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sur 830 notes
Un père alcoolique & violent qui les abandonnent, et revient mourir chez eux, une mère malade, et eux, les enfants, ce frère et cette soeur, Paul et Élisabeth, âgé de 13 et 15 ans, livrés à eux-mêmes, qui se replient peu à peu dans un monde imaginaire et développent au fil du temps une relation complexe et exclusive. La chambre est ce lieu fermé au monde extérieur, à celui des adultes, et à la normalité, ou ils se livrent "au jeu". Un endroit à leur mesure, ou ils jouent la grande sérénade de l'amour et de la haine: un spectacle passionnel exacerbé, ponctué de "Je t'aime, moi non plus"; des émotions excessives où complicité, insulte, manipulation, cruauté, innocence, pureté, vénération, y fleurissent pèle mêle. Ils sont rejoints très tôt par Gérard, puis plus tard par Agathe, dont les regards adoratifs, décupleront la créativité. Tant que les rôles de chacun garderont leur immuabilité, l'harmonie se maintiendra. Mais dès que l'un d'entre eux dévira du rôle qui lui est arbitrairement dévolu… alors là, c'est une toute autre histoire.

Récit plein de poésie et de fantaisie sur l'adolescence exaltée qui enflamme l'extraordinaire et étouffe l'ordinaire, c'est aussi un récit dérangeant et oppressant. Nous y observons ces enfants tisser leur monde avec des fils de soie qui se resserrent inexorablement sur eux. Un peu à l'image du cirque de puces imaginaire de John Hammond (alias Richard Attenborough) dans le film Jurassic Park. Pauvre cocoon illusoire. Pauvres marionnettes démantibulées. Impossible cependant de rester sur le pas de la porte. Soit on entre dans la chambre - leur chambre - (au risque de devenir soit même un jouet entre leurs mains), soit on claque la porte et on s'en retourne d'où on vient. Car il n'y a pas de demi mesure avec ce genre d'ouvrage qui prend toute sa dimension dans l'excès: soit on aime, soit on n'aime pas!
Publié en 1929, cela n'en demeure pas moins un récit terriblement intemporel, et difficile à cataloguer d'ailleurs.

Je vous recommande de le lire sur fond de musique classique ou d'opéra. C'est très agréable. La musicalité qui se dégage naturellement de ce récit créée une sorte d'osmose entre les deux. A mon avis, les oeuvres musicales qui le représente le mieux, sont l'opus 64 de "Romeo et Juliette: Danse des Chevaliers" (Serge Prokofiev) & "Danse Macabre" (Camille Saint-Saëns). L'une met plus en exergue une tension addictive, l'autre un envoutement torturé, mais les deux subliment l'émotion dans ses extrêmes : amour et haine, adoration et répulsion, vie et mort...Tout simplement Grandiose! Enfin, ce choix n'est que le reflet de mon interprétation musicale du livre ! Par conséquent, une liste très très loin d'être exhaustive.
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Malsain, claustrophobique, d'un onirisme tirant sur le gothique, graphiquement très marqué en rouge (le sang, l'écharpe), noir (la chambre, les âmes) et blanc (la neige), grouillant de miasmes de rébellion :

Il n'est finalement pas si étonnant que ce soit ce roman des années 50 qui ait tamponné le plus fortement mes années d'adolescence, tant il encapsule dans les quatre murs de la chambre-refuge que ces gosses occupent comme une citadelle tous les affres de cette délicate période.

J'en garde une image paradoxale, toute subjective et bien affectueuse, d'un roman à la fois intemporel et daté, mais aussi une phrase qui n'a cessé de me suivre tout au long des années :
"Tout ce qu'ils faisaient ne leur appartenait pas en propre : serviteurs d'une loi inflexible, ils le ramenaient à la chambre où se faisait le miel".
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Paul et Elisabeth sont frère et soeur. Dès le début du roman, Paul tombe malade à la suite d'une bataille de boules de neige. Celui qui a envoyé le projectile est Dargelos, pour qui Paul éprouve une admiration sans borne sans que celui-ci le remarque. Paul est assisté, dans sa maladie, par sa soeur et un de ses camarades, qui l'admire aussi, Gérard, lequel reporte bientôt son affection vers Elisabeth. Un jeu à trois se met bientôt en place entre Paul, Elisabeth et Gérard, et bientôt Agathe, orpheline ramenée par Elisabeth, les rejoint. Dans cet univers clos, les amours touchants et fraternels ont quelque chose de malsain, et tournent au drame.
Les désillusions des personnages entrainent la fin de leur innocence et de leurs adolescences. le huis-clos charmant de la chambre perd vite de ses couleurs et dans l'immobilité apparait bientôt la morbidité. Un roman de tendresse et de violence.
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Que se passe t'il lorsqu'on met deux adolescents de 13 et 15 ans, frère et soeur, dont l'un est fragile, seuls responsables d'eux-mêmes, dans un grand appartement et sans soucis financiers?

Cocteau est un maître quand il s'agit de nous raconter des familles dysfonctionnelles, qui ont leur propre code, leurs lois souterraines. Ainsi, dans cette famille, le père violent disparaît bien vite, la mère se meurt, et Paul, le fils, est cloué au lit par une boule de neige lancée par Dargelos, le camarade d'école qu'il vénère. Elizabeth, la soeur aînée, s'occupe de lui, avec l'aide du docteur, ami de la famille et soutien.
Gérard, orphelin élevé par un oncle très souvent absent, s'immisce dans la relation conflictuelle et passionnée des deux enfants, et bientôt les trois abandonnés se créent un cocon aux lois mystérieuses, dans la grande chambre où ils dorment tous les trois -puis à quatre - et qui renferme tous leurs trésors et évocations de personnes élues comme des sortes d'idoles.
Ici, pas d'histoire d'inceste, comme on pourrait l'imaginer, mais un amour fort né sans doute du besoin vital de se protéger de ces parents absents, nourri par cet isolement dans la chambre dans laquelle on mange n'importe quoi à n'importe quelle heure et dans laquelle on obéit à des rituels secrets. Un amour si fort qu'il en devient maladif, mais chut, je n'en dis pas plus.
Lu une première fois il y a longtemps, je me souviens avoir adoré ce livre et avoir été marqué, tout comme avec Les Parents Terribles, par cette évocation de familles bancales et repliées sur elles-mêmes.
Je viens de le relire, et mon sentiment est un peu plus mitigé. Bien sûr l'histoire est belle, tragique, les enfants purs et cruels, à la Cocteau. Mais cette fois-ci j'ai été gênée par des phrases parfois trop hésitantes, ou foisonnantes, et par cet imparfait omniprésent qui donne la sensation que ce n'est d'abord qu'un résumé et que la vraie histoire est encore à venir.

Ceci dit, tout comme les Parents Terribles et la Machine Infernale, les Enfants Terribles, par des détails en apparence anodins à valeur prophétique - l'écharpe qu'on retrouve dans deux de ces livres - reste longtemps ancré dans la mémoire tel un conte mythique.
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Ecrivain puis cinéaste dans une version dramatique du lien fraternel, fusionnel qui touche le lecteur
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Jean Cocteau aime les tragédies grecques et il le prouve encore une fois avec "Les enfants terribles" qu'il écrit en 1928 durant une cure de désintoxication (qui lui inspira également le livre "Opium" sous forme de journal).
Ce sont les tourments amoureux de l'adolescence qui sont au centre de ce roman culte, ceux de Paul et d'Élisabeth, frère et soeur, qui vont se créer un univers à la fois baroque et insolite. Ils partagent la même chambre qui devient vite un territoire de jeux où se retrouvent aussi leurs amis Gérard et Agathe.
Plus tard, orphelins, ils vont devenir oisifs, vivre en marge des réalités quotidiennes à l'abri des soucis matériels en se demandant si la vie elle-même n'est pas autre chose qu'un jeu ? Mais c'est sans compter sur la puissance de l'amour d'Élisabeth pour son frère Paul.
Cette histoire, qui ressemble à un conte, se déroule sur un rythme lent et selon une construction rigoureuse de tragédie. Mais sa particularité est le non-conformisme que l'on retrouve dans le choix des thèmes : homosexualité, inceste (même non consommé), vol...
Cela m'a rappelé « Agatha » de Marguerite Duras mais aussi « Paul et Virginie » de Bernardin de Saint-Pierre, d'ailleurs évoqué en référence par le narrateur.


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Frères et soeurs, une maladie d'amour:a écrit le pédopsychiatre Marcel Rufo.
Un thème fort souvent retrouvé en littérature.
Les enfants terribles de Jean Cocteau basé sur l'amour exclusif et impossible qui lie Paul et Elisabeth m'a rapellé La tristesse du cerf-volant de Françoise Mallet-Joris (roman dans lequel Christophe crée un espace clos dont sa soeur Clara et lui sont les personnages) ainsi qu'Ernesto et Jeanne dans La pluie d'été de Marguerite Duras.
Point d'inceste dans Les enfants terribles, mais un même culte voué par la soeur et une relation fusionnante sans pudeur qui, ici, prend de l'ampleur, suite à l'alitement du cadet qu'une méchante boule de neige a terrassé.
Les "Mon chéri" d'Elisabeth-Lisbeth-Lise, la garde-malade dévouée, une fois en passant lorsquelle a peur qu'il meure, sont la plupart du temps des "Dors imbécile", auquel Paul répond parfois par "Je veux que tu restes près de moi" mais presque toujours par "Idiote" ou "sale typesse".
Ces jeux provocateurs qui signeraient une adolescence somme toute banale,s'amplifient après leur retour de la mer, au repos soit-disant bénéfique, car la "vigilance sournoise" s'est doublée d'insultes et de coups tordus.
Plus de repères.Le père a disparu depuis longtemps,la mère depuis peu et seule reste à la barre Mariette "simple comme la simplicité".
"La chambre prend le large" et ouvre la nuit les portes de son théatre dont Gérard dit Girafe, copain des deux terribles, est le seul spectateur.
"Ordure!"
"Le misérable! L'atroce!"
La chambre cocon, utérus, temple morbide dont la vierge prêtresse garde jalousement le trésor, ne risque t-elle pas d'exploser avec l'arrivée d'Agathe,mannequin perturbateur ou d'une deuxième boule empoisonnée plus noire qu'une neigeuse?
Un délire d'amour aussi fort que les liens qui unissent un Paul et une Virginie mais une Virginie faussée dés le départ. Seule la mort fige à jamais les passions.
Ecrit à la manière d'un conte fantastique, Les enfants terribles ont été inspirés à Jean Cocteau par la vie de Jeanne et Jean Bourgoint rencontrés grâce à Christian Bérard qui a réalisé pour lui des décors de théatre.
On retrouve dans cet ouvrage la poésie riche d'un moi sans cesse renouvellé, celui de Jean Cocteau à la fois poète,cinéaste,écrivain,homme de théatre et dessinateur.
Pour les amoureux de Cocteau: Lettres à sa mère (deux volumes) est un pur bonheur!
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J'ai lu ce livre car il m'avait été conseillé lors de la lecture d'un petit fascicule édité par "Le livre de poche" dans lequel un panel de libraire promouvaient leurs coup de coeur.
Ce livre a été pour moi une énorme déception. Alors oui il est vrai que c'est lyrique, avec des phrases bien tourné, à la limite d'un texte poétique, mais personnellement je ne suis jamais rentré dans l'histoire.
J'en viendrai même à souhaiter pouvoir échanger avec une personne qui a adoré ce bouquin pour essayer de comprendre où cela a caler.
J'ai même eu du mal à finir ce livre tellement il m'a déçu
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Cette lecture est à l'image de son titre « terrible » !

Tout dans cette lecture vous fera trembler. L'histoire de vie de ces enfants nous attriste, mais le monde qu'ils s'imaginent est incroyable. Comme si toute l'horreur que ces enfants ont pu rencontrer n'a fait que développer et renforcer leur imaginaire et tout les mondes dans lesquelles ils croient vivre. Lorsqu'un frère et une soeur décide de faire de leurs chambres un monde terrible, là où les insultes comme l'imagination n'ont pas de limites.

On va donc pénètrer dans un huit clos où la tension est à son comble. A chaque page, la pression monte toujours un peu plus. On pressent le drame à venir et lorsqu'il arrive c'est une explosion qui se met en place. Une fratrie terrible qui n'hésite pas s'envoyer de nombreuses piques et autres insultes. Prêt à faire pénétrer des personnes extérieurs dans leurs délires, mais pas suffisamment proche car au final il n'y en aura que deux. Les deux principaux qui souhaitent développer leurs vies comme ils l'entendent. Ce roman en devient donc malsain, par ces relations exiguës qui nous entraînent toujours plus loin dans cet univers. Là où l'on comprend que tout est mal …. Et pourtant, on ne peut s'empêcher de frapper à cette porte et d'ouvrir ce monde qui nous attire inévitablement.

Cela fait de ce roman une lecture entière : on s'y retrouve ou on le rejette. Malgré cette réflexion, je n'arrive pas à me situer dans cette relation. Ai-je réussi à y pénétrer ? Rentrer dans cette chambre où tout parait irréel ? Ou suis-je restée à la porte bien décidée à ne jamais pénétrer ce monde si étrange ? Cette interrogation me taraude depuis que j'ai refermé ce livre. Bien incapable de me décider, je reste comme prisonnière de cette lecture… Et c'est là, la force même de ce roman. Un texte tellement dérangeant, extraverti et particulier qu'il s'imprégnera en vous pour s'y loger dangereusement. Serez-vous remédier à ce mauvais sort ou laisserez-vous consommés par cette histoire ?

On se retrouve donc avec un récit qui reste en mémoire. Forcément on se sent comme pris au piège par cette histoire, par cette fratrie et par tout ce que cela implique. Et surtout nous attendons cette fin qui va arriver et détruire tout sur son chemin. Une fin dévastatrice, à l'image de toute cette histoire : terrible !
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Un père alcoolique, décimé par une cirrhose.


Une mère qui décède des suites d'une attaque.


Paul et Elisabeth, adolescents, se retrouvent livrés à eux-mêmes, se retranchent dans un monde à eux, se mettent en scène, se provoquent, se défient.


Leur relation est exclusive, fusionnelle, conflictuelle. Elle grandit dans leur chambre, enclave protectrice dans le tumulte qu'ils traversent.


Et Il y a Gérard, un camarade de classe de Paul, béquille faiblarde de ces sauvages mal élevés et provoquant.


Court roman publié en 1929, Cocteau signe ici un huis clos claustrophobe, dérangeant, sur des enfants terribles désillusionnés et esseulés, violentés par la sortie de l'enfance.


Percutant. 

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