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EAN : 9782702129340
308 pages
Calmann-Lévy (06/01/1999)
3.71/5   39 notes
Résumé :
Allemagne, 1975 : deux femmes au soir de leur vie se retrouvent au chevet d'un vieil homme, après avoir lutté cinquante ans pour occuper la première place dans son coeur. Tandis que dans la pièce voisine somnole, hanté par ses cauchemars, le plus grand esprit de son siècle, les deux ennemies font un rêve : duel de deux mémoires à fleuet moucheté, temps suspendu des réminiscences et des rêves perdus.
Martin et Hannah : il était profésseur, elle était son é... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Je demeure fasciné par le mystère impensable des amours extra-conjugales clandestines qui lièrent Hannah Arendt - Juive, déportée, sioniste pendant un temps, théoricienne du "totalitarisme" et de la "banalité du mal", observatrice inimitable de la Crise de la culture, de la Condition de l'homme moderne, auteure autant du très controversé Eichmann à Jérusalem que d'un essai sur l'antisémitisme - à Martin Heidegger, peut-être le plus grand philosophe du XXe siècle, mais assurément l'un des plus impliqués militants nazis parmi les intellectuels de son pays... J'aurais voulu essayer de comprendre ; soit à travers une biographie (fût-elle romanesque), soit par les influences mutuelles dans les textes - probablement davantage dans ceux d'Arendt de l'après-guerre, lorsque Heidegger s'était muré dans son silence. Arendt à l'attaque ou dans la défense ? dans l'aveu ou le déni ou le dépassement ? Arendt gênée de son héritage ou au contraire le revendiquant ? Hannah face à la contradiction...
De cela, je n'ai rien su. Sauf que cette passion amoureuse, ravivée par une lettre d'Hannah, et ayant survécu à la guerre et à la Shoah, fut une passion unique pour les deux, pendant plus de cinquante ans...

"Pourquoi cette poussée de désir, pourquoi avoir écrit à Martin cette lettre ? Elle savait parfaitement qu'il était un nazi. Pourquoi cet oubli sournois ? Avec le nazisme de Martin, Hannah avait fait semblant. 'Escapade', ce mot avait surgi du pardon amoureux.
Pour se justifier, elle avait échafaudé de longs raisonnements dont il ressortait qu'Elfriede avait entraîné Martin dans sa chute, pauvre Martin. Hannah savait bien pourtant que ce n'était pas vrai." (p. 234-235)

Ainsi aurait dû commencer le roman, pour me faire plaisir... Au lieu de cela, nous y trouvons une guerre verbale se muant progressivement en réconciliation, sans véritable trêve pourtant, entre les deux femmes rivales, Elfriede la légitime, l'incarnation de l'Allemagne nazie, et Hannah la maîtresse, l'incarnation... de quoi au juste ? du doute ? de la contradiction ? parfois de la duplicité (comme dans le passage cité)... Une guerre entre vieillardes au seuil de la mort qui ne peuvent que se remémorer une vie entière faite principalement de tragédies et de deuils, dès le plus jeune âge (au moins pour Hannah). Surtout, une guerre conduite dans l'ombre de l'âme mutique, essentiellement et profondément absente, du grand homme que seul des cauchemars éclatés secouent encore par moments. Il s'agit donc d'un dialogue savamment interrompu par des réminiscences, paroles nourries uniquement du silence de l'homme aimé et rivalisé. Des silences, devrais-je dire :

"Jusque-là, Elfriede percevait la signification de tous les silences de Martin, la tonalité de chacun d'entre eux. [...] le grave de la pensée, sans danger. le triste du crépuscule, inquiétant. L'aigu de l'angoisse, incontrôlable. Et le plus éprouvant, celui qui l'avait fait quitter la cabane. le silence de l'absence de la bien-aimée. Qu'allait faire la bien-aimée face au dernier-né des silences de Martin, le plus vieux de tous, qui allait vers la mort ?" (p. 97)
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« Vous, son point d'attache. Moi, son escapade. » Ainsi Hannah Arendt résume-t-elle le rôle d'Elfride Heidegger et le sien dans la vie du philosophe Martin Heidegger alors que les deux femmes font la trêve, en 1975, à l'occasion de la dernière visite d'Hannah à son maître, qui fut aussi le grand amour de sa vie. Comme elle fut aussi son unique passion.

C'est ce jour de 1975 que Catherine Clément a choisi de raconter. Mais aussi des moments importants, autant pour les deux femmes que pour le philosophe. Des moments qui expliquent les sentiments d'Hannah face à sa judéité alors que d'autres relatent l'adhésion d'Elfride au parti nazi, ses raisons, sa foi et son espérance en une nouvelle Allemagne. Un engagement qu'elle prendra seule, avant Martin.

Leurs vies à eux trois se détricotent devant nous. Comme la maille d'un chandail sur laquelle on tire. Jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien qu'un pelote. Souvenirs partagés, épuisés.

Alors que Martin dort dans la pièce voisine, elles se livrent, se disent presque tout. du moins, ce qu'elles sont en mesure de dire. Autour d'un café qui s'étire alors qu'Hannah allume cigarette sur cigarette et que la nuit tombe petit à petit sur Fribourg. Elles savent qu'elles ne seront jamais amies; des amies ne partagent pas le même homme durant toute une vie. Mais elles ne seront plus ennemies.

C'est ce jour de 1975 que Catherine Clément a choisi de raconter. Ce jour où Hannah et Martin se sont vus pour la dernière fois. Ce jour où Elfride et Hannah ont enterré la hache de guerre. Même si tout les oppose, même si elles n'ont en commun que Martin. Ce jour où elles lui ont pardonné de n'avoir jamais choisi, car toutes deux lui étaient essentielles.

Un très beau roman, bien documenté. On ne pouvait s'attendre à moins de la part de Catherine Clément.
Lien : http://lalitoutsimplement.co..
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Deux vieilles allemandes, l'une, la juive, passée à la postérité, Hannah Arendt, et l'autre, femme de...(Martin Heidegger, le philosophe), la légitime, face à la maîtresse, elles se retrouvent avec la volonté de se comprendre avant la disparition de l'homme de leurs vies.
Pour le lecteur une reflexion sur le nazisme, sur le sionisme et sur le sens d'une théorie philosophique qui cohabite avec l'extermination des juifs. de l'émotion face à la passion de ces deux femmes.
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Catherine Clément remonte ici aux deux principales sources de son talent romanesque : la fresque au clair-obscur des amours interdites (après La Sénora, Pour l'amour de l'Inde et laValse inachevée) et la geste philophique transfigurée par la fiction ( après La Putain du diable et le Voyage de Théo).
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C'est rare de ne pas pouvoir aller au delà de quelques pages en se disant que quel que soit le nombre de fois où l'on s'y reprend on n'y arrivera pas. Rien ne va. Tout est anecdotique, le style est primaire (dans le sens école primaire). Je n'ai tenu qu'un chapitre mais il est impossible que le reste soit intéressant.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Il suffisait d'évoquer la mort pour trouver le courage de vivre.
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Vous étiez son foyer, et moi, son échappée. Il faut bien à la fin que l'enfant quitte la mère avant de revenir. Vous, son point d'attache. Moi, son escapade.
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Videos de Catherine Clément (11) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Catherine Clément
Jérémy Chaponneau, chargé de collection au département Philosophie, histoire et sciences humaines, vous propose un programme de lectures autour des voyages d'Henri Cartier-Bresson : « le Musée du peuple mexicain », Pedro Ramirez Vazquez, Vilo, 1968 https://c.bnf.fr/NKm « La Nuit de Tlateloco », Elena Poniatowska, Éditions CMDE, 2014 https://c.bnf.fr/NKp « Autobiographie ou Mes expériences de vérité », Gandhi, PUF, 1982 https://c.bnf.fr/NKs « Gandhi : la biographie illustrée », Kapoor Pramod, Chêne, 2017 https://c.bnf.fr/NKv « Gandhi, athlète de la liberté », Catherine Clément, Découvertes Gallimard, 2008 https://c.bnf.fr/NKy « Mahatma Gandhi », Romain Rolland, Stock, 1924 https://c.bnf.fr/NKB « Mahatma Gandhi : a biography », Bal Ram Nanda, Oxford India paperbacks, 1959 https://c.bnf.fr/NKE « Histoire de l'U.R.S.S. », Nicolas Werth, Que sais-je ?, 2020 https://c.bnf.fr/NKH « Staline », Oleg Khlevniuk, Gallimard, 2018 https://c.bnf.fr/NKK « U.R.S.S. », Jean Marabini, le Seuil, 1976 https://c.bnf.fr/NKN
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