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Damien Roudeau (Autre)Boris Cyrulnik (Autre)
EAN : 9782330151430
96 pages
Actes Sud (05/05/2021)
4.32/5   14 notes
Résumé :
12 jeunes migrants, filles et garçons, ayant quitté leur terre et les êtres qui leur sont chers pour un Eldorado qui, comme le dit Boris Cyrulnik, n'a plus rien de doré, témoignent ici de ce qui leur manque le plus. Et leur réponse est presque à l'unanimité : "Ma maman" ! Les bénéfices de l'ouvrage iront à une association qui vient en aide aux mineurs isolés étrangers (MIE).
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
J'ai apprécié cette lecture, rapide mais pas facile. La préface de Boris Cyrulnik illustre bien le sujet sensible : "ces voyages ne sont pas des explorations difficiles et épanouissantes, ce sont des pertes irrémédiables". J'ai eu connaissance par des traductions que j'ai faites de la revue Nature du vécu traumatique des migrants, notamment les jeunes ; j'ai conscience aussi, comme le dit Marie-Françoise Colombani que, quoi qu'on en pense, on pourra de moins en moins empêcher ces mouvements migratoires à l'avenir.

Si une chose doit être sûre, au travers des témoignages de ces jeunes, c'est qu'on ne se lance pas dans ce périple pour des raisons fantaisistes, ni pour l'appel d'un Eldorado où l'on s'enrichirait facilement. Certes, ces enfants à 13 ou 15 ans ne savaient pas grand-chose de l'Europe, souvent même ils s'engageaient dans le départ sans savoir où ils iraient, par concours de circonstances, et toujours pour fuir une situation bien plus dure, où ils n'auraient sans doute pas fait long feu.

Ils sont 13 jeunes, 3 filles et 10 garçons, provenant essentiellement de pays d'Afrique, ou d'Egypte et d'Afghanistan pour deux d'entre eux. Ce sont des pays où ils connaissaient la guerre, l'extrême pauvreté ; ils ont souvent perdu leur père et leur situation a dégénéré ensuite - manque de ressources, arrêt de l'école pour travailler, exploitation par leur famille. Les filles ont fui le mariage forcé, l'excision à l'âge adulte pour l'une. On voit bien en filigrane la condition des femmes, les mères, et c'est poignant. Parfois elles ont aidé et encouragé leur enfant à partir, souvent ils ont dû fuir sans la prévenir, et elle n'a eu des nouvelles que longtemps après. J'ai eu le coeur serré en me disant que si la proportion de filles était aussi faible, c'est qu'elles sont davantage prisonnières dans leur pays, sans même cette option de se sauver.

Ces enfants ont tout traversé, dans des conditions dantesques : le désert, les flots où nombre de gens se noyaient autour d'eux, les camps de réfugiés, quand ce n'est pas les mauvais traitements, le viol... Ils ont affronté la violence, le vol de leurs maigres ressources, le travail "gratuit" pour pouvoir s'embarquer. Certains, handicapés, ont dû dépasser leurs forces ; ils ont tous fait preuve d'un courage et d'une résilience hors du commun. C'est moi qui le dis, parce qu'eux n'évoquent que leur chance, leur espoir de s'insérer, d'avoir leurs papiers, et de pouvoir aider un peu leur famille en envoyant de l'argent. Je pense qu'on imagine, on s'informe, on se représente les conditions de vie des migrants, mais il reste difficile pour beaucoup de vraiment ressentir ce qu'ils traversent, se projeter à leur place. Peut-être un livre comme celui-ci pourra-t-il aider, mais peut-être aussi fera-t-il simplement plus souffrir d'impuissance et d'angoisse un jeune public déjà affecté par les conditions qui nous entourent.
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"Celle que j'ai laissée" est un très beau recueil de témoignages de mineurs victimes de l'exil. Ces textes sont puissants par leur oralité. Rien n'est caché. Mineurs aux moments où ils décident de fuir la pauvreté, la violence, la faim, ces garçons et filles racontent leurs périples à travers l'Afrique et l'Europe dans l'espoir d'une vie meilleure. Ils s'arrachent à leur famille, à leur terre, à leur culture. Ils abandonnent une mère, des frères et soeurs afin d'avoir une existence, un avenir plus cléments
Il faut un grand courage pour décider de tout quitter et d'affronter l'inconnu et le danger. Pour ces jeunes, le connu est synonyme de mort et l'inconnu celui de l'espérance. Beaucoup d'entre eux meurent avant d'avoir atteint l'autre rive. Ce sont des témoignages bouleversant et d'une grande gravité qui mettent aussi en scène des personnes, des associations qui interviennent parfois dans l'illégalité pour venir en aide à ces jeunes apatrides.
Celle qu'ils ont laissé est souvent la mère, et parfois la grand-mère. Pour les témoignages féminins, ce qui les poussent à partir, c'est le mariage forcé.
J'ai été touché par l'histoire de Yassis d'Afganistan qui a dû fuir face aux talibans et aux attentats. Il travaillait comme traducteur pour l'Otan. C'est très dur de lire que Yassis se sent un étranger partout, qu'il n'aura plus jamais de pays.
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13 ados, dont 3 filles. 13 destins ... 'Être né quelque part ': majoritairement en Afrique. Des enfants chahutés par la vie, parents séparés ou décédés, attentats, extrême précarité, descolarisation, parce que l'école est payante en Afrique, mariage forcé, excision, violence ... Autant d'histoires dont le point commun est la fuite pour l'illusion d'un monde meilleur en Europe, en France en particulier. Des mômes perdus, laissés à la rue ici tant que leur minorité n'est pas reconnue. Les associations prennent le relais des pouvoirs publics défaillants, comme Les Midis du MIE (Mineurs Isolés Étrangers).
Un petit ouvrage sous forme de témoignages qui crèvent le coeur !! À lire dès 13-14 ans...
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12 adolescents témoignent : leur situation dans leur pays d'origine, les raisons de leur départ, les conditions, les passeurs, la violence, les viols... On y découvre la pauvreté, les conflits, les relations familiales, mais aussi la solidarité parfois, et l'amour, celui d'une mère le plus souvent, d'une grand-mère, et la résilience, l'espoir... A lire et faire lire de toute urgence !!
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Douze petits chapitres pour raconter une partie de la vie de treize jeunes (car parmi eux il y a deux frères !) qui ont quitté leur pays avec l'espoir de trouver une existence plus digne et un accueil dans notre pays.
Leurs destins sont différents, mais ils viennent souvent de familles déchirées. Et leur trajet vers la France est souvent marqué par les mêmes galères. Ils cherchent maintenant à acquérir un métier, pour redonner de la fierté à "celle qu'ils ont laissée" et qui leur manque le plus : leur mère !
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Elle avait de la peine pour moi et, ce jour-là, c'est moi qui l'ai consolée. A partir de là, je me suis dit que la vie était un combat, que je le gagnerais et que je ferais des choses pour que ma mère se sente bien, qu'elle puisse manger de la viande, du poulet, qu'elle puisse bien s'habiller, et tout, et tout.

Je voulais qu'elle ne manque de rien. Je me suis juré que tout ce que je ferais et tout ce que j'aurais dans la vie ça serait pour elle. C'est elle qui me manque le plus.

Page 19.
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Il existe aujourd'hui sur la terre cent à deux cents guerres, un terrorisme planétaire et une émigration climatique qui déplacera 2000 millions de personnes. On compte déjà plus de 60 millions d'enfants migrants, sans famille, mutilés ou traumatisés.
La migration, qui est une survie pour les émigrés, nécessite-t-elle ce prix exorbitant ? Alors que c'est une chance pour le pays d'accueil qui reçoit de jeunes bras de travailleurs, écoute de nouvelles musiques, goûte de nouvelles cuisines et découvre de nouveaux concepts qui font évoluer la culture. Il en est ainsi depuis que les êtres humains sont sur terre. Il ne faut pas que le terrorisme s'installe comme une entreprise mondiale totalitaire qui empêcherait cette évolution, en forçant l'émigration et en construisant des camps.
(Boris Cyrulnik, dans la préface)
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Ma grand-mère nous a appris beaucoup de choses, on faisait tout ensemble. Nous allions acheter de grands sacs de charbon et, après, on le mettait dans de petits sacs que nous vendions au marché. Ma grand-mère parlait le kilanga, et elle chantait en kikongo, la langue de son village, une langue difficile.
C'étaient des chants qui parlaient des dieux.

Page 10.
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Quand je leur dis qu'on achète des trucs tout faits, elles [leurs mères] crient : "Nooon ! Mais pourquoi vous ne faites pas la cuisine ?"
On a essayé mais ce n'est jamais aussi bon. Elles, elles la font par amour, et, nous, simplement pour manger.

Page 41.
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Mon père me chantait souvent la chanson de la France, l'hymne national. Il devait l'avoir appris quand il était petit, à l'école. Il y avait beaucoup de souvenirs pour lui dans cette chanson. Il me l'avait copiée sur une feuille et il était en train de me l'apprendre quand il est mort. J'ai perdu la feuille. il me parlait aussi de la montagne du Mont-Blanc : "Là-bas, c'est la neige." Moi, je rêvais de la voir. Aujourd'hui, je l'ai vue sur le Mont-Blanc.
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Videos de Marie-Françoise Colombani (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marie-Françoise Colombani
« Ça a commencé en posant cette question : "Qui ou quoi te manque le plus ?" Et Clarisse et moi, on a été vraiment très très très émues, parce qu'on a des enfants presque de cet âge, d'entendre à 99,99 % : "Ma maman". »
CELLE QUE J'AI LAISSÉE de Marie-Françoise Colombani et Clarisse Quillet, avec des illustrations de Damien Roudeau, en librairie le 5 mai 2021 : https://www.actes-sud.fr/catalogue/celle-que-jai-laissee
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