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Critique de Asterios


En regardant machinalement ma bibliothèque mon regard s'est posé par hasard sur la tranche fine du livre de Conrad dont le nom de l'auteur et le titre sont frappés en larges lettres majuscules sur un fond blanc. Tranche kitsch qui m'a tout de suite transporté dans le garage de mon grand-père, à Marseille d'où je tirais pendant les vacances d'été, d'une large armoire en formica rouge, toutes sortes de bouquins, des Achille Talon aux Bob Morane, et que je lisais avidement pendant que mon père faisait la sieste qui précédait usuellement nos sorties à la plage. C'est dans ces odeurs mêlées d'huile de moteur, d'essence et d'outils graissés que je faisais doucement grincer les battants de ma caverne d'Ali Baba afin de ne pas réveiller l'endormi qui mettrait fin à mes projets.
C'est pourtant en l'ouvrant que le livre révélait toute la richesse de ses senteurs inoubliables de livre de poche des années 60 et l'anticipation de joyeuses promesses de bonheur et d'émotions, qui exercent encore sur moi une telle attraction que je ne peux m'empêcher d'aller y perdre de temps en temps mon visage pour me repaitre de ses nostalgiques émanations.
J'engageais donc ma lecture dans de bonnes dispositions en regardant la couverture représentant un bateau dans la tourmente au milieu d'un océan déchainé.
Et nous voila à bord du vapeur le Nan-Shan à peine sorti des chantiers et placé sous le commandement du capitaine Mac Whirr, un homme peu loquace qui économise autant les mots que le combustible et les temps de trajet. C'est un type pratico-pratique. Il convient que la ligne droite est toujours le chemin le plus rapide entre deux points et gare à celui qui voudra se placer en travers de son chemin. C'est dans cet état d'esprit qu'il va affronter la pire tempête de sa vie, de face et sans détour. Et de toute façon, s'il l'avait évité comment aurait-il pu être sûr que c'était réellement une tempête aussi terrible? Rien n'aurait pu le prouver!
Mais le chaos gagne rapidement le navire qui est projeté dans tout les sens, uniquement maintenu sur sa route par les mécaniciens qui assurent la propulsion du vaisseau. Les échanges sont rudes et sans ambages entre les membres d'équipage, chaque décision doit être prise rapidement et ne pas être discutée. On entend le pont et la coque craquer sous le poids des vagues qui déferlent sur le navire quand Juke, le second du capitaine lui annonce que la cargaison de "coolies", ces travailleurs pauvres chinois commence à s'échauffer sérieusement sous l'effet du tangage du bateau et que si aucune action n'est menée rapidement, ils risquent de se massacrer les uns les autres. le commandant doit donc agir sur plusieurs fronts; celui de la tempête, du commandement du navire et de celui des hommes.
J'ai été particulièrement choqué du vocabulaire utilisé pour décrire la population de chinois parfois associée à la bête, à la sauvagerie, à l'infériorité. En maugréant contre la vision que le monde occidental pouvait avoir sur les peuples colonisés au début du 20ème siècle, je me suis tout à coup rappelé que je vivais toujours au 21ème siècle et que le statut de marchandise n'avait pas abandonné tous les hommes.
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