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EAN : 9782207255919
250 pages
Denoël (08/04/2004)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :

Bouleversé depuis la chute du communisme, le monde vacille encore sur ses bases. Sous la surface trompeuse des affrontements Nord-Sud ou Islam-Occident, quelles sont les tendances souterraines à l'œuvre dans les relations internationales ? Selon Robert Cooper, trois types d'Etats sont en train d'apparaîtreà côté de l'Inde, du Brésil ou de la Chine qui poursuivent ouvertement une politique de puissance nationale, cer... >Voir plus
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Robert Cooper a acquis une certaine notoriété en proposant dans ls années 90 une nouvelle grille de lecture du monde contemporain. Selon lui, l'ancien ordre mondial a disparu fin 1989. Il était fondé sur un dosage instable d'hégémonie et d'équilibre des forces. L'hégémonie impériale était le remède au chaos pré-étatique et au spectre hobbesien de la guerre de tous contre tous. L'équilibre des forces était la réponse des petits Etats-nations apparus à la Renaissance aux empires. La guerre froide illustre la combinaison de ces deux ordres : « Les anciens systèmes – équilibre en Europe, empire au-delà – s'unirent pour produire un équilibre mondial entre deux empires ou blocs » (p. 29).

Depuis lors, le monde est divisé en trois catégories. Il y a d'abord un monde pré-moderne, pré-étatique, composé d'Etats faillis (collapsed states) fruit du reflux post-impérial. L'Etat y a perdu le monopole de la violence. C'est le cas en Somalie, au Liberia, en Afghanistan avant la chute des Talibans. Dans le monde moderne, le système étatique westphalien est resté intact. Composé d'Etats souverains, le monde moderne est régulé par l'usage de la force. Les théories réalistes sont les plus aptes à le décrire. Enfin, le monde post-moderne expérimente le dépassement de l'Etat-nation. L'Union européenne en offre l'exemple le plus abouti. le monde post-moderne ne repose plus sur l'équilibre des forces mais sur une communauté de valeurs, démocratiques et libérales. Avec la souveraineté des Etats et l'intégrité des frontières s'y érode la distinction entre les affaires intérieures et extérieures.

Bien que le monde post-moderne constitue le stade le plus avancé du système international, les Etats-Unis n'en font paradoxalement pas partie. Ils sont restés englués dans le monde moderne. Car ils possèdent les attributs leur permettant de le dominer. Comme chez Robert Kagan, les Etats-Unis de Robert Cooper pratiquent la politique de leurs moyens : forts de leur puissance militaire et de leur rayonnement culturel, les Américains peuvent mettre en oeuvre une politique sinon impériale (ils ne désirent pas conquérir de nouveaux territoires) du moins hégémonique (ils entendent façonner le monde à leur image). Comme chez Robert Kagan encore, l'Europe de Robert Cooper mène une politique cohérente avec son manque de moyens militaires, favorable à la négociation, à la coopération égalitaire et au respect de la légalité internationale. « Pour celui qui n'a qu'un marteau, tout problème ressemble à un clou » écrit-il joliment (p. 189).

Laquelle de ces deux attitudes est-elle la mieux adaptée aux défis que pose le monde pré-moderne ? Il n'est en effet pas possible de se désintéresser du sort de cette terra nullius chaotique. Si l'écroulement d'un failed State ne menace pas directement les intérêts vitaux de l'Occident, Robert Cooper tire trois leçons inquiétantes du fonctionnement de l'Etat pré-moderne. Premièrement, le chaos tend à se répandre : « quand un Etat s'effondre, ses frontières suivent » (p. 90). Deuxièmement, tout Etat qui s'écroule est invariablement relevé par le crime ; or la criminalité est transnationale depuis les mafias albanaises jusqu'aux barons de la drogue colombiens en passant par les gangs nigérians. Troisièmement, une zone de chaos peut parfois menacer directement la sécurité du monde moderne : c'est la leçon du 11 septembre. Face à ces défis, le retour à l'empire autoritaire n'est possible ni financièrement (« personne ne veut payer le prix du sauvetage de la ruine d'un lointain pays » p. 35) ni moralement (« il n'y a plus aucun pays occidental qui croit assez fortement à sa mission civilisatrice pour imposer sa loi par la force » p. 93).

La version post-moderne de l'empire doit par conséquent être volontaire. Les Etats-Unis l'avaient compris avec la stratégie clintonienne d'« élargissement démocratique ». Les politiques qu'ils inspirent menées par le FMI et la Banque mondiale ne visent pas d'autres fins : « En échange d'un soutien financier qui permet l'accès à l'économie mondiale, un pays accepte conseils et supervisions » (p. 94). La politique menée par l'Union européenne est plus radicale encore. Elle est illustrée par cette citation de Catherine II : « Je n'ai d'autres moyens de défendre mes frontières que de les élargir » (p. 102). Pour remédier au chaos à sa périphérie, l'Union européenne a choisi d'étendre ses frontières. Cette forme d'extension impériale est particulièrement pertinente : jamais dans l'histoire aucune occupation par une puissance impériale n'a conduit aux réformes aussi radicales et durables que celles mises en oeuvre spontanément en Europe centrale ou en Turquie. Cette extension impériale a toutefois ses limites : l'élargissement de l'UE, devenu une fin en soi, vide le projet politique européen de son contenu. Aussi, comme le conclut Robert Cooper, l'Europe devra-t-elle maintenir face aux Etats-Unis une puissance militaire sans laquelle sa légitimité internationale sera mise à mal.
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