AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Eric76


Eric76
09 décembre 2018
Une « énorme histoire », tout en finesse et démesure, tout en cynisme et drôlerie, tout en répulsion et passion destructrice. Une « énorme histoire » au lyrisme échevelé, aux chuchotis ravageurs, aux vérités qui font mal.
Un livre qui vous fait atteindre des sommets, qui vous prend aux tripes, au coeur, et ailleurs ; un livre qui vous fait monter les larmes aux yeux, éclater de rire, bondir de joie ; un livre qui va vous montrer avec un entêtement moqueur les recoins sombres de nos sentiments et les dessous des cartes ; un livre qui vous fera bredouiller d'émotion tant l'écriture y est étourdissante, féérique, magique.
Il y a tant et tant de choses à dire sur ce livre kaléidoscope aux mille couleurs chatoyantes, aux sombres fulgurances…
Comme j'ai aimé Ariane et Solal ! Ariane, la « vive, la tournoyante, l'ensoleillée, jolie comme un coquelicot au vent de l'été ». Ariane dans sa robe blanche, un peu déesse, un peu fillette avec ses « moues de tendresse ». Et puis Solal avec son « visage impassible couronné de ténèbres désordonnées », ce « youpin né en Grèce et naturalisé français », ce Don Juan cruel qui joue avec le coeur et les sentiments des femmes.
Solal voulut conquérir sa Belle avec d'autres moyens que l'habituelle gestuelle du mâle dominateur, sans son « brio de gorille au Ritz, sa parade de coq de bruyère, sa animale danse nuptiale ». L'échec fut total ! Là est peut-être le péché originel car, dès lors, leur passion deviendra ordinaire, échevelée peut-être, flamboyante surement, mais ordinaire. Elle s'usera avec le temps, malgré les artifices, malgré leurs tentatives désespérées et vaines, parfois sublimes, parfois pathétiques, pour sauver leur merveille du naufrage.
Arianne et Solal évoluent dans ce monde de l'entre-deux-guerres qui lui aussi gambade gaiement et avec insouciance vers le désastre. Grand ponte à la Société des Nations, Solal le voit d'ailleurs venir. Quel machin, comme dirait De Gaulle, que cette SDN ! Un repaire d'incapables, d'ambitieux à la petite semaine, de poltrons, et de profiteurs, plus intéressés par leur petite carrière que par la recherche de la concorde entre les peuples. Quelle drôle d'idée eut Solal de cesser soudainement de s'ébattre avec cette bande d'inaptes ? de jouer les princes vertueux ? Il se prendra leur antisémitisme en pleine figure. Un antisémitisme bien comme il faut, poli, de salon, raisonnable. En attendant l'autre qui pointe le bout de son nez.
Que d'images ! Que de rires, que de révoltes, que de tristesse !
Le petit Deume et ses Deumeries, le mari d'Ariane, pathétique flemmard à l'ambition démesurée, cocu errant. Et les cinq valeureux, iconoclastes, bouffons, drôles, menteurs, avides, mais toujours fidèles au prince Solal. Mariette et ses monologues ravageurs si plein de bons sens. Les chuchotis et les délires d'Ariane. Les longs silences lucides de Solal. Les faux dévots bêtes et méchants. Les craquelins de l'infâme Antoinette Deume.
Quelle aventure, mes amis ! Ce fut un long, grand et sublime voyage. Une lecture marathon grandiose et inoubliable.
Commenter  J’apprécie          20732



Ont apprécié cette critique (163)voir plus




{* *}