La proie du dragon de
Florence Cochet est une fiction qui nous emmène dans un monde post-extinction.
Les humains y vivent encore nombreux. Ils ont reconstruit leur vie loin de toute technologie, car une mystérieuse épidémie à nano virus s'est répandue est ne semble pas totalement éradiquée. Les plus modernes sont, de fait, bannies de ce monde et des moyens sont mis en place pour s'en préserver.
Lutessa est dotée d'un caractère affirmé et sait ce qu'elle veut. Elle se révèle forte, déterminée, courageuse et ne supporte pas qu'on prenne de décisions pour elle. Mais elle fait aussi preuve d'un grand entêtement qui va la mener au-devant de dangers qu'elle n'imaginait pas.
Un secret entoure la jeune fille qui, quand elle le comprend, ira jusqu'au bout pour avoir le fin mot de l'histoire. Tout ce qu'elle croyait s'écroule, elle ne sait plus en qui avoir confiance. Beaucoup de mensonges et non-dits lui sont révélés qui occasionnent un grand bouleversement dans sa vie, mais « on n'échappe pas à son destin ».
Florence Cochet nous livre dans ce récit des explications aux maux actuels de notre société qui peuvent faire froid dans le dos, mais revêtent une crédibilité saisissante.
On s'aperçoit que même quand le monde avance vers sa destruction, il reste encore des gens pour qui la quête du pouvoir passe avant tout.
Les chapitres courts donnent un rythme au récit. Les informations s'enchaînent de façon soutenue, mais sans lourdeur. On a le temps de tout assimiler même si l'action est omniprésent. Voilà un livre que certains qualifieraient de page-turner et qui ouvre sur une multitude de questionnements. Plus l'histoire avance, plus le mystère s'épaissit jusqu'au moment où la compréhension arrive et laisse un arrière-goût désagréable en bouche.
Cette histoire est vraiment très bien écrite, bien pensée. Pas de hasard, toutes les informations ont une utilité. Les passages plus techniques restent totalement compréhensibles même pour quelqu'un peu au fait de toutes les technologies modernes.
Comme souvent, rien n'est simple. Qui sont les bons, qui sont les méchants, qui dit la vérité, qui manipule les faits à son avantage ?
Quand on vous martèle les mêmes informations toute votre existence, il paraît bien difficile de les remettre en cause. Alors si une version tout autre nous est présentée, accepterions-nous de risquer notre petite vie tranquille pour croire et accompagner des inconnus venus nous informer qu'on nous ment depuis toujours, qu'eux connaissent la vérité et qu'il va falloir se battre pour la faire éclater ?
Pas facile comme décision, enlever ses oeillères et ne pas suivre aveuglément comme un mouton demande une bonne capacité d'analyse et une sacrée dose de remise en question. Tout le monde n'est pas apte à penser par lui-même.
Peut-on s'arroger tous les droits quand on veut protéger ceux qu'on aime d'un danger ? Tous les coups sont-ils permis ? Protéger, oui, mais cacher, voire pervertir des informations ou ne pas donner de réponses est-ce, vraiment, rendre service ?
Il existe peut-être des dangers qu'il semble préférable de ne pas connaître, mais, à un moment ou un autre, la vérité finit toujours par faire surface. Alors ne vaut-il pas mieux être prévenu et armé pour faire face ?
Ne pas révéler à une personne ce qu'elle est, d'où elle vient et quels enjeux pourraient peser sur ses épaules, si frêles soient-elles, c'est risquer de la laisser démunie face à une situation qui pourrait bien devenir périlleuse et pour le coup la mettre encore plus en danger.
Difficile équation pour laquelle faire au mieux n'apparaît pas toujours suffisant.
Vers où va nous mener la course pour toujours plus de technologie, toujours plus de monde, toujours moins d'attention portée à ce que l'on peut détruire, toujours plus de pollution, toujours plus d'individualisme ?
Peu importe les problèmes, du moment que le résultat nous sert dans notre quotidien.
Peu à peu, l'homme perd bon nombre de connaissances pratiques et manuelles au profit de toujours plus d'intelligence artificielle, tout doit apporter de la facilité et du confort dans nos vies. Beaucoup ne souhaitent pas faire des efforts ou des sacrifices, mais profiter de la vie.
Voilà comment on ouvre la porte à toutes les dérives.
Savons-nous vraiment ce que nous faisons à jouer ou laisser jouer les apprentis sorciers ?
Si nous devions payer notre égocentrisme un jour, comment nous adapterions-nous à un monde qui nous rejetterait et chercherait à nous anéantir pour le bien de la majorité ?
L'homme peut-il apprendre de ses erreurs ou semble-t-il condamné à toujours les reproduire grâce à sa faculté inépuisable à oublier ce qui l'arrange et ne transmettre aux générations futures que ce qu'il veut bien leur livrer parfois de façon parcellaire ?
Qu'est-ce qui permet de qualifier un organisme intelligent de vivant ? Un robot humanoïde, une intelligence artificielle peuvent-ils être considérés comme vivants à partir du moment où ils possèdent une conscience ?
Avoir les capacités pour analyser des problèmes, trouver des solutions qui se montreraient les meilleures pour une majorité, mais sans tenir compte du facteur émotionnel et sentimental, pourrait fort bien aboutir à des conclusions tronquées et donner des solutions inadaptées.
Mais est-ce bien différent d'un être humain sans scrupule qui ne s'embarrasse pas de sentiments et qui n'agit que pour son intérêt, qu'en recherche de sa propre gloire et qui utiliserait les autres pour arriver à ses fins ?
Que vaut-il mieux ? Doit-on accorder notre confiance à ces personnes ou à ce type de technologie ?
Cette histoire soulève bien d'autres interrogations comme les manipulations génétiques, le sacrifice de soi, la confiance…
Elle est très riche et passionnante. On ne peut s'empêcher de vibrer et trembler au diapason avec les personnages qui croisent notre route.
Nul n'est parfait, on commet tous des erreurs, mais l'essentiel ne reste-t-il pas d'avoir à coeur de faire au mieux ?
Je lirais avec plaisir la suite quand elle paraîtra.