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Critique de Stockard


Être né avec une cuillère en argent dans la bouche et décider, à 16 ans, de quitter la grande bourgeoisie pour vivre dans une voiture, ils sont pas nombreux à faire le chemin dans ce sens-là. Margot France est de ceux-là. Quant, adolescente, elle tombe enceinte d'un professeur largement plus âgé, sa décision est prise, elle accouche dans sa baignoire, réunit quelques affaires et file s'installer dans une Mercury Topaz à l'entrée d'un parc de caravanes avec la petite Pearl sous le bras en espérant que personne ne lui demandera jamais de produire un certificat de naissance.
Malgré la pauvreté et la promiscuité de cette situation, la vie ne se passe pas si mal pour ces deux-là, faite de chansons d'amour qu'elles fredonnent à longueur de temps, de l'odeur tenace du Raid pulvérisé tous les soirs dans l'habitacle qui imprègne tout et des trésors chapardés à la riche famille de Margot qui s'entassent dans le coffre. Pour Pearl, devenue adolescente et qui n'a jamais connu autre chose, tout cela semble normal et ne l'empêche pas, avec Avril May sa meilleure amie vivant dans une caravane du parc, d'accumuler avec insouciance les petites bêtises propres à son âge. Bref, une existence plutôt douce que l'arrivée d'Eli, inconnu au bataillon, va faire chavirer en faisant tourner la tête et les sens de Margot et voilà Pearl qui, se sentant rejetée, passe le plus clair de son temps à s'introduire en douce dans les caravanes voisines, les découvrant toutes remplies d'armes, la plupart en transit pour le Mexique. Quoi d'étonnant dans ce trou de Floride perdu au milieu de nulle part où tout le monde est armé et où tout le monde trouve ça formidable, dégainant pour tirer sur, au choix, des bébés alligators, des troncs d'arbre, des panneaux de signalisation et même pourquoi pas, une fois, sur la Mercury ? La routine quoi... Mais l'arrivée soudaine du plus que louche Eli ne peut pas être le fait d'un hasard qu'il prétend affirmer, quelque chose forcément le lie à cet illicite commerce d'armement...

Racontant la vie des rednecks, démunis, révérends louches et autres vétérans du Vietnam, tous fous d'armes à feu, Jennifer Clement fait le choix intelligent de la dénonciation non-manichéenne du deuxième amendement. Que ses personnages soient bienveillants ou mauvais comme la teigne, pas un qui ne soit pas armé et qu'importe que leur coeur soit bon ou noir comme l'ébène, qu'ils portent un flingue parce que tirer sur tout ce qui bouge est devenu leur raison de vivre ou qu'ils se livrent à un petit trafic illégal parce qu'il faut bien manger, ça ne fera aucune différence quand il incombera à la Faucheuse de désigner ceux qui, ayant vécu par la poudre, périront par la poudre. Dans tous les cas, rien de bon, jamais, ne peut sortir du barillet.
Balles perdues tire parti d'une écriture soignée mais le style poétique et élégant de Jennifer Clement ne compense pas une intrigue par trop simpliste et une critique de l'industrie de l'armement un poil trop molle du genou quand on l'aurait voulu tellement plus combative et que la NRA s'étouffe avec !
Au final, un livre agréable à lire mais malgré tout un livre qui se fera tranquillement oublier.
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