1921- Australie- Nouvelle Galles du Sud
Avec ce premier roman,
Sous la terre,
Courtney Collins nous entraîne dans une chevauchée à travers l'Outback pour un voyage plein de rage : l'héroïne, Jessie, après avoir assassiné Fitz, homme violent, devenu son époux avant d' avoir été son employeur à sa sortie de prison, incendie son ranch, et accouche dans la foulée d'un bébé prématuré, décédé dans la même nuit.
C'est par la voix de ce bébé enseveli
sous la terre, narrateur omniscient, que l'histoire de Jessie, sa mère, nous est conté : « La Terre, telle que je la perçois, est tassée à certains endroits, et brisée à d'autres. Les événements semblent donc se télescoper . Ainsi , la mise en terre et la mise au monde. Ce n'est pas la beauté lisse et ondoyante du ruban qui se déploie. Non. La terre se gondole sous l'effet de toutes les histoires qu'elle recèle, histoires de ceux qui vagissent et de ceux qui crèvent. »
Avec cette voix, c'est la voix de la terre que l'on écoute, et aussi celle du sang qui coule dans les veines de sa mère, Jessie, et qui elle, cherche en cavalant sur sa monture le sillage de l'oubli : « Malgré l'épaisseur du maquis et l'aspect infranchissable de la pente, elle remonta sur Houdini et repartit vers le haut pays, déterminée à échapper à tous les fantômes qui la poursuivaient. »
A ses trousses, le sergent Andrew Barlow, héroïnomane et, son amant, Jack Brown, gardien de troupeau sur le ranch de Fitz, devenu depuis peu le traqueur du sergent…
« L'homme prétendait avoir vu Jessie. Selon ses propres mots : « Elle rôdait dans la brousse comme une chienne ou une autre bête, labourant la terre avec ses griffes, avec une tête de folle qu'on voyait même pas à travers les cheveux, et si j'avais pu charger ce flingue un peu plus vite, je me serais fait un plaisir de la buter. »
Jessie trouvera-t-elle le répit dans sa fuite effrénée alors qu'autour d'elle sonne l'hallali ?
Afin de vous laisser le plaisir de découvrir la suite de l'aventure et profiter de ses surprises je n'en dirai pas plus sur les faits.
Un souffle lyrique se lève sur le relief accidenté des Blue Mountains, et la beauté sauvage des grands espaces accompagne cette course libératrice dans l'espérance de jours meilleurs :
« Assise au bord du ravin, elle avait l'impression que son passé n'était ni derrière elle ni dessous, mais partout à la fois, vivant à travers elle, et que le gamin et Joe et Bill étaient exactement comme des personnes qu'elle avait déjà connues, et que là, dans la montagne, il y avait quelque chose comme une nouvelle chance, une chance d'aimer, et de bien aimer, dont elle avait encore à sonder les limites. »
Un premier roman décoiffant, dépaysant, empli de sueur et de poussière, de sang et de soif, dans une contrée rude et vierge que seuls les aborigènes ont su apprivoisé en vivant en harmonie avec la nature alors qu'au même moment les démobilisés de la Grande guerre à qui on avait attribué des parcelles meurent à petit feu ou deviennent à moitié fous, démunis de toute expérience.
Un livre qui se dévore et qui fait référence à l'histoire de la première bushranger (hors-la-loi), Jessie Hickman, dresseuse et voleuse de chevaux dans laquelle l'auteur a puisé son inspiration pour évoquer l'héroïne : Jessie, une jeune femme qui s'affranchit et s'émancipe malgré un univers peuplé d'hommes rustres et violents et un milieu naturel rude et hostile.
Pour suivre Jessie dans son échappée de cavalcade en cavale, outre un canasson, il vous faudra faire preuve de patience, de détermination, de courage et d'adresse, mais aussi apprendre à décrypter le ciel étoilé.
A vos étriers pour entreprendre cette chevauchée au grand galop, dans le bruit et la poussière des sabots...