AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Syl


Syl
14 octobre 2013
Woodleigh Common, le 31 octobre,

La célèbre romancière Ariadne Oliver, spécialiste dans les histoires policières, passe quelques jours chez son amie Mrs. Butler, dans le village de Woodleigh Common.
Au soir d'Halloween, qui solennise aussi le passage des enfants du primaire au secondaire, elle aide Mrs. Drake à décorer les lieux de la fête ; guirlandes, bouquets, citrouilles, bougies, balais, miroirs, paniers de pommes rouges… Une belle effervescence règne dans la demeure. Enfants comme adultes installent les réjouissances et investissent toutes les pièces, couloirs et grenier.
Impressionnée par Ariadne Oliver, Joyce, une jeune fille de treize ans, se rapproche d'elle et engage la conversation. Elle se targue alors devant tout le monde d'avoir assisté à un meurtre, quelques années auparavant. Elle devait être bien jeunette ! La confidence est surprenante mais elle n'est pas prise au sérieux car Joyce a la fâcheuse manie de travestir la réalité et de s'imposer. La révélation se noie aussitôt dans les préparatifs des jeux.
Le soir même, les animations se passent sans incident, dans la bonne humeur, et c'est lors du départ des invités qu'on s'inquiète de la disparition de l'adolescente.

Londres, peu de temps après,

Hercule Poirot s'ennuie, la retraite le navre. Il attend son amie Ariadne Oliver, une femme charmante, bien que trop "fantaisiste" à son goût.
Lorsqu'elle arrive, elle est bouleversée. Un drame vient de se produire et elle réclame l'assistance du détective.
On a retrouvé Joyce morte dans la bibliothèque. La tête plongée dans une bassine d'eau, la bouche entravée d'une pomme.
Le jeu consistant à prendre une pomme dans l'eau avec les dents a été funeste, et tout porte à penser que c'est un crime et non un accident.
Hercule écoute Ariadne raconter l'évènement et songe déjà à Woodleigh Common. Un ancien ami y réside, le commissaire Spence.

"Hercule Poirot jeta un coup d'oeil par-dessus le portillon d'entrée de la Crête du Pin, ravissante maisonnette moderne. Il était légèrement hors d'haleine. Cette charmante maison avait été bien nommée, perchée qu'elle était au sommet d'une colline plantée de quelques pins épars. Un homme de bonne taille et d'un âge certain poussait une brouette, dans une allée de son petit jardin bien entretenu, un énorme arrosoir en fer galvanisé.
Au lieu des quelques mèches de cheveux blancs qu'il aurait dû avoir sur les tempes, la chevelure du commissaire Spence était devenue d'un gris uniforme. Et il avait pris du ventre. Il s'arrêta de secouer son arrosoir et regarda le visiteur planté à sa porte. Hercule Poirot ne bougeait pas.
- Dieu me pardonne ! s'exclama le commissaire Spence. Ce n'est pas possible, et pourtant si. Oui, c'est bien lui. Hercule Poirot, aussi vrai que j'existe.
- Tien, tiens ! sourit Poirot. Vous m'avez reconnu. Cela fait plaisir.
- Pourvu que vos moustaches ne cessent jamais de pousser !"

Sur les lieux du crime…

Il est agréable de se rappeler les jours anciens et les relations communes. La nostalgie est alors heureuse ! Au commissaire Spence, Hercule avoue se teindre les cheveux et s'imposer une tournure toujours aussi amidonnée… sa coquetterie ne faillit pas ! mais sa venue est à l'origine d'une triste affaire, elle n'a rien de plaisant.
Hercule sait qu'un policier à la retraite est toujours un policier, et il espère que le commissaire Spence lui apportera les éléments susceptibles de commencer son enquête. Sur ce il ne se trompe point. Spence l'informe.
Si Joyce est morte assassinée, ça veut dire qu'elle n'avait pas menti, qu'un meurtre a bien eu lieu et que le coupable vit dans ce charmant bourg. Des noms tirés de la liste des personnes présentes durant la journée d'Halloween se mêlent à d'autres qui se reportent à des histoires du passé. Morts, disparitions, héritages spoliés, amours contrariés, sont les soubassements de ce mystère.

Ce roman a été édité en 1969, sous le titre "La fête du potiron". Il est dans les dernières enquêtes d'Hercule Poirot et nous lisons un détective toujours aussi brillant, mais fatigué. Affublé de ses chaussures vernissées et d'un style vestimentaire suranné, très apprêté, il m'a semblé vieilli. Sa condescendance est moins soulignée et son humour teinté d'ironie n'a plus autant de mordant. Nous sommes dans une ère moderne où l'on commence à parler des premiers ordinateurs… "- Vous savez à quoi vous me faites penser ? lança Mme Oliver. A un ordinateur. Vous vous programmez vous-même. C'est bien comme ça que ça s'appelle ? Vous ingurgitez toutes sortes de données tout au long de la journée et vous attendez de voir ce qui va en sortir ensuite."
Ariadne Oliver a rencontré Hercule Poirot dans "Cartes sur table". Agatha Christie aurait fait d'elle un auto-portrait, avec plus de fantaisie. C'était une belle façon d'entrer dans la fiction et d'approcher son héros !
L'histoire est tout aussi captivante que les précédentes et son dénouement confirme mon idée : je ne serais jamais une bonne enquêtrice. J'ai soupçonné tout le monde sauf les bonnes personnes.
Les victimes, car Joyce ne sera pas la seule, inspirent peu de sympathie. Pourtant, elles sont bien jeunes ; leurs âges à elles deux totalisant à peine vingt-trois ans. La duplicité, la vantardise, la cupidité, l'impudence, sont des défauts que l'on rencontre à tout âge. A cela s'ajoute un tempérament fantasque et obsessionnel d'un autre personnage tout aussi immature. Cela en est dérangeant et donne à cette lecture une certaine amertume.
Les coupables sont machiavéliques et offrent des prestations théâtrales presque risibles si le ridicule n'était pas tant funeste.
Les décors sont ceux d'une Angleterre qui se modernise, un automne pluvieux et boueux, un village de carte postale et une nature belle qui se laisse dompter par des rêves.
Quel bon moment de lecture ! Monsieur Poirot, vos petites cellules grises pétillent d'intelligence et gardent tout leur éclat.
Commenter  J’apprécie          40



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}