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Critique de clude_stas


« L'Echoppe » s'est spécialisée dans l'édition de textes courts, inédits, indisponibles ou rares. Il suffit de s'attarder sur le catalogue pour être saisi de vertige : Marcel Duchamp, Lucian Freud, Pierre Soulages, Balthus, Alberto Giacometti, Sean Scully ou Giorgio de Chirico. Dans le volume que voici, nous trouvons la réédition d'un texte (ici, en quinze pages) paru en janvier 2011 dans « Il Giornale dell'Arte ». Il est dû à Jean Clair, de son vrai nom Gérard Régnier. Cet historien de l'art a été, entre autres, le directeur du Musée Picasso, de 1989 à 2005. Dans plusieurs écrits restés fameux, il s'est révélé être un virulent polémiste fustigeant l'art contemporain, jugé sans racines (françaises). Ainsi, dans ce texte rédigé lors de l'inauguration du Museo del Novecento à Milan, il tente de corriger l'idée fausse qui veut que l'Italie, berceau De La Renaissance et du Baroque, n'ait pas donné d'artistes majeurs à la modernité. Bien entendu, les plus célèbres sont les Futuristes, d'Umberto Boccioni à Gino Severini, qui, sous la férule de Filippo Tomasso Marinetti, ont participé à la déstructuration de l'unité spatio-temporelle de l'image. Mais tant d'autres ont été incompris, négligés ou purement et simplement oubliés : Giorgio de Chirico est phagocyté par l'ogre surréaliste ; Giorgio Morandi n'est connu que des spécialistes ; Mario Sironi, par son réalisme, est jugé rétrograde ; Arturo Martini, lui, est formellement trop classique. Mais, en même temps, Jean Clair évoque surtout les intellectuels, les galeristes et les collectionneurs italiens qui, lors de son premier séjour milanais en 1978, l'ont initié à la modernité péninsulaire, tout en déplorant l'intérêt porté à Piero Manzoni et à l'Arte povera.
Le style inimitable de Jean Clair est tout de suite reconnaissable par sa fluidité et le fait qu'il est souvent concis. Quant au propos, au fond tout à fait louable, il relève presque du voeu pieux, tant l'histoire de l'art, pour le grand public, est articulée par de grosses charnières. Elle est, et là Jean Clair a raison, trop souvent envisagée selon un schéma d'une chaîne dont chaque maillon serait la conséquence du précédent et l'initiateur du suivant. Rien de plus faux : de tout temps, il y a eu des artistes aux fulgurances extralucides et d'autres aux reculades passéistes. Non, l'histoire de l'art n'est pas un fleuve tranquille… et n'en déplaise à Jean Clair, heureusement que dans le lit du cours d'eau, se trouvent des rochers pour déchirer la sécurité de nos certitudes.
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