En 1923, un débat faisait l'actualité sous la coupole
De l'Académie Française, celui de savoir si les portes de cette vénérable institution devaient s'ouvrir aux femmes. Certains, s'appuyant sur la tradition, s'entêtaient à refuser au féminisme cette suprême conquête, d'autres au contraire, pensaient, déjà, que le talent n'a pas de sexe.
Unanimement pourtant, sous la coupole, on estimait, à cette époque, que si l'un des quarante fauteuils pouvait accueillir une femme de lettres, c'était à Mme
Colette que cet honneur devait revenir.
Colette est, en effet, un de nos plus grands écrivains. Elle a renouvelé le roman par la magie de son style et la spontanéité de ses impressions.
Il n'y a pas d'entreprise plus difficile que de tirer une pièce d'un roman littéraire. Ceux de
Colette présentent d'invraisemblables obstacles pourtant ils tentent l'auteur dramatique car ils débordent de sensibilité et d'humanité.
"
La vagabonde", comédie en quatre acte, est une adaptation du roman.
C'est la deuxième collaboration entre
Colette et
Léopold Marchand. Ils ont créé, en 1922, "
Chéri" sur la scène du théâtre Michel. Ce fut une réussite et le succès était au rendez-vous.
La pièce de théâtre, "
La vagabonde", est assez différente du
roman. Ses deux auteurs ont ajouté à l'analyse psychologique du livre, subtile et profonde mais pauvre en matière théâtrale, un élément pittoresque emprunté à un autre de ses ouvrages, "
L'envers du music-hall". Cet élément supplémentaire est la pauvre bohème des mimes, des petites danseuses et des acrobates, décrit avec un étonnant mélange de réalisme, d'humour et de pitié.
Dans la pièce se retrouve le roman tout entier. Et c'est l'un des plus beaux où s'analyse l'âme d'une femme partagée entre son désir et sa crainte de l'amour.
Harry Baur, l'inoubliable "Volpone" de Maurice Tourneur, fut acclamé dans le rôle de Maxime tandis que Cora la Parcerie, la formidable actrice, poétesse et directrice de théâtre triomphait dans celui de "
la vagabonde".