Les écrivains mettent une sonde au coeur du monde, Marie Corot et Nancy Guilbert ont sondé le coeur de deux adolescents blessés par la vie, sauf que leur roman s'adresse à tout le monde, et c'est là une de ses très nombreuses qualités.
C'est un véritable coup de foudre qui s'est opéré en moi dès les premières lignes de Deux secondes en moins. Mille merci donc à Babelio et aux Éditions Magnard de m'avoir proposée cette merveilleuse lecture. L'âge n'a rien à voir dans le plaisir des bons textes. En voici la preuve.
Il y a très très longtemps que je n'avais pas fait l'ascenseur émotionnel avec un livre, et pourtant, dans mes mains, le nombre de livres qui passe chaque année est très grand. Mais d'une telle qualité, je n'en découvre qu'un par an, deux... peut - être...
S'il vous plaît, ne réservez pas cette histoire au public adolescent, ce serait une erreur, car les deux voix adolescentes qui s'y racontent, qui disent la douleur, et toutes les étapes par lesquelles l'adversité les oblige à passer, c'est celle de tous ceux qui traversent un grand drame.
A quinze ans, à trente, à quarante (etc...) le travail d'acceptation, de deuil, en passant par le déni, par la révolte, entre autres étapes... se fait pareillement.
Deux secondes en moins est donc un texte universel.
Comme autre élément intéressant il y a la musique, elle est LE miroir de ses deux vies intérieures cassées, et parce qu'elle est thérapeutique, elle les maintient dans l'action, dans la concentration, dans l'échange, dans l'instant présent, dans le plaisir, dans le vivant. Grâce à quelques " magiciens " dont je ne dirai rien, car je ne spoile jamais mes lectures, on découvre, une fois de plus, que l'art maintient là, ici et maintenant, loin du néant.
Le grand mérite de cette histoire est également de nous rappeler l'espace de confiance dont ont besoin les adolescents. Nous les adultes voulons qu'ils vivent à notre rythme, ne les écoutons qu'au minimum parfois, et ne sommes souvent pas à même de mesurer les poids qui les écrasent. Marie Colot et Nancy Guilbert ont travaillé leur sujet. Grâce à elles, leurs personnages, qui s'expriment à la première personne, en alternance, ( Marie C. pour Igor et Nancy G. pour Rhéa ) ont une capacité d'analyse des rapports humains étonnante et subtile.
Aucun pathos, aucun moment mièvre n' est à relever. Ces dames ont la classe pour tricoter leur histoire qu'elles servent très délicatement grâce à une narration fluide, une plume vive et intelligente. Pas un mot de trop, tout est juste, leur écriture est réaliste et parle directement à notre conscience. Bravo !
Vous l'avez compris, une grande émotion maintenue tout le temps de la lecture est ainsi la trame principale de cette histoire marquante et bouleversante à faire circuler absolument autour de vous car Marie C. et Nancy G. ont tout simplement signé un livre ... le chant de la Vie.
Et on en a besoin, à tout âge !
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Igor est défiguré, la moitié du visage explosée dans un accident de voiture : deux secondes d'inattention de son père, au volant, ont suffi. Rhéa est en deuil de son petit copain, Alex, qui s'est donné la mort : deux secondes sur le bord d'un quai, avant de se jeter sous le train.
Igor et Rhéa, deux ados en plein naufrage qui ne se connaissent pas, ne se sont jamais rencontrés mais qu'unissent sans qu'ils le sachent encore un même amour pour la musique et le piano. Leurs routes, évidemment, vont se croiser, évidemment ils vont s'apprivoiser, devenir amis et se reconstruire peu à peu, sous le regard compréhensif, sensible et bienveillant d'un professeur de piano qui sera leur planche de salut.
L'intrigue est convenue, le récit ne prend jamais le lecteur par surprise, il y a des longueurs et guère de suspens… Mais l'histoire est jolie, pleine de tendresse et d'espoir et on s'attache volontiers à ces ados que la vie a cabossés et qui, pas à pas, séparément puis ensemble, apprennent à s'accepter, à pardonner et recommencent à vivre.
Un roman pour les ados - et qui devrait leur plaire - sur la résilience, le courage, la persévérance et la (re)construction de soi, un bel hommage à la musique et ses pouvoirs de guérison, et un livre plein de douceur qui célèbre l'amitié - et que j'ai bien aimé.
[Challenge MULTI-DÉFIS 2019]
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Première lecture de la sélection 3e/lycée du Prix des Incorruptibles 2019-2020…
Deux secondes en moins, juste deux secondes.
Alors, Igor n'aurait pas été défiguré dans un accident de voiture par une faute d'inattention de son père.
Alors Rhéa aurait-elle pu éviter que son petit ami Alex mette fin à ses jours.
Ce sont deux grands blessés de la vie, deux ados écorchés qui ne voient plus rien à quoi se raccrocher.
Solitaire, Igor se replie sur lui-même, se coupe des autres, rempli de haine et de colère envers son père.
Endeuillée, séparée de ses amis, Rhéa pense qu'elle ne sera jamais plus heureuse, jamais plus amoureuse, perdue dans la nouvelle ville où elle vient d'emménager avec sa mère et ses frères.
Et puis parfois, il demeure un espoir. Une personne, une musique… Et tout peut - peut-être - recommencer.
Roman sur le deuil et le handicap, ce livre aborde avec beaucoup de finesse le sujet des adolescents traumatisés par un événement qui a bouleversé leur vie. Igor et Rhéa sont emplis d'une grande colère qui les empêche d'avancer. le pouvoir rédempteur de la musique, autre grand thème de ce livre, mais aussi celui des mots, de la poésie, apparaît alors comme la solution inespérée, soufflée par un professeur de musique pour le moins bienfaisant qui apporte de la légèreté et un optimisme à toute épreuve à ces deux ados brisés. Les relations avec les parents, entre amour et rejet, sont également très bien analysées, très touchantes.
Suicide, culpabilité, pardon, souffrance physique et morale… les thèmes ne sont pas très gais dans ce roman dédié aux adolescents. Mais il faut aussi y voir l'apaisement des mots, l'emportement de la musique de Schubert, le courage et la persévérance, les frasques d'un perroquet et le réconfort d'un bon thé. Et la naissance d'une amitié très forte, pleine de tendresse.
Les chapitres très courts qui alternent les points de vue d'Igor et de Rhéa rendent la lecture très aisée.
Un beau roman, très émouvant.
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Deux secondes en moins est un roman à quatre mains pour faire entendre deux voix exprimant une riche palette d’émotions. Nancy Guilbert et Marie Colot ont su dépeindre avec justesse les maux de l’adolescence, en particulier, et ceux de la vie, en général.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citation :
Oui Alex, je sais, c'est bateau, mais il y a des phrases qui nous raccrochent à quelque chose de positif et nous font changer de point de vue.
C'est le cas avec celle de Fred, aujourd’hui,alors je la note ici
« Nulle pierre ne peut être polie sans friction, nul homme ne peut parfaire son expérience sans épreuve. (Confucius) »
Tu vois tu me disais que la vie c'était de la merde et j'avais beau t'expliquer que non,, qu'on était sur terre pour vivre des expériences qui nous feraient grandir… Toi tu ne voulais pas m'entendre.
Ou peut-être que tu ne pouvais pas m'entendre...
Si seulement tu avais pu rencontrer Fred….
Les adultes sont dévastés. Ils ne sont pas à la hauteur. Ils font semblant mais ne maitrisent rien du tout. Ils prononcent des phrases toutes prêtes et inutiles, les yeux gonflés de larmes, pour éviter des silences pesants, mais au fond, ils sont aussi perdus et démunis que nous. Des gamins effrayés devenus grands, mais qui n'ont toujours rien compris. Alors, pour se rassurer, ils s'inventent des codes et des cases, beaucoup de cases dans lesquelles ils rangent les gens soigneusement. Et quand tu n'entres dans aucune, on t'éjecte, un petit sourire, une tape sur l'épaule, mais on t'éjecte quand même...
Fantômes
"C'est pas vraiment des fantômes, mais leur absence est
tellement forte,
qu'elle crée en nous une présence qui nous rend faible,
nous supporte.
C'est ceux qu'on a aimé qui créaient un vide presque
tangible, car l'amour qu'on leur donnait est orphelin, il
cherche une cible.
Pour certains on le savait, on s'était préparé au pire,
mais d'autres ont disparu d'un seul coup, sans prévenir.
On leur a pas dit au revoir, ils sont partis sans notre
accord, car la mort a ses raisons que notre raison ignore.
Alors on s'est regroupé d'un réconfort utopiste. A
plusieurs on est plus fort mais on est pas moins triste.
C'est seul qu'on fait son deuil, car on est seul quand on
ressent. On apprivoise la douleur et la présence de nos
absents. "
[Texte de "Nos absents" de Grand Corps Malade cité dans le roman]
-Je ne sais pas ce qu’elle a. Fred m’a seulement dit qu’elle avait vécu un drame. Elle est peut-être aveugle, sourde et muette ou atteinte d’une maladie incurable. Tout est possible. Un beau duo d’éclopés, quoi ! A nous deux, on fera pitié, c’est sûr. Il ne manquera plus que le chapeau où jeter des pièces !
Mme Jacquelin se racle la gorge, gênée par mon franc-parler.
-Un drame n’est pas toujours lié au physique.
-Hein ?
-Igor, avec-vous envisagé qu’elle n’ait aucun problème apparent ?
-Qu’elle soit seulement tarée, c’est ça ?
-Qu’elle ait une douleur invisible, contrairement à la vôtre.
Sur ta route, tu as croisé des gens
Épatants, fascinants, émouvants,.
Ne fais pas la même erreur qu'avant.
Dis-leur que tu les aimes, qu'ils sont importants.
Nouvel horaire pour l'émission "Le coup de coeur des libraires" sur les Ondes de Sud Radio. Valérie Expert et Gérard Collard vous donne rendez-vous chaque dimanche à 13h30 pour vous faire découvrir leurs passions du moment !
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Rachilde, homme de lettres de Cécile Chabaud aux éditions Ecriture
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Ceux qui restent de Jean Michelin aux éditions Héloïse d'Ormesson
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L'Embuscade de Emilie Guillaumin aux éditions HarperCollins
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La Fille de l'ogre de Catherine Bardon aux éditions Les Escales
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La carte postale de Anne Berest aux éditions Livre de Poche
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Café sans filtre de Jean-Philippe Blondel aux éditions de l'Iconoclaste
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La Petite Menteuse de Pascale Robert-Diard aux éditions de l'Iconoclaste
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