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Critique de SZRAMOWO


Tout pourrait séparer Sophie et Djilali, elle la fille de Pieds-Noirs née en France qui a de l'Algérie la vision mythique et fantasmée de ses parents exilés de 1962, lui l'enfant du bled qui a connu le joug des colons, mais aussi le sacerdoce de son instituteur Albert Gounelle.
Sophie vit maintenant en Suisse et Djilali en France.
Dans ce long échange épistolaire de seize lettres ils cherchent ce qui les rapproche, ils échangent leur vision de ce pays, ils veulent s'affranchir des clichés, regarder l'avenir en dépassant le passé, « (…) si nous passions le reste de nos existences à opposer les mémoires, comme le font les ultras des deux rives, notre histoire commune en s'écrirait pas. »
Entre celui qui est né dans un pays qui n'existe plus, dont il ne peut que rêver ou se souvenir, et celui qui ne peut vivre dans le pays pour lequel il s'est battu, il existe un point commun, ils ont perdu une part de leur identité, aux yeux des autres ils sont des étrangers : « L'Algérie est devenue un espace étriqué où je ne sais plus marcher au rythme des autres. » ;
En effet « Parler de réparations, de justice, c'est encore revenir à la blessure toujours cuisante. », nous dit Djilali.
Djilali cite sa mère, « (…) cette indépendance, ça se termine quand ? », incite chaque acteur de ce conflit à « Vider son sac certes, puis le remplir des germes du futur. »
Sophie relie ce qu'ont vécu ses parents à l'actualité « Les migrants d'aujourd'hui incarnaient des pages douloureuses du passé des miens. »
Djilali est plus pragmatique il déclare : « Arrêtez de célébrer des massacres, Arrêtez de célébrer des noms, Arrêtez de célébrer des morts. » et vilipende-les « (…) visions souvent partisanes, toujours partielles car oublieuses des petites histoires, des destins des gens. »
Un livre qui n'est pas sans rappeler la sensibilité de Jean Pélégri dans Ma mère l'Algérie quand il déclare « (...) on a besoin de celui qui est d'une autre langue et d'une autre foi pour découvrir l'autre côté de la réalité, l'autre nom des choses (...) C'est la différence qui nous enseigne et nous agrandit. »
Comme Sophie et Djilali, Jean Pélégri ne pouvait partager la vision manichéenne des deux Algérie qui s'affrontaient à coup d'attentats, « (...) où chacun justifiait ses violences par celles des autres, (...) », et qui souvent, « (...) s'ils parlaient du même paysage, ne parlaient pas toujours de la même Algérie. »
Un livre émouvant qui donne une vision plus légitime et plus humaine de la vie des multiples communautés qui ont vécu en Algérie et ont contribué aussi à son histoire.
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