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EAN : 9782367250557
Kontre Kulture (30/11/-1)
4.15/5   10 notes
Résumé :


Michel Clouscard (1928-2009) est un sociologue et philosophe française. Il a fait une critique radicale du libéralisme en prenant en compte les changements de processus de production.

Second volet d'un triptyque comprenant par ailleurs Le Capitalisme de la séduction et Critique du libéralisme libertaire, Michel Clouscard se propose ici d'« étudier par quelle stratégie le capitalisme a produit la société civile, ce que Hegel appelait l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Voilà, ça c'est un livre qu'on m'a prêté alors j'ai dû le lire. Pourtant, moi, j'avais décidé de ne plus jamais rien me torcher sur l'économie et sur la politique, après avoir constaté à quel point les gens qui se battent dans ce domaine deviennent fous à force de se croire indispensables. L'amitié me perdra.


Avant toute chose, j'annonce que ce livre a été écrit en 1983. On peut encore le lire aujourd'hui car son programme n'a toujours pas été accompli. Il vaut mieux le lire aujourd'hui en oubliant qu'il a été écrit en 1983, pour la crédibilité de son auteur qui affirme que son programme devrait se produire de façon imminente, s'il était juste. C'est l'intention qui compte.


On part d'un constat : la crise de 1929 a entériné le passage du CCL (Capitalisme Concurrentiel Libéral) au CME (Capitalisme Monopolitiste d'Etat). Ce dernier accomplit des modes de production fondés sur l'exploitation de l'homme par l'homme en répartissant les modalités de l'aliénation selon trois axes : oppression économique ; permissivité des moeurs ; libéralisme politique, tout ça en particulier en récupérant les acquis du Plan Marshall et de Mai 68. Objectif : balayer toute la mémoire d'avant son ascendance, couper la liberté (laquelle ?) du collectif de l'Etat et de la famille, installer l'hégémonie du marché du désir en conquérant deux clientèles ciblées : celle de la nation et celle de l'intersubjectivité. L'Etat ne représente désormais plus rien car il est conditionné par un appareil d'Etat dévoyé, devenu une instance superstructurale de la société civile. Voilà pour le baratin. Bien sûr, tout cela est exposé sur deux cent pages.


Ensuite, on propose une solution au cours des cent pages suivantes. C'est assez simple. le CME est la dernière phase du capitalisme. On nous explique que ledit capital se constitue en cycle : expansion-crise-dépression-reprise mais « à chaque cycle la contradiction est dépassée, mais pour proposer une plus grande contradiction : la crise est surmontée au prix d'une plus grande crise. le capitalisme peut répéter, mais pas indéfiniment : l'accumulation des contradictions passe du quantitatif au qualitatif. Ce moment est celui de la crise généralisée, insurmontable, ultime moment de l'ultime mode capitaliste : le CME de la dégénérescence. Alors, la répétition n'est plus possible […]. »


Cette solution, c'est un peu bizarre, on penserait presque qu'il suffit de dormir longtemps dans une crypte et d'attendre que ça se résolve tout seul, le bordel : « c'est dans et par le CME que le dernier mode de production capitaliste glisse vers le socialisme. le CME engendre sa négation de par son propre fonctionnement ».


Clouscard veut être vraiment méchant, et on sait que la façon la plus cruelle de se venger de son ennemi, c'est de le prendre à son propre piège. Ainsi donc, il propose de profiter de la situation voulue par l'adversaire (la création d'une classe unique de désirs) pour inverser la tendance, de façon telle que cette classe unique moyenne préfigurerait la société sans classe (car elle aurait des revendications sociales communes et formerait un front commun face à la structure techno-bureaucratique). « C'est tout un programme gouvernemental (que l'auteur n'a pas à proposer, n'occupant pas encore de fonction ministérielle) ». Voilà comment on se débarrasse des patates chaudes qu'on nous fourre au fond de la gueule : en les crachant sur la face de son voisin, et en espérant que le plat refroidira lors du trajet.


Bon, moi j'en pense rien de tout ça. J'en ai rien à foutre. Je n'idéalise pas le passé comme ce bon vieux Clouscard (oh, comme c'était beau la vie dans les villages, oh, comme les ouvriers étaient contents de travailler et de faire des choses utiles de leurs dix doigts). Et puis, comment peut-on prendre au sérieux un type qui affirme, en guise de conclusion : « nous proposerons la philosophie de la praxis, où l'axiologie est immanente à l'ontologie, ontologie produite par le procès de production. le Noumène est en nous « plus nous-mêmes que nous », il est ce que l'homme a produit de si beau qu'il n'ose plus le reconnaître et se l'approprier » alors que :

1) Il n'a pas arrêté de se référer à la philosophie de la theoria pour justifier sa philosophie de la praxis ;

2) Il nous dit qu'il faut revenir à des choses simples en utilisant de grands mots compliqués ;

3) Il fustige des concepts qui lui auraient permis de comprendre que la reconnaissance du plus beau Noumène en nous a déjà été proposée par de nombreux types avant lui, mais il ne les a pas reconnus.


Ces concepts, ce sont par exemple ceux de la philosophie de Corbin (un Dasein revitalisé), ou encore ceux d'une certaine psychanalyse qui ne s'arrête pas aux traités de vulgarisation du freudisme ou du lacanisme. Clouscard a repéré un truc qui lui plaît pas dans la société civile du CME : le genre de vie de la bourgeoisie est celui de l'économie (alors que le prolétaire dépense tout), c'est celui de la dénégation, du refus et de l'inversion du niveau de vie possible. Alors, hop, Clouscard comprend carrément que ça doit avoir un rapport avec cette fameuse psychanalyse qui, bordel, n'a pas émergé pour rien, hein –existe-t-il des choses gratuites ? [pourtant la psychanalyse a vu le jour avant l'avènement du CME mais ce n'est qu'un détail]. L'inconscient tombe à pic. Mieux encore, ce fameux signifiant popularisé par Lacan. En deux entourloupes dont Clouscard a le génie, il en déduit que ce signifiant représente la relation à l'autre en tant que dénégation de l'ordre de production. Ce serait un processus terroriste qui permet d'écarter l'être (ici réduit à la classe ouvrière, l'autre par lequel le désir accède à son existence). Clouscard se voit des ennemis un peu partout, alors il invente des actes d'accusation sans lire les témoignages. Il ne se trouve qu'un seul ami : le groupe des communistes. C'est comme la mode des pantalons pattes d'éléphants : ça s'en va et ça revient, jamais sous le même ordre politique –les communistes aussi ont le droit de refaire leur show et Clouscard semble certain que cette fois, ça se fera en dehors de tout totalitarisme. On lui souhaite bonne chance. On devrait pourtant commencer à savoir qu'à chaque fois qu'un mec veut se taper l'affiche, c'est rarement pour le bien-être de l'humanité.
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Citations et extraits (45) Voir plus Ajouter une citation
Le capitalisme est enfermé en un cycle : expansion – crise – dépression – reprise. La répétition du cycle est la perfection du capitalisme […].
A chaque cycle la contradiction est dépassée, mais pour proposer une plus grande contradiction : la crise est surmontée au prix d’une plus grande crise. Le capitalisme peut répéter, mais pas indéfiniment : l’accumulation des contradictions passe du quantitatif au qualitatif. Ce moment est celui de la crise généralisée, insurmontable, ultime moment de l’ultime mode capitaliste : le CME de la dégénérescence. Alors, la répétition n’est plus possible […].
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Définir la société voulue par le capitalisme comme étant la société civile, c’est vouloir établir que le conditionnement capitaliste de la société moderne a pu investir le lieu même de la liberté.
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Toute libération apporte une nouvelle aliénation, mais moindre que l’originelle. Le refus [des freudo-marxistes] de la dialectique les renvoie à une conception évolutionniste du progrès. Si celui-ci n’est pas une totalité sans ombre, ils le refusent.
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Avec le capitalisme monopolitiste d'état, l’Etat est totalement investi par l’économique, par les monopoles qui se sont étatisés et sont gérés par l’appareil d’Etat.
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Le dogmatisme est alors l’économique « en dernière instance »… laquelle est tellement dernière qu’elle n’apparaît plus, qu’elle n’apparaît jamais. Cet économique est insaisissable, toujours recouvert du politique, de l’effet de superstructure, de l’Etat.
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Tout est permis mais rien n'est possible - Michel Clouscard - 2 . Editions Delga
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