La Mal-Mesure de l’homme renvoie in fine à un compte rendu historique de l’évolution qui porte davantage sur les processus évolutifs que sur les structures de parenté. L’apparentement nous renvoie à la banalité du monde vivant alors que « l’épopée » évolutive, dès lors que nous en sommes les conteurs, tend essentiellement à rendre compte de nos performances notamment cognitives. Notre discours sur les processus évolutifs est marqué par une propension à souligner des phénomènes de rupture et à ne retenir que des faits d’exception.
Exceptions et ruptures ne limitent-elles pas des phases ou des étapes, « marches d’un podium » qui renvoient à un discours déterministe inapproprié en science ? Ainsi, l’humain qui a une propension à écrire le discours de l’évolution selon son seul point de vue n’a-t-il pas comme caractéristique unique de vouloir échapper au fait que dans la nature, la source de variation est aléatoire ? (Valéry Zeitoun)
En conclusion, le procès de Prométhée nous apparaît archaïque, et les garanties de l’accusé y sont quasi inexistantes : aucun défenseur ne lui est accordé et il ne peut s’exprimer qu’après avoir subi la sanction de Zeus. Mais la pièce d’Eschyle nous montre également qu’en Grève la recherche de la nécessaire motivation du jugement commence avec l’âge des Cités et que l’art de l’argumentation, qui deviendra la rhétorique judiciaire, accompagne la contestation de la monarchie de droit divin et la recherche du meilleur régime. La première préoccupation de Platon, comme d’Aristore, ou encore des Sophistes, sera la définition de la Justice et les modalités politiques de son application. Le calvaire de Prométhée atteste, par-delà le gouffre des siècles, de la naissance du droit et, par ricochet, de celle de l’humanité. (Ugo Bellagamba)
C’est pourquoi les robots doués de conscience insufflent paradoxalement de l’humanité dans ce monde où la biologie semble vouée à l’échec. Ceux qui échappent au contrôle de la fourmilière apparaissent plus sensibles que les Néchiffes dans leur désir de protéger le peu d’humains libres qui restent, et d’annoncer le nouvel avènement d’Olga, la divinité méprisée. On notera que le suffixe « mache », abréviation de machine, n’a pas fait florès dans la culture SF ; c’est « mécha », venu du Japon, qui s’est imposé. À l’instar des robots domestiques qui, dans les générations prochaines, se substitueront peut-être aux singes que notre société n’aura su préserver, le post-humain puise dans la technosphère cette figure de l’Autre qu’il ne trouve plus dans la biosphère. (Laurent Genefort)
Selon Lamarck, après avoir modifié son environnement, le singe devenu homme prend désormais possession du vivant : la bipédie et le langage seraient donc des armes de destruction massive, et l’évolution une lutte non pas (encore) pour la survie mais pour la suprématie ! Voilà un triste constat largement partagé par d’autres grands philosophes comme Cavanna : « Il y a un million d’années, un neutron perdu, errant par les espaces infinis, frappait le fœtus d’une guenon juste là où il fallait pour qu’il perdît sa queue et sa joyeuse humeur et commençât à calculer sa retraite de cadre. » Tristesse ou lucidité ? (Jean-Sébastien Steyer)
25.01.18 - INTEGRALE - Yves Coppens, Jérôme Garcin, Colombe Schneck..