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EAN : 978B003X83DJQ
EDITIONS LIVRE DE POCHE N°373 (01/01/1990)
3.55/5   166 notes
Résumé :
Donner à voir des manuscrits, d'ordinaire inaccessibles, rendre visible le travail d'écriture, en montrant les mouvements d'une plume qui trace, rature, avance, revient, dessine parfois, se glisse entre les lignes ou envahit les marges, tel est le propos de la collection Manuscrits.

Chaque volume présente un dossier manuscrit complet reproduit en fac-similé. En regard, page à page, une transcription aide au déchiffrement. La préface éclaire les proce... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (35) Voir plus Ajouter une critique
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Je devrais lire plus souvent des livres de Colette ; de ses tourments le coeur en serait apaisé.
Sido, c'est un texte très court de Sidonie-Gabrielle Colette, mais éblouissant de lumière, celle de l'enfance et des jours qui ne reviendront plus. C'est en quelque sorte une autobiographie, mais une autobiographie romancée, à peine j'imagine, avec le regard chaleureux et émouvant de Colette posé sur les siens, qui se souvient lorsqu'elle était une petite fille de dix ans...
Et parmi les siens, il y a sa mère Sido tant aimée, qu'elle fait revivre ici.
Entrer dans ce récit, c'est pousser une porte, c'est entrer dans le jardin de Sido qui la faisait souveraine de ce lieu. Entrer dans ce récit, c'est sautiller au-dessus d'un gué parmi les ancolies, les roses et les clématites.
On aime brusquement Sido, cette femme parfois excessive et piquante, son visage sauvage et libre de toute contrainte, ses yeux mêlés de charité et d'humanité. On aime Sido parce qu'elle devient à son tour notre mère, on l'aime dans ses gestes où elle reprend vie chaque fois qu'elle touche de la terre, on l'aime parce qu'on se dit que Colette sans doute lui ressemblait un peu, avait de qui tenir...
Mais derrière la figure maternelle, il y a les autres personnages de la famille, et comment ne pas aimer non plus ce père qu'elle nomme le Capitaine, revenu de la guerre estropié avec désormais un pied unique, cet homme qu'elle décrit comme poète citadin, drapé de dignité, de fierté et de grivoiserie lorsqu'il racontait des anecdotes à table.
Ce père aimant, cet homme aimant Sido, qui resta épris d'elle, longtemps après l'âge de l'amour. Mais y a-t-il un âge où passe l'amour ? Au péage de l'après-midi qui venait juste après le déjeuner sous le vieux frêne pleureur, il était fidèle à ce rituel du baiser posé délicatement sur la main de Sido apportant le café...
La mélancolie serait-elle une maladie de l'enfance ? Sido, c'est l'enfance heureuse de Colette, c'est l'odeur de ce jardin mêlé de grâce et de désordre, une odeur d'été avec le bleu des hortensias et le bruit du vent dans les ramures des arbres, c'est cette maison dans la campagne de l'Yonne. Ce sont les dimanches où la famille partait à la campagne et cette vieille jument noire qui tirait la voiture, tandis que le chien un peu fou jappait en courant derrière...
Et puis il y avait les autres enfants, les demi-frères, qu'elle nomme avec tendresse les sauvages et cette demie-soeur l'aînée de tous, un peu inconnue dont Colette dit si peu de chose, effleure à peine le souvenir, mais on pressent déjà la petite douleur de cette grande soeur qui ne sera jamais heureuse dans ce mariage qui la happa trop vite, trop jeune, brutalement...
J'imagine Colette se penchant sur son cahier, je l'imagine se souvenir, écrire ces pages inondées de poésie presque cinquante ans plus tard, le coeur peut-être serré, apaisé sans doute aussi un peu, avec tous les regrets de ne pas avoir si bien connu cette mère aimante.
Alors je referme la porte de ce jardin, je m'en vais sur la pointe des pieds, j'entends derrière moi le petit chien qui jappe, le Capitaine qui raconte des histoires grivoises. Sido alors peut-être le gronde ou fait semblant pour la plus grande joie des enfants...
Sido est une page de bonheur et de nostalgie dans l'oeuvre si belle de Colette.
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Livre pendant à La Maison de Claudine; Colette, alias Bel-Gazou, signe ici la renaissance de la mère de son enfance. "Sido", aimée du capitaine Colette revenu estropié de la guerre. Évocation teintée d'une fine nostalgie qui jamais trop ne s'appesantit. Derrière la figure maternelle se dessinent le père, la soeur aînée lointaine quoique présente, les deux grands frères, la maison de l'Yonne. Ou plutôt son jardin dans lequel règne Sido, moderne Démeter que Colette esquisse redressant un tuteur, contemplant un merle dévorer les cerises, se dressant à l'écoute des vents pour déterminer les changements de temps. Quasi en guerre contre le vent d'Est, "l'ennemi", celui qui a déjà amené la neige en plein été.

Il y a une infinie poésie dans les souvenirs de Colette. La Nature y est célébrée avec tout un vocabulaire proche du paganisme. Entité grande et immuable - du moins par réminiscence - qui se retrouve également dans plusieurs des courts récits qui constituent Les Vrilles de la Vigne succédant aux chapitres de Sido. L'auteure y dépeint de petites tranches de sa vie adulte, scénettes parfois vues à travers le regard de ses animaux. Chiens et chats sont très présents dans ces textes. Tour à tour mélancolique et enjouée, contemplative ou pleine d'ironie,  Colette fait montre de son talent à recréer en quelques phrases des ambiances, des existences, des anecdotes. Parfois piquante sa plume ne devient jamais méchante. Elle offre à de petits riens un écrin somptueux par la grâce de son écriture vive et imagée.

Ce recueil est pour moi une nouvelle bonne trouvaille dans une boîte à livres. Il se déguste non pas d'une traite mais en prenant son temps; chaque récit pareil à un délectable chocolat dans la boîte d'un maître chocolatier.
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Une belle critique sur Babelio m'a amené à relire ce court récit de Colette.
Comme il y a beaucoup de critiques magnifiques sur le site, je vais faire court et essayer de donner mon ressenti.

Un texte absolument merveilleux, plein de nostalgie, dans lequel Colette évoque sa mère « Sido », son père, « le capitaine » et ses frères « les sauvages ».

Et à la relecture, j'ai revu une mère admirée, vénérée, comme une déesse du jardin familial, omnisciente sur les plantes et sur le temps qu'il va faire, mais à la fois tendre et dure avec sa fille, ses filles même puisque l'aînée, une demi-soeur plus âgée et qui ne vit plus dans le domicile familial est considérée avec mépris. Mais même avec la petite dernière, on sent entre les lignes que cette mère aime plus ses fils que ses filles. Et que sa fille a voulu magnifier une relation qui était sans doute plus difficile. Cela ne m'était pas apparu aussi fort à ma première lecture qui, il est vrai, remonte à pas mal d'années.

Le portrait du père est plus touchant finalement, moins idéalisé que celui de Sido, plus fin, plus nuancé. Un père amputé à la guerre, qui occupe un emploi subalterne, mais cultivé, un écrivain fantasmé mais qui n'écrira pas, un père qui cache sous une légèreté de façade, une grande timidité et une difficulté à communiquer avec sa fille.
Un père qui aime follement Sido, même si beaucoup de pudeur habite leur relation. Et un père dont Colette découvrira après sa mort toute la tendresse.

Et enfin les frères « les sauvages », en fait son demi- frère Achille, le plus plus âgé qui deviendra médecin, et son frère Léo très doué pour la musique mais qui n'en fera pas son métier, mais son passe-temps. Les souvenirs des «aventures » et de la soif de lectures de ces deux-là, ont un goût de paradis perdu, d'autant que s'y insère un dialogue nostalgique entre la narratrice et le frère Léo, devenu vieux, frère qui vient y raconter, avec détails, sa visite au village de l'enfance.

En conclusion, une évocation magnifique, pleine de sensibilité, émouvante, et avec cette si belle écriture, du « temps perdu ».
Et une invite à ce que je relise Les vrilles de la vigne.
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Cela faisait un moment que je me demandais pour quoi ce Colette-là, et pas un autre, figurait sur une liste d'oeuvres marquantes du 20ème siècle; je connaissais Claudine, piquante mais pas inoubliable. Ici, on est effectivement un cran au-dessus.
Les souvenirs d'enfance sont légion dans notre patrimoine littéraire, de Pagnol à Bazin. Sido a toute sa place dans ce patrimoine, mais avec quelque chose en plus, plusieurs choses même: une langue époustouflante de lumière et d'acuité, une capacité à convoquer des images avec une telle précision qu'elle ne peut qu'emporter son lecteur au coeur même de la scène évoquée, et surtout un personnage solaire, extravagant dans sa banalité de femme et mère : Sido, la mère de Colette, avec ses yeux qui voient tout, ses capteurs qui sentent tout, l'évidence de son bon sens, et la force de sa personnalité qui irradie chaque page. Ce personnage est une rencontre merveilleuse, vivifiante, et c'est effectivement un tour de force de la part de Colette que d'avoir su le reconstituer à l'âge mûr, en même temps que ses propres sensations d'enfant.
J'ai été très sensible également au personnage du père, cachant sous une bonhomie élégante la souffrance psychique profonde résultant de ses blessures de guerre.
Un moment de grâce que cette lecture qui fait revivre un coin de campagne et un temps révolu.
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Dans cette autobiographie romancée que Colette écrivit à 56 ans, elle évoque successivement sa mère Sido, sorte de déesse omnisciente, le Capitaine, son père, homme tendre et distant, cachant sa mélancolie sous des fredonnements enjoués, ses deux frères "les sauvages" et sa demie-soeur, isolée au sein de la famille, probablement malheureuse, sans doute mal aimée, qui s'évadera dans un mariage désapprouvé.

On connaît l'importance du personnage de Sido dans la généalogie de l'oeuvre de Colette, mère recréée, sublimée, toute-puissante et inspiratrice. Je l'ai ressentie comme une présence incontournable, se mêlant de tout, surveillant tout, sachant tout, écrasante. Elle apparaît plus dévouée à ses fils qu'aimante envers ses filles, oublieuse de l'aînée et alternant mots tendres et rosseries envers la plus jeune. Bien sûr, le personnage est puissant et solaire, mais ridiculement sentencieux et extrêmement conventionnel malgré les efforts de l'auteure pour lui conférer une tournure d'esprit originale. Cette femme que Colette a voulu nous montrer comme cosmique et en fusion avec la nature pour en faire sa source de création, était, on peut le supposer aussi, et cela transparaît à travers les évocations, une femme piquante tenant son entourage sous sa férule.

Son époux au contraire, le Capitaine attire aussitôt la sympathie : il est un mutilé de la grande guerre où il perdit une jambe, décoré et devenu percepteur de sa commune, politicien raté, écrivain fantasmé, médiocre gestionnaire de ses affaires ; mais adroit de ses mains, excellent nageur malgré son handicap, un être doux et secret, époux probablement fidèle, jouant patiemment le jeu de la paternité sans y paraître vraiment investi tant le véritable centre de son univers était son épouse, Sido. Malgré tout aimant ses enfants, et valorisant surtout sa cadette : ayant remarqué très tôt ses capacités intellectuelles, il lui soumettait ses discours de politicien local pour avis.

Les portraits des deux frères de l'auteure sont remplis de tendresse et dignes de la grande littérature. Que dire enfin de sa pauvre soeur aînée, mal aimée, mal mariée, et dont on sait qu'elle finira pas se suicider ?

Voilà donc en plus des bois et du terroir bourguignon qu'elle aimera à la folie, le terreau humain où Colette assoira sa création.

Un grand style sert cette oeuvre clé : Sido est l'un des plus beau livre de Colette, et aussi l'un des plus courts.
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Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
Oh ! Aimable vie policée de nos jardins ! Courtoisie, aménité de potager à " fleuriste " et de bosquet à basse-cour ! Quel mal jamais fût venu par-dessus un espalier mitoyen, le long des faîtières en dalles plates cimentées de lichen et d'orpin brûlant, boulevard des chats et des chattes ? De l'autre côté, sur la rue, les enfants insolents musaient, jouaient aux billes, troussaient leurs jupons, au-dessus du ruisseau ; les voisins se dévisageaient et jetaient une petite malédiction, un rire, une épluchure dans le sillage de chaque passant, les hommes fumaient sur les seuils et crachaient... Gris de fer, à grands volets décolorés, notre façade à nous ne s'entrouvrait que sur mes gammes malhabiles, un aboiement de chien répondant aux coups de sonnette, et le chant des serins verts en cage.
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Mais que tu as donc l'air bête aujourd'hui, ma fille ! ... D'ailleurs tu es beaucoup plus jolie quand tu as l'air bête. C'est dommage que cela t'arrive si rarement. Tu pèches déjà, comme moi, par excès d'expression. J'ai toujours l'air, quand j'égare mondé, d'avoir perdu un parent bien-aimé... Quand tu prends l'air bête, tu as les yeux plus grand, la bouche entrouverte, et tu rajeunis... A quoi penses-tu ?

- A rien, maman...

- Je ne te crois pas, mais c'est très bien imité. Vraiment très bien, ma fille. Tu es un miracle de gentillesse et de fadeur !
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À ce moment, son visage, enflammé de foi, de curiosité universelle, disparaissait sous un autre visage plus âgé, résigné et doux. Elle savait que je ne résisterais pas, moi non plus, au désir de savoir, et qu'à son exemple je fouillerais, jusqu'à son secret, la terre du pot à fleurs. Elle savait que j'étais sa fille, moi qui ne pensais pas à notre ressemblance, et que déjà je cherchais, enfant, ce choc, ce battement accéléré du cœur, cet arrêt du souffle : la solitaire ivresse du chercheur de trésor. Un trésor, ce n'est pas seulement ce que couvent la terre, le roc ou la vague. La chimère de l'or et de la gemme n'est qu'un informe mirage : il importe seulement que je dénude et hisse au jour ce que l'œil humain n'a pas, avant le mien, touché...
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Je ne peux m'empêcher de rire en constatant combien tous les Parisiens sont fiers d'habiter Paris, les vrais parce qu'ils assimilent cela à un titre nobiliaire, les faux parce qu'ils s'imaginent avoir monté en grade.
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Ouvre la fenêtre et la porte, et courons vers la fin dorée de ce jour gris, car je veux cueillir sur la grève les fleurs de ton pays apportées par la vague, - fleurs impérissables effeuillées en pétales de nacre rose, ô coquillages...

Jour gris
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