Après avoir lu quatre ou cinq tomes des aventures de Publius Aurélius Statius, l'attrait de cette série commençait à s'estomper. Son originalité venait du fait que les enquêtes policières du fortuné sénateur se déroulaient à l'époque de l'Empire romain. Au point où j'en étais rendu, ça n'avait plus rien de nouveau, surtout que la plupart des intrigues précédentes tournaient autour de complots familiaux. Ça restait un divertissement léger et agréable, sans surprises. Et voilà que « In corpore sano » sort un tout petit peu des sentiers battus. Enfin !
Les services du sénateur Statius, qui résout des crimes à titre de justicier amateur, sont requis par son vieil ami Mordechaï, dont la fille est morte dans d'étranges circonstances. Enfin, on sort des intrigues habituelles qui concernaient des héritages ou des vengeances personnelles. Exit les grandes villas, on découvre le monde des juifs de la Rome antique et leur religion très différente des panthéons de l'époque. Statius et son fidèle secrétaire Castor sortent un peu de leur zone de confort et pour la première fois je me suis vraiment inquiété pour eux.
Un autre thème abordé dans ce roman est celui de l'avortement. Je savais que les moeurs à cette époque (pas enconre teintées de l'influence judéo-chrétienne) étaient plus libres mais je ne m'attendais pas à ce que cette opération soit si normale. Entendez bien, je ne dis pas non plus que c'était pratique courante. C'est toujours fascinant de redécouvrir que la civilisation romaine était si ouverte sur un tas de sujets. L'auteure Danila Comastri Montanari a su habilement entrelacer ces deux thèmes à son intrigue policière et ça me donne l'envie de continuer à lire les autres tomes de sa série. Je me dis que son style ne peut que s'améliorer.
- Dans ce domaine, vous nous avez donné matière à étudier au cours des derniers siècles, vous autres Romains!
Le patricien fut piqué au vif. Mnésarèthe était arrogante, comme tous les Héllènes, persuadés d'être les seuls individus civilisés dans un monde de Barbares ignares... La fréquentation de Castor l'avait habitué à pareille attitude. Il lança :
- Et vous nous avez tout appris, n'est-ce pas, aux pauvres soldats illettrés que nous sommes, des êtres qui ne savent qu'égorger au cours de la bataille!
- Je n'ai pas dit ça... Mais que serait Rome sans l'étreinte fécondatrice de l'Hellade? répliqua la femme d'un ton ironique.
- La maîtresse du monde, rien de moins!
- C'est vrai! Tout notre savoir ne nous a pas permis de conserver notre liberté, et nous sommes à présent vos sujets. [...]
Roger-Jon Ellory : " **** le silence"