L'Expédition française au Mexique est un peu tombée dans les oubliettes. A part dans quelques westerns, comme Major Dundee, Vera Cruz ou Sierra torride, et une bande dessinée signée Yann & Meynet, difficile d'en trouver une trace.
L'épopée mexicaine de Romulus Bonnaventure revient sur un épisode mal connu de l'Expédition, dont on aura surtout retenu l'exécution de Maximilien 1er, fusillé au Cerro de las Campanas en 1867.
Même si chez Raphaël Confiant, l'histoire n'est qu'une toile de fond, elle est quand même indissociable du parcours de Roro, esclave sur l'Habitation La Fleury, en Martinique. Devenu Romulus Bonnaventure, patronyme qu'il s'est lui -même choisi à l'Abolition de 1848, il est amoureux de la belle Péloponèse Beauséjour, qui a de nombreux amants.
L'expédition du Mexique va s'inviter dans la vie des protagonistes et dans celle de la Martinique tout entière, qui connaît déjà à l'époque de nombreux bouleversements. Les anciens esclaves vivent toujours dans des conditions difficiles, travaillant souvent pour leurs anciens maîtres et pour des sommes dérisoires, alors que ces derniers ont été dédommagés. La fin de l'esclavage voit l'arrivée de nouvelles populations, des engagés venus d'Afrique, d'Inde, de Chine, pour pallier le manque de main d'oeuvre dans les champs.
Maximilien 1er, son épouse Charlotte et leurs troupes composées de Français et de Polonais, de zouaves… font escale en Martinique, qui est devenue une base navale. Le Régime impérial décide d'envoyer un contingent antillais au Mexique, des soldats, des marins, des ouvriers. Les vies de Roro et de Péloponèse vont basculer: Romulus s'engage dans l'armée et la belle Beauséjour devient la dame de compagnie de Marie Charlotte Amélie. Il y a aussi Adrien Delfort, un mulâtre amoureux de la chabine et qui devient le secrétaire et le traducteur de l'empereur Maximilien.
Débute alors leur épopée mexicaine, Veracruz, les marécages des Terres chaudes, Tenochtitlan, le Popocatepetl, la bataille de Camerone, les tractations diplomatiques dans des palais pouilleux …
Raphaël Confiant structure son récit en quatre cercles pour raconter cette aventure picaresque , avec des points de vue différents, des extraits de lettres, de journaux, de rapports. L'épopée mexicaine de Romulus Bonnaventure montre à travers les péripéties vécues par un affranchi, l'échec de l'entreprise française au Mexique mais dépeint surtout une situation assez improbable. Comment d'anciens esclaves ont pu prendre les armes et s'engager aux côtés de ceux qui étaient leurs anciens maîtres, face à des Mexicains qui eux désiraient s'affranchir des Européens? Il ne s'agissait pas de « l'impôt du sang » à l'époque, les Martiniquais étaient volontaires.
Enlevé, érudit, humoristique même dans la tragédie, ce récit initiatique se lit d'une traite et tire de l'oubli un pan de l'histoire de France qui marqua plus particulièrement l'Ile aux fleurs.
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Si a tu ventana llega un burro flaco,
Trátalo con desprecio que es un Austriaco,
Ni siquiera lo mires por tu ventana,
Porque no quiere gringos la Mexicana.
(Si à ta fenêtre se présente un âne maigre,
Traite-le avec mépris car il s’agit d’un Autrichien,
Ne lui accorde même pas un regard par ta fenêtre
Parce que la femme mexicaine n’aime pas les gringos.)
L’ennemi juariste se trouvait donc tapi au coeur même de la capitale du nouvel empire….
Quasiment tout le 3e chasseurs d'Afrique était passé sur le ventre de Péloponnèse Beauséjour, patronyme certes octroyé (à l'Abolition), mais comme prédestiné, autrement connue sous l'appellation créole de Bel-Bonda à cause de ses formes callipyges qui interloquaient ceux qui la voyaient pour la première fois et qui les amenaient à s'extasier devant la générosité de Dame Nature à l'endroit de ladite bougresse. La malignité publique assurait même que le 2è chasseurs de France, qui avait fait escale plus tôt, ne s'était pas plaint de sa pudeur.
Vidéo de Raphaël Confiant