponses maladroites aux accusations méprisables, infondées, mais qui répandent le doute, parce qu'elles sont écrites, et qui transforment le regard des autres. …
Il est mort de cela, de l'insupportable défilé des soupçons qui atteignent l'honneur et la sensibilité, qui minent l'essentiel, la partie inconnue et mystérieuse de chacun.
Salengro n'a pu, ni su, résister. Il s'est suicidé.
Il ignorait les règles du combat contre la pure calomnie qui touche l'individu, sa famille, l'homme dans son être profond.
Une courte rencontre mais privilégié avec Mr Christian Blanckaert, Vice Président du groupe Hermès. Le genre de personne avec qui l'on souhaiterai pouvoir converser beaucoup plus que 10 minutes.