AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782330130534
96 pages
Actes Sud (15/01/2020)
3.83/5   322 notes
Résumé :
Traduction : Gwennaël Gaffric

Dans un futur proche, le Soleil se transforme progressivement en géante rouge. La Terre se meurt. Pour contrer cette extinction programmée, les Nations se regroupent pour mettre en branle un projet d'une ambition folle : transformer la planète bleue en un vaisseau spatial à part entière...

Novella écrite en 2000, Terre errante manifeste déjà tout le talent et l'imagination de Liu Cixin. L'adaptation cinéma... >Voir plus
Que lire après Terre erranteVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (72) Voir plus Ajouter une critique
3,83

sur 322 notes
J'ai eu la chance de découvrir Cixin Liu il y a quelques mois avec le somptueux Problème à trois corps suivi de la forêt sombre. Avant d'entamer le dernier tome de cette trilogie, dernier tome de plus de mille pages, j'ai eu envie de voir de quoi était capable cet auteur chinois en matière de novella avec « Terre errante ». En moins de cent pages, j'ai pu retrouver les ingrédients qui en font sa pate : des explications scientifiques poussées (ce qu'en science-fiction nous appelons la « hard SF ») enrobées de réflexions passionnantes et de poésie. Oui hard-SF et poésie…Lorsque cette dernière permet, en l'enveloppant de beauté, de me passionner pour la première. Combo étonnant. Voilà pourquoi je trouve Cixin Liu particulièrement talentueux : Que ce soit avec des milliers de pages ou au moyen d'une nouvelle de moins de cent pages, il arrive à passionner ses lecteurs avec des sujets scientifiques assez ardus.

L'idée de ce court récit peut sembler tellement improbable qu'elle en paraitrait ridicule racontée rapidement. Sauf si on le considère comme une fable. Voyez plutôt : Les scientifiques se rendent compte que le soleil devient une géante rouge massive menaçant de s'étendre jusqu'à l'orbite de la Terre et donc de vaporiser notre chère planète, d'un coup d'un seul. Un événement qui doit avoir lieu dans les quatre siècles qui ont suivi les premières observations du phénomène. Depuis, trois cent quatre-vingt années se sont déjà écoulées et une décision a été prise : l'humanité doit émigrer. Concernant la façon d'émigrer pour s'installer sur Proxima du Centaure, les partisans de la Terre se sont opposés aux partisans des vaisseaux. Les premiers considèrent que toute vie en dehors de la Terre est impossible pour les humains, c'est donc la Terre qui doit constituer notre vaisseau, vaisseau titanesque avec ce que cela implique de difficultés et de technologies, tandis que les seconds considèrent que l'humanité doit partir sur différents vaisseaux et abandonner la Terre, solution plus facile, plus rapide.
Les partisans de la Terre ont finalement gain de cause car « Seul un écosystème de la taille de la Terre et son cycle écologique d'une extraordinaire vigueur, sera capable de perpétuer la vie. Si l'humanité part dans l'espace en abandonnant sa Terre, elle sera comme un nouveau-né privé de sa mère au milieu d'un désert ».

Du fait des progrès de la technologie, et au moyen de propulseurs surpuissants, nous assistons aux différentes étapes de l'émigration depuis l'Ere du freinage, lorsque les propulseurs interrompent la rotation de la Terre en générant une poussée de sens inverse du mouvement de la planète, jusqu'à l'Ere néosolaire permettant de rallier l'orbite de Proxima du Centaure. En passant par la fuite, l'errance, dont vous imaginez bien les difficultés…Un exode de deux mille cinq cent ans qui concerne ainsi cent générations d'humains, contraints de vivre terrés.

Au-delà des aspects scientifiques qui expliquent les étapes de ce processus inimaginable, ce qui est passionnant sont les impacts que développe Cixin Liu d'une telle épopée, impacts terrestres, climatiques, phénomènes physiques, mais surtout impacts sur les humains. Désirs, craintes, centres d'intérêt, organisation sociétale sont détaillés et, fait passionnant, la culture chinoise imprègne le récit. Il m'est d'avis, comme nous en discutions avec @Indimoon (dont la critique sur ce livre est selon moi une référence) que nombre de réactions ne seraient pas les mêmes si ce récit avait été imaginé et écrit par un auteur occidental. Que ce soit le respect strict et soumis de protocoles d'urgence pour évacuer les lieux alors qu'une vague de lave se répand dans les souterrains, ou la mise en sommeil des sentiments amoureux en cette période où la survie est devenue la priorité absolue, la culture chinoise donne au récit une coloration singulière.

« A vrai dire, cela ne fait que trois ou quatre siècles que les humains ont peur du soleil. Autrefois, les hommes n'étaient pas atteints d'héliophobie, comme nous. Au contraire, le Soleil était à leurs yeux un symbole de noblesse et de gloire. En ce temps-là, lorsque la Terre tournait encore autour de son axe, les hommes assistaient chaque jour au lever et au coucher du soleil. Ils acclamaient l'aube et admiraient le crépuscule ! ».

Et surtout, surtout, ce livre est beau. Magnifique. Des scènes majestueuses et colorées ponctuent le récit, telles des étoiles scintillantes dans cette épopée somme toute sombre. Nous assistons aux derniers instants du Soleil, aux derniers couchers de soleil, à l'élévation de propulseurs gigantesques qui émettent des lumières bleues, à l'arrêt de la rotation terrestre, les scènes sont grandioses et nous captent dès le début du récit.

« Nous sommes montés à bord d'un « bateau », un ancien appareil de transport maritime. La mer était éclairée par deux sources de lumière : à l'ouest, celle, bleutée, des faisceaux de plasma et, à l'est, celle, rosée, du soleil qui débordait de l'horizon. Ces rayons scintillants scindaient la mer en deux et notre bateau avançait sur la ligne de démarcation entre ces deux mondes aux couleurs irréelles. Au fur et à mesure de notre voyage, la lumière bleue devenait plus pâle et celle du soleil plus intense. Une atmosphère angoissante se répandait à bord. On ne voyait plus d'enfants sur le pont, ils se terraient au fond de leur cabine et tiraient les rideaux de leurs hublots. L'instant tant redouté aurait lieu le lendemain ».

Cette fable sur la fuite n'est pas sans me rappeler certains textes sur l'exode, je pense à ce livre-fable baroque et fantastique de José Saramago, le radeau de pierre, qui imagine le détachement de la péninsule ibérique du continent européen. Un gigantesque navire terrestre. Bon le parallèle s'arrête là puisque Saramago imagine que la péninsule ibérique retrouve ses origines, le berceau de sa nostalgie, à savoir l'Afrique. Mais comme dans ce livre, cette dérive bouleverse l'ordre des choses et, de même, il faut apprendre à vivre avec cette errance, ne pas céder à la panique, s'adapter.

Enfin, fait passionnant et assez rare dans un livre post-apocalyptique pour le souligner et en faire ma conclusion, il y a un immense espoir. La capacité d'adaptation des hommes et celle à s'unir sont bel et bien la clé de cet espoir qui illumine ce texte. S'unir pour un nouveau départ. Malgré la folie de cette épopée. Malgré sa durée qui font des humains vivant l'exode des sacrifiés pour permettre aux générations très lointaines de s'en sortir. Leurs sentiments sont recueillis avec délicatesse. C'est intime, c'est fort et beau.

« Nous devons garder espoir. Peut-être pas parce que l'espoir est réel, mais parce que nous devons rester dignes. A l'époque de l'Ere primosolaire, il fallait posséder de l'argent, du pouvoir ou du talent pour conserver sa dignité. Aujourd'hui, il ne nous reste que l'espoir. L'espoir est le diamant le plus précieux de notre époque. Peu importe combien de temps il nous reste à vivre, il faut le chérir. C'est ce que nous dirons à notre fils demain ».

Commenter  J’apprécie          10435
La nouvelle de Liu Cixin a permis le "SRAS WARS"! Ou le film "The wandering earth"( 44 millions d'euros, Netflix en a racheté les droits) qui montre les Chinois en sauveteurs de la Terre...

Dans une galaxie lointaine, très lointaine... Mais pourquoi les Chinois ont colonisé l'espace, à la recherche d'extraterrestres, semblables au pangolin (comme le "Dewback", reptile utilisé, comme monture, par les Stormtroopers sur Tatouine?) Parce qu'il n'y en a plus sur la Terre?

Ils avaient mangé tous les animaux sur la Terre (scorpions, "crevettes ivres", poisson Fugu, cervelle de macaque vivant et même des pangolins...) Alors, ils ont recherché dans l'Espace, d'autres espèces à consommer, comme les "Ewoks" sur la planète Endor, les "Mon Calamari "de l'amiral Ackbar, ou les insecticoïdes Géonosiens...

Mais, à force de bouffer n'importe quoi, l'équipage chinois a attrapé un Virus Sras.
- C'est parce que vous avez dévoré "Jabba le Hutt". Fallait pas manger la grosse limace!"

Oups! Erreur, c'est à cause du soleil qui va se transformer en géante rouge, que les Nations construisirent d'immenses propulseurs plasma (plus hauts que l'Everest!) qui arracheront la Terre, à son orbite, pour un voyage millénaire vers Proxima du Centaure!

L'auteur montre l'humanité confrontée à un Destin tragique (disparition de l'atmosphère, des saisons, et pour certains, la folie...)
La Terre subira des tsunamis monstrueux et des catastrophes terribles, irruptions de magma dans les cités souterraines, en s'arrachant à son orbite...

" L'ère du freinage venait tout juste de s'achever, et ses terribles effets sur la Terre étaient encore apparents: les marées provoquées par la terrible poussée des propulseurs... tandis la fonte des glaciers polaires dont l'eau était retombée en déluge sur l'hémisphère Sud..."

Dans la réalité, la Chine a construit une grande station spatiale qui pourra remplacer la Station spatiale Spatiale Internationale (made in China, pourvu qu'elle résiste au Temps) en 2022. Et, a réussi le 03/01/2019, un atterrissage sur la face cachée de la Lune, avec "Change4 " du CNSA Chinois (pour bouffer les " Sélénites" de Georges Méliès ?)
Commenter  J’apprécie          1006
Voici un court roman très agréable dont l'univers et les personnages sont palpables . Mais c'est aussi un texte qui manque quand même souvent de densité et de fulgurance. L'univers est très présent néanmoins et c'est une lecture confortable..
La terre quitte le système solaire car le soleil est sur le point de traverser un épisode du type nova . Ces pages présentent le voyage de notre planète . le texte s'attarde aussi sur ce qui rend technologiquement possible cette évasion planétaire . Les conséquences en physique de l'éloignement du soleil sur cette terre désormais martyrisée par les éléments sont évoquées avec brio.
Le ressenti des personnages n'est pas en reste alors que leurs croyances et perceptions du réel évoluent pas mal au grés des années lumières de distance au soleil . Ces années lumières qui s'accumulent ont aussi un effet certain
sur la société des hommes ainsi que sur leurs comportements social et individuel. A ce propos signalons que les hommes restent les hommes et que leurs pires démons outre leur résilience , trouveront aussi le moyen de s'exprimer dans ce petit nombre de pages quelquefois édifiantes sur la nature humaine.
C'est incontestablement un récit distrayant sur une thématique assez rare , qui est celle de notre planète avalant les années lumières au lieu de rester sagement dans le système solaire. Ce texte est bien construit il possède donc de l'allant et de l'intérêt.
Il existe un autre roman très agréable sur cette thématique de la terre en vadrouille. C'est : Terre en fuite (de Carsac ou François Bordes au choix) qui est un pur joyau de la science-fiction française et qui bien que assez ancien n'a pas pris une seule ride .Pensez aussi à ;Le long voyage ; de Gérard Klein relativement bon.
Commenter  J’apprécie          5610
C'est le premier récit de Liu Cixin que je lis ; accessoirement, c'est aussi mon premier récit de littérature chinoise.

Terre errante est une novella écrite pas mal d'années avant la trilogie du Problème à trois corps qui a valu à son auteur la célébrité internationale. En résumé, les savants ont remarqué que la transformation du soleil en géante rouge n'était pas pour dans cinq milliards d'années, mais dans quelques centaines seulement. L'exode est décidé, mais plutôt que de construire des engins spatiaux, c'est la Terre elle-même que les humains transforment en vaisseau intersidéral.
On suit les débuts du voyage à travers les yeux d'un gamin qui devient jeune homme, le tout écrit à la première personne.

Je dois dire que j'ai été plus d'une fois surpris par ce que j'ai lu, par les choix réalisés par l'auteur, par la force de ses images aussi.
Je me suis demandé à plusieurs reprises si ce que je lisais relevait d'une manifestation du caractère chinois de l'auteur, ou si j'inventais ça car, après tout, je n'ai guère sur la Chine que des préjugés pauvrement alimentés par les médias. C'est le cas par exemple avec ce gouvernement mondial de la Coalition qui semble avoir pris en main tous les aspects de l'organisation de la société, une organisation à laquelle tout le monde adhère avec peu de récriminations. Dois-je y voir une extrapolation de l'État Chinois si affamé de contrôle ? Ou est-ce que, tout simplement, l'humanité s'unit et ne fait pas de vagues face à l'imparable fin des planètes intérieures ? Allez savoir…
A noter que mon impression de placidité des gens a brutalement contredite par la suite.
Autre exemple : peu après la découverte du cataclysme à venir, toutes les religions ont disparu. J'ai presque fait un bond en lisant ça. A nouveau je me suis dit que cela pouvait être conjecturé par un chinois car ce peuple n'est pas accaparé (tourmenté ?) par le sentiment religieux. Pour moi il est évident que les religions prendraient à nouveau le dessus, déclarant le jour du jugement venu, etc. Et les masses marcheraient comme un seul homme, rendant impossible le projet de sauvetage présenté par Liu Cixin.

Dans un tout autre registre, j'ai eu du mal à décider si ce livre se voulait scientifiquement précis, du type hard science. J'ai fini par décider que non. Certes l'auteur offre de nombreuses voies d'explications scientifiques, mais il reste approximatif. Il faudrait faire ses maths, mais je me demande si ces monumentaux propulseurs à plasma pourraient disposer de suffisamment de carburant, voire simplement exister. En particulier, stopper la rotation de la Terre autour d'elle-même avec ces appareils m'a paru difficile à concevoir. Je ne pense pas que la croûte terrestre aurait résisté aux forces de cisaillement.
J'ai donc pris le parti de ne plus me préoccuper de la vraisemblance technique. A partir de ce moment, reste les formidables images-choc que Cixin nous assène : les milliers de jets de plasma sur un fond de nuit noire, des océans gelés, des tempêtes et des raz de marée inimaginables. L'auteur ne minaude pas et la Terre prend cher.

L'histoire elle-même réserve son lot de surprises et ne fait pas dans la dentelle. J'en ai apprécié la tragique conclusion. Les personnages ne débordent pas d'émotion mais cela est assez répandu en SFFF et ne me gêne pas.
De fait, mon appréciation est elle aussi d'ordre plus intellectuelle qu'émotionnelle. Mais cela aussi est assez courant et ne m'empêchera pas de m'intéresser à d'autres écrits de l'auteur.
Commenter  J’apprécie          5016
Terre errante a capturé mon esprit.
Errant, au fil de tableaux colorés, grandioses et gigantesques, odes à l'écrasante beauté du cosmos, et envahi de la mélancolie prégnante et enracinée de notre Terre, privée de son amant éternel, le Soleil, bien en peine de lui survivre.
.

Liu Cixin vient de faire de moi sa totale adepte, après des débuts prometteurs entre les trois corps et moi (trilogie "le problème à trois corps").
.

de tout ce que j'au pu lire ou voir, je me me souviens pas de plus beau voyage aux confins du système solaire, ni de vaisseau plus singulier.
C'est la Terre, notre vaisseau, à tous. Des siècles, plus de trois siècles pour être exacte, de labeur ont permis à l'Homme de faire face, avec un courage et une ingéniosité qui dépassent l'entendement je le conçois, à un évènement atroce: le soleil va exploser, nous atteignons ce moment bien réel où il sera une géante rouge, et ce beaucoup plus tôt qu'on le croyait. Alors l'Homme munit la Terre de propulseurs, l'empêche de tourner pour pouvoir l'extraire de son orbite, et lui fait entamer une errance de 2500 ans avant d'atteindre des cieux plus cléments, et intégrer une nouvelle orbite du côté de la constellation du Centaure.
.

"Les enfants, seul un écosystème de la taille de la Terre, et son cycle écologique d'une extraordinaire vigueur, sera capable de perpétrer la vie! si l'humanité part dans l'espace en abandonnant sa Terre, elle sera comme un nouveau-né privé de sa mère au milieu d'un désert!" nous explique la maîtresse, p23.
.

J'ai totalement réussi à intégrer cette dinguerie, la Terre-fusée parce que l'auteur a un talent immense. Il ne nous a pas assommé de science, bien au contraire, il a joué sur la corde sensible de la poésie des images, d'un hommage aux mécanismes pérennes qui permettent la vie mais, au demeurant, toute chose a une fin. Il évoque l'humanité au travers d'un personnage. C'est subtil d'opposer le gigantisme à un homme, simple fragment, pièce du vaste monde, c'est une vision certes réduite mais qui permet de ne pas se perdre dans l'énormité d'une intrigue très massive, de s'identifier totalement au narrateur, hagard, apeuré parfois mais néanmoins né dans ce monde là...Ses premiers mots, premières lignes du livre, me laissent déjà songeuse:
.

"Je n'avais jamais vu la nuit. Je n'avais jamais vu les étoiles. Je n'avais jamais vu le printemps ni l'automne, ni l'hiver.
Je suis né à la fin de l'Ere du freinage. La Terre venait tout juste d'arrêter de tourner." p7.
.

En même temps que lui, nous découvrons à quoi ressemble cette Terre, défigurée et immobilisée par les propulseurs la faisant baigner dans une lueur qui n'a plus rien de naturel:
"Imaginez-vous d'abord un palais colossal, aussi grand que le Parthénon, soutenu par d'innombrables colonnes crachant une lumière bleue et blanche, tels d'énormes tubes fluorescents. Imaginez-vous à présent n'être qu'un simple microbe sur le sol de ce palais. Voilà le monde qui était le mien." p8.
.

Dans ce monde où le Soleil est désormais menaçant, la crainte qu'il inspire est devenue viscérale jusqu'à se graver dans l'inconscient collectif "A notre époque la mort n'était plus noire. Elle se parait de la couleur de la foudre, car lorsque le dernier éclair frapperait, le monde serait vaporisé." p17.
.

Dans ce monde où le seul projet envisageable se résume à une survie collective, l'auteur évoque de manière succincte mais sidérante l'évolution "de la psychologie et de la spiritualité humaines" (p32) notamment "Mes contemporains s'éberluaient des films et des romans produits quatre siècles en arrière. Ils n'arrivaient pas à comprendre comment les humains de l'Ere primosolaire pouvaient accorder autant d'importance à des émotions qui ne concernaient pas la survie." p32. Propos illustré page d'avant pioché dans la vie de notre narrateur et qui me laisse pantoise: Son père annonçant de façon tout à fait anecdotique à sa mère, à peine attentive, qu'il part emménager quelque temps avec la maitresse d'école de son fils, mais qu'il reviendra "certainement". Cixin a une façon bien à lui d'énoncer des énormités sur un ton qui se veut neutre, que ce soit au niveau planétaire ou d'un "simple microbe". Ce détachement me séduit tout à fait.
.

Ainsi vient l'Ere de la fuite, en deuxième partie, mais je trouve que j'en dis trop d'une nouvelle courte et qui doit se laisser découvrir! (même si, moi; je ne lis les critiques qu'après avoir rédigé la mienne :p )... Je vais donc arrêter de commenter...C'est juste une partie qui m'a subjuguée, le voyage impensable promis au départ et que Cixin assume avec une maestria qui me laisse admirative d'une SF que je lis trop peu souvent d'une telle densité. En tout cas ce sont les ingrédients que je recherche on va dire. On est attaqué par des astéroïdes qui vont nous laisser une surface méconnaissable...On frôle Jupiter, sa Grande Tache rouge occupe notre ciel et je frissonne...
"...j'ai posé ne dernière fois mon regard sur Jupiter, qui occupait encore la moitié du ciel. J'y ai vu une balafre fendre l'océan de nuages. Sur Jupiter, l'attraction de notre planète avait, elle aussi, soulevé une vague de la taille d'une montagne dans l'océan d'hydrogène et d'hélium."p61.
.

Cerise sur le gateau ou pompon sur la Garonne comme ça se dit chez nous, la fin m'a émue. La pression maintenue en filigrane d'une immense mélancolie, adressée au père-Soleil qu'il faut quitter, à mère-Terre totalement meurtrie, et à la destinée de notre attachant narrateur, témoin et passeur d'une vie qui reste bien fragile.
.

J'ai déjà lu pas mal de romans dits posts apocalyptiques et celui là est singulier déjà de part la patte de l'auteur mais aussi parce qu'il n'est pas question de la culpabilité humaine dans l'état de la planète, ici. Cixin réussit l'exploit de nous donner envie d'aimer notre Terre, sans nous marteler de l'idée que c'est nous qui la détruisons et qu'on doit faire attention...Ce peut être parfois lourd et étouffant de lire du post-apo-écologique, très en vogue, et parfois aussi très réussi, je ne dis pas le contraire. Mais je me sens parfois comme une enfant à qui on dirait "jette pas ton déchet au sol" ou "le pétrole ça pollue mets de l'électricité dans ta trottinette", alors que si je lis ce type de roman c'est précisément que j'y suis déjà sensibilisée. Papa Cixin lui il me dit tout simplement de regarder un plus loin que le bout de mon nez "regarde comme c'est beau, comme ça fonctionne merveilleusement...Ce n'est qu'un moment à saisir, un fragment humain dans un rouage bien plus grand que toi." Après tout, nous n'avons pas demandé à venir au monde et peut-être ne serons nous pas plus responsables de son déclin .
Ceci dit, j'aime lire, aussi, que l'humanité soit capable de se battre pour sa survie, et déplacer des montagnes, il y a de quoi être fier de cette humanité là, elle existe sans doute, elle aussi...
Commenter  J’apprécie          3118

Citations et extraits (43) Voir plus Ajouter une citation
Mes contemporains s'éberluaient des films et des romans produits quatre siècles en arrière. Ils n'arrivaient pas à comprendre comment les humains de l’Ère primosolaire pouvaient accorder autant d'importance à des émotions qui ne concernaient pas la survie. Rien ne les étonnait plus que de voir un personnage - féminin ou masculin - souffrir ou pleurer pour un chagrin d'amour. De nos jours, le spectre de la mort et le désir de survivre surpassaient tout le reste.
Commenter  J’apprécie          364
Je n'avais jamais vu la nuit. Je n'avais jamais vu les étoiles. Je n'avais jamais vu le printemps, ni l'automne, ni l'hiver.
Je suis né à la fin de l’Ère du freinage. La Terre venait tout juste d'arrêter de tourner.
(incipit)
Commenter  J’apprécie          3717
A cet instant, j'ai senti une petite main moite saisir la mienne. J'ai tourné la tête. C'était Ling.
— J'ai peur... a-t-elle bégayé.
— Après tout, on a déjà vu le Soleil à la télé, non ? Ça sera pareil, ai-je dit pour la rassurer.
— Comment ça, pareil ? Tu trouves que voir un serpent en vrai, c'est la même chose que de le voir à la télé ?
Commenter  J’apprécie          220
- Mais c’est différent aujourd’hui, j’ai eu une révélation, regarde ! Ling soufflé une nouvelle série de petites bulles. Regarde-la ! a-t-elle répété en montrant une grosse bulle du doigt.
J’ai fixé la bulle, examinant les vagues de lumière et de couleurs à sa surface. Ce déchaînement frénétique laissait l’impression d’une complexité et d’un niveau de détails insaisissables. C’était comme si cette bulle était consciente du caractère éphémère de son existence et qu’elle interprétait pour le monde les innombrables rêves et légendes qui habitaient des souvenirs. Bientôt, le tourbillon de lumières et de couleurs s’est évanoui dans une explosion silencieuse. J’ai vu se former un nuage de vapeur presque imperceptible, qui n’a duré qu’une demi-seconde, et puis plus rien. Comme si la bulle n’avait jamais existé.
Commenter  J’apprécie          60
Notre bateau a continué à naviguer jusqu'à rejoindre la partie nocturne de la Terre. Aucun rayon de soleil ni aucun halo de plasma n'arrivait jusqu'ici. Dans la brise froide de l'Atlantique, nous avons vu pour la première fois de notre jeune existence un ciel rempli d'étoiles.
Mon Dieu, quel paysage! Quelle beauté étourdissante! Melle Xing a tendu le bras et a pointé les étoiles: "Regardez, les enfants! Voilà la constellation du Centaure et ici, Proxima du Centaure, notre futur foyer!" Puis , à ces mots, elle a éclaté en sanglots. Nous avons pleuré à notre tour, et tous les autres membres de l'équipage -le capitaine et tous ces marins aux nerfs d'acier- y sont allés de leur petite larme.
Commenter  J’apprécie          60

Videos de Liu Cixin (17) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Liu Cixin
Gwennaël Gaffric est le traducteur du *Problème à trois corps* de Liu Cixin. Il nous en parle.
00:25 Quelle place occupe Liu Cixin dans le monde de la SF ? 01:09 Qu'est-ce qui fait la singularité du *Problème à trois corps* ? 01:55 Comment expliquer le succès de Liu Cixin ? 02:22 Comment avez-vous appréhendé la traduction du *Problème à trois corps* ? 02:51 Avez-vous rencontré des difficultés particulières ? 03:34 Que diriez-vous à un lecteur qui n'ose pas se lancer dans la lecture du du *Problème à trois corps* ?
#sciencefiction #leproblemeatroiscorps
--- Retrouvez-nous aussi sur les réseaux sociaux ! • Facebook : https://www.facebook.com/actessud/ • Instagram : https://www.instagram.com/ • Twitter : https://twitter.com/ActesSud
Suivez nos actualités en vous abonnant à notre newsletter : https://share-eu1.hsforms.com/1_fVdYaQZT-2oDIeGtNS41wf4a19
+ Lire la suite
autres livres classés : science-fictionVoir plus
Les plus populaires : Imaginaire Voir plus


Lecteurs (676) Voir plus



Quiz Voir plus

Les plus grands classiques de la science-fiction

Qui a écrit 1984

George Orwell
Aldous Huxley
H.G. Wells
Pierre Boulle

10 questions
4856 lecteurs ont répondu
Thèmes : science-fictionCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..