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Critique de colimasson


Marshall attend, seul dans un bar, la promise que lui ont dégotée ses copains. Ca commence mal. Elle est en retard, et en plus de cela, Marshall a des tendances misanthropes qui le poussent à considérer chacun de ses semblables comme une cible potentielle vers laquelle diriger sa haine et son mépris. Voici de quoi se mettre en appétit…


Dans le type de Marshall, la quarantaine, se définissant lui-même comme un loser (divorcé depuis douze ans, incapable de bâtir la moindre relation durable, sans enfant, sans famille même, entouré d' « amis » qui le considèrent avec un mélange de pitié et de moquerie…), on retrouve toutes les caractéristiques qui avaient déjà fait le succès des précédents personnages de Clowes (il ne vous rappelle pas un peu Wilson ?) Mais dans Mister Wonderful, puisqu'il faut bien un peu se renouveler et apporter de l'inédit, d'un album à l'autre, Marshall s'avèrera finalement plus sociable que prévu. Miracle ! Serait-il enfin capable d'aimer, de s'attacher à une altérité ?


Il faudrait peut-être calmer un peu le jeu… Entre Marshall et sa promise, tout ne se passera finalement pas de manière aussi idyllique qu'on pourrait le penser… D'accord, Marshall tombe sous le charme immédiatement, mais il n'est séduit tout d'abord que par une apparence qu'il craint et qu'il admire à la fois, et qui le renferme dans ses propres complexes. Il faut ensuite franchir l'épreuve de la conversation, et une fois encore, rien n'est simple. Marshall nous rappelle son passé de misanthrope : cela fait tellement longtemps qu'il ne s'est plus confié à quiconque qu'il ne sait plus comment s'entretenir naturellement avec son prochain. Quelles sont les choses qu'il faut dire pour plaire ? Quels sont les sujets qu'il faut éviter d'aborder ? A-t-il le droit de dire qu'il est fauché, que son mariage a été un échec, que sa vie ne lui apporte que de l'insatisfaction ?
La lutte que se livre Marshall est une formidable occasion pour le lecteur de se réjouir. Ses bons et ses mauvais côtés se matérialisent pour lui souffler à l'oreille leurs conseils, et de multiples scénarios se construisent dans son imaginaire pour l'aider à prendre le choix le plus judicieux… Si Marshall déteste les natures prétentieuses et autosuffisantes, il se demande à de nombreuses reprises s'il ne devrait pas se renier quelques dizaines de minutes pour séduire son invitée.
De mensonges en révélations discrètes, Marshall réussit peu à peu à accorder sa confiance à celle qui était une parfaite inconnue la veille encore. le chemin est tortueux et parsemé de vieux relents de misanthropie. Entre la haine féroce des autres et l'envie de leur pardonner leurs faiblesses, on se laisse aller, avec Daniel Clowes, à éprouver un peu de tendresse pour nos semblables.


Ce Mister Wonderful est sans doute l'album le plus optimiste de Daniel Clowes, mais cela ne veut pas dire pour autant qu'on sortira de cette lecture le coeur gorgé d'espoir. Au contraire, si Marshall a réussi à se lier d'amitié (voire davantage ?) avec une nouvelle personne, ce n'est qu'en dressant les autres entre eux et le monde. La solitude est peut-être moins amère lorsqu'on peut la partager avec quelqu'un d'autre. On verra bien dans le prochain album si cette démarche s'est avérée concluante pour Daniel Clowes ?

Lien : http://colimasson.over-blog...
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