Maréchal de nuit

L'embarras du "choix" de l'arpenteur motorisé des Maréchaux et du Bois de Vincennes, la nuit.

Publié en juillet 2011 aux éditions Lunatique, qui cultivent régulièrement de précieux textes "dissonants", cette brève nouvelle (30 pages) d'Alexander Coï, dans la jolie collection dédiée "36e deux sous" se situe à l'exacte intersection de la liberté sexuelle la plus revendiquée et assumée et de la consommation marchande la plus décomplexée.

Lorsque sa femme Nelly s'endort régulièrement d'un sommeil de plomb, bien souvent, le narrateur insomniaque et inassouvi se glisse en pleine nuit hors du domicile familial, et arpente longuement les boulevards parisiens des Maréchaux ou le bois de Vincennes, au volant de sa berline, en quête, en "chasse" de la prostituée qui le "délivrera". Pérégrination dont la réalité, si l'assouvissement sexuel en fait fréquemment partie, semble plutôt se dissoudre dans l'envie d'éprouver, stricto sensu, l'embarras du choix : laquelle choisir ? Avant de retrouver Nelly au petit matin pour d'effrénées étreintes autour du récit partagé de la nuit...

Texte étonnant, cavalier, dérangeant, indéniablement.

J'ai lu cette nouvelle sous les conseils de l'éditrice. Une plongée dans une nuit courte, intense. On parle sexe, route, voiture, dames de la nuit. Elles sont présentées à la fois très humaines mais aussi comme elles sont, des variétés. L'écriture sans être crue est directe et sans détour. On (enfin moi) se surprend à avoir une sorte d'empathie pour ce personnage en chasse ambigu qui cherche sa dose de réconfort. La chute est surprenante de tendresse, presque de sérénité, d'acceptation. Un texte qui vaut le détour !

Un homme, la nuit, dans le huis-clos de sa petite auto, roule aux abords de Paris en quête d'une prostituée. Et l'on se retrouver coincé avec lui à l'écouter débiter un monologue drôle et cruel, mais jamais désobligeant.
Drôle, parce qu'on sent bien qu'il se motive. Alors il se cherche des raisons, ou, tel un collectionneur avisé, fait des classements parmi les femmes qu'il croise dans la lumière de ses phares.
Cruel, parce que cynique et amoral.
Un texte très court, mais dense. La fin surprend et dérange sans doute plus que le reste. Mais c'est tellement bon une histoire qui secoue et fait réfléchir !