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EAN : 9782268033280
316 pages
Les Editions du Rocher (25/08/1998)
4.36/5   11 notes
Résumé :
JE SUIS MORT UN 13 DECEMBRE.
Vers le soir. C'était un dimanche. Il ne faisait pas froid. Pas chaud. Il ne faisait plus. Simplement. J'ai cessé d'être un couple. Je suis seul. Cette proposition, très claire, concise, irréfutable, je la comprends parfaitement. Pourtant sa substance m'est étrangère. Je pourrais en lister les conséquences bien sûr, et à ma manière je le fais, mais sa substance m'est étrangère. C'est comme si le dénouement avait eu lieu dans un mo... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Le cri de rage du grand chagrin amoureux, beaucoup plus subtil qu'il ne veut l'avouer.

Publié en 1999 et réédité en 2012, le premier roman de Régis Clinquart, "écrivain enragé" que je découvris l'an dernier lors d'une homérique lecture de nouvelle chez Charybde ("Récidive" : http://www.laspirale.org/texte.php?id=351), sous le bienveillant patronage de la Spirale, fut écrit entre 19 et 23 ans, et s'attaquait à un thème à la fois ancien et fort couru dans la littérature : celui du "grand chagrin d'amour".

Des risques d'une navigation délicate sur pareil sujet, entre mièvrerie et excès trop facile, le jeune auteur d'alors a su se dépêtrer avec un étonnant brio. Son long cri de rage absolue, parcourant tour à tour, et en boucle si nécessaire, toutes les régions d'amour et de haine d'une impitoyable carte du Tendre, joue avec un profond humour noir, une décisive auto-dérision, une permanente mise en abîme, et un recours aux incises et aux adresses au lecteur qui, loin de n'être qu'un artifice maladroit comme chez beaucoup de "débutants", lui permet au contraire d'éviter à peu près tous les pièges d'une semblable confession.

Alors oui, de l'excès il y en a, de l'amour et de la haine aussi, énormément... Une bonne dose de cynisme encore, revendiqué comme une tentative de combattre en armure, nimbé d'une joie sombre... Mais ce long purgatoire post-amoureux (dont la durée totale, "avouée" à un moment où on ne l'attend plus, pourra surprendre le lecteur même endurci) est aussi - peut-être surtout - l'occasion d'une minutieuse description de la redoutable accumulation de tranches de quotidien, à la recherche d'un salut qui se dérobe, et de la construction devant témoins d'une figure romancée de l'Auteur, dont le mythe se met en place alors même que le narrateur semble vouloir l'abattre au fur et à mesure.

De beaux éléments de tour de force dans ce coup d'essai d'il y a 13 ans, qui donnent grande envie de poursuivre rapidement en compagnie de cet auteur.

"On est allé ensemble Rumsteck et moi chercher cette petite nana que je traîne depuis une huitaine, et qui pose dans les ateliers d'artistes. Nue, évidemment. D'ailleurs une fois elle m'a demandé si ça ne me gênait pas. Je lui ai répondu que je m'en foutais, je vois mal ce que j'aurais pu dire. C'était sûrement la réponse qu'elle attendait, elle a eu l'air satisfait. À croire que cette situation - l'absence de sentiment ? - rend moins con."

"Les trajets que je faisais dans les Yvelines, d'abord la route du collège. Chauffeurs de bus des lignes de banlieue, à qui on dit bonjour le matin, bonsoir le soir, qui vous disent bonne journée avant de partir se refaire le même trajet. Parfois, ils nous le remplaçaient, notre chauffeur - ILS : la CGEA, nous le remplaçaient par un autre, un qui ne dit pas bonjour, pas appris, un à qui on cesse après quelques essais infructueux, quelques amorces sans succès, de dire bonjour... Très vite il s'anonyme et nous aussi, par ce piteux jeu de miroirs, redevenons des anonymes. Des anonymes : des animaux."
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Un bouquin qui s'empoussiérait depuis des années dans ma bibliothèque.
Je me souviens l'avoir feuilleté, ce devait être en 2012 ou 2013, et puis, non… ce n'était pas le moment...
Il y a quelques jours j'hésitais entre plusieurs bouquins pour savoir lequel serait mon prochain compagnon de lecture.
- Apologie de la viande - s'est imposé ; c'était le moment.
C'est l'histoire d'un mec… il se fait larguer, le mec...
Et là, l'écrivain prend la plume ou le clavier et balance des cris déchirants et beaux, désespérés et géniaux… et ça donne des trucs comme ça :
- On n'est rien qu'un trou de douleur et qui gueule à qui n'y peut rien faire. Rien que du bruit lâché dans l'impuissante consternation des autres.
- La condition humaine n'est qu'un vaste lendemain de cuite -
-Dans l'espace vert une gosse souffle des bulles de savon. J'ai posé mon cul dans l'herbe glacée et je la regarde faire. Je bats des mains quand elle en réussit une plus grosse, une plus colorée. Invariablement elle rit. Je lui ai dit mon prénom et elle n'a pas voulu me dire le sien. Les oiseaux abandonnent leurs petits quand par malheur un humain les touche.
- BEN VOYONS, JOINDRE UNE LETTRE DE MOTIVATION...
Pourquoi pas cent balles (écrit dans les années 90) et une photo de ma mère à poil ?
Motivation la thune, monsieur le Directeur des Ressources Humaines. Comme s'il fallait, pour travailler dans votre usine et enrichir vos salopes d'actionnaires, une vocation...
Régis Clinquart a accouché de cet "enfant" né d'une déchirure amoureuse entre l'âge de 19 et 23 ans… et pour déchirer, ça déchire !
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Beau... torturé... Bouleversant.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Bien avoir en tête qu'ils ne sont rien d'autre que les premiers arrivés d'une très commune giclée de foutre. Voilà tout le mystère de la création, c'est d'une trivialité... pas de quoi pavoiser.
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Les humains c'est tellement de bruit, leur bouche c'est si bavard mon dieu. Si on pouvait mettre bout à bout tout ce qui se dit à chaque instant ce ne serait qu'une longue cacophonie, un hurlement continu.
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On n'est rien qu'un trou de douleur et qui gueule à qui n'y peut rien faire. Rien que du bruit lâché dans l'impuissante consternation des autres.
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Travail du type qui se prétend écrivain : du griffonnage à pleins cahiers, et après recopier au propre. C'est ça, la blague : au propre.
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Personne ne sait vraiment ce qu'il est dans la tête ou dans le coeur des autres.
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QUEL ROMANCIER A ECRIT CES PHRASES: « Nous disons bien que l’heure de la mort est incertaine, mais quand nous disons cela, nous nous représentons cette heure comme située dans un espace vague et lointain, nous ne pensons pas qu’elle ait un rapport quelconque avec la journée déjà commencée et puisse signifier que la mort — ou sa première prise de possession partielle de nous, après laquelle elle ne nous lâchera plus — pourra se produire dans cet après-midi même, si peu incertain, cet après-midi où l’emploi de toutes les heures est réglé d’avance » ?

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