"En ce bout du monde, la nature est hostile et violente".
Cette nature paradisiaque,lorsque les criques émiettent la cordillère, lorsque les lichens fleuris de rouge percent la neige; poétique lorsque "le disque rouge de la lune s'élève dans un ciel limpide,alors que l'Agamaca fendait les eaux tel un couteau déchirant un voile de soie"; Alejandro Silva et son frère Manuel, partis pour un long voyage en mer du Chili jusqu'au pôle sud, la verront aussi déchainée ou glacée telle un piège à rats refermant ses crocs sur les chairs humaines pour les broyer, impitoyablement.
Dans ce roman d'aventure,
Antartida, nous retrouvons Alejandro (radiotélégraphiste), qui, "gamin, s'était embarqué clandestinement sur le Baguenado" (voir
le dernier mousse). Avec son frère, moult péripéties les attendent, car le
Cap Horn se passe souvent avec pertes et fracas.
Ce qui est intéressant, c'est que chaque chapitre est une courte nouvelle, comme l'étape d'un chemin de croix. Ici, c'est l'histoire du naufrage du "Flora"et du sacrifice de son capitaine, plus loin les difficiles manoeuvres pour éviter une collision, puis on rentre dans la caverne d'un ermite Cauquenes dont les bêtes ont été volées. On passe de la légende du monstre qui a dévoré les "araignées de mer" à celle du "manchot fantôme" jusqu'au "paradis des loutres" qui se fait parfois enfer.
Antartida est dépaysant (les tentes sont en peau de phoque, on déguste du "robalo salé", on croise des "Yaghans", on se faufile à travers des parois de mica ou de cuivre.
Ce roman d'aventure est une ode à la nature souveraine, avec ses "paysages féériques" et ses animaux en voie de disparition (baleines bleues,lions de mer,phoques,manchots....), à l'homme à la fois bon et mauvais et à la vie car "la vie appartient aux vivants".
Grâce à l'écriture imagée de
Francisco Coloane, romancier et nouvelliste chilien, c'est un véritable film qui se déroule sous nos yeux digne des paysages enchantés et enchanteurs des plus beaux Ushuaia!