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Critique de Erik35


NATURE, CITRON OU VINAIGRETTE AUX ÉCHALOTES ?

Dans son terrible - mais drôle de cynisme bien appliqué - ouvrage, son fameux "Le Dictionnaire du Diable", l'américain Ambrose Bierce définissait ainsi le fruit de mer désormais le plus présent sur nos tables en fin d'année : “Huître. Coquillage visqueux et glaireux, que la civilisation donne aux hommes la hardiesse de gober sans lui retirer ses entrailles ! Les coquilles sont quelquefois données aux pauvres.”

Evidemment, comme entrée en matière (molle) cette présentation n'est guère des plus engageantes, mais seuls les soi-disant gastronomes - ceux incapables de regarder dans le fond de l'huître sans tourner de l'oeil - et autres "végans" à la mode ne contrediront pas le satiriste. Car pour les autres - je m'y compte - le célèbre mollusque lamellibranche compte, inévitablement, parmi les mets de choix de toute table de fête conviviale et bien constituée !

C'est aussi, incontestablement, le sens des propos de cet écrivain délicat tout autant que rare et délicieux qu'était le regretté Hubert Comte, de vouloir rendre un vibrant hommage ostréicole à la Belon, aux portugaises ou japonaises, à la Marennes et autres Cancalaises de renom.

En quelques cent pages aussi savoureuses que bien choisies, aussi sérieuses qu'elles peuvent être emprunte d'une sensibilité élégamment surannée, de poésie, mais de caractère aussi, l'auteur de l'excellent A la découverte de l'art nous convie à découvrir, sous tous ses aspects possibles, Madame Ostrea. Tout intéresse en effet notre guide accompagnateur : de sa production sur les côtes de France à ses différentes espèces en passant par sa présence dans la peinture, les arts populaires, la poésie. Et de citer cette Fable de la Fontaine, le Rat et l'Huître, dont nous connaissons tous la conclusion sans le savoir puisqu'elle tient en ces quelques mots : "tel est pris qui croyait prendre" !

Hubert Comte rend aussi un hommage vibrant à ces hommes de l'ombre, ou, pour être plus exact, ces hommes et femmes des estrans, des baies vaseuses, des golfes ensablés, renouvelant sans cesse leur lourd labeur, le souvent exécuté à la fraîche et dans des conditions la plupart du temps éprouvantes pour le corps et pour l'esprit, qu'accomplissent donc quotidiennement les vénérables ostréiculteurs.

Economie, biologie, chimie, diététique (saviez-vous, par exemple, que si le scorbut vous gagne en des régions côtières peu propices aux fruits vitaminés, rien ne vaudra un bon régime à base de ces charmants bivalves, que sa composition globale est très proche de celle du lait de femme, et qu'elle est cependant très peu calorique ?)... La gastronomie n'est, bien évidemment pas oubliée, pas plus que son histoire générale tout autant que de charmantes petites anecdotes tant personnelles que populaires.

Un petit ouvrage qui se laisse déguster sans fin, avec ou sans vin blanc sec, aussi apéritif que peuvent l'être ces extraordinaires coquillages auxquels il était bon qu'on rendissent pour une fois toute la considération et les honneurs autres que strictement gustatifs que ceux-ci méritent habituellement.

Bon appétit et à votre santé !
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