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EAN : 9791041413454
192 pages
Points (09/05/2023)
3.72/5   231 notes
Résumé :
C'est sans doute son innocence monstrueuse qui fait du héros de Cormac McCarthy un serial killer d'une espèce singulière, dont on accompagne presque malgré soi la descente aux enfers, de la misérable maison où il vit à l'écart du monde aux grottes où il entrepose les cadavres de ses victimes. Il est difficile d'imaginer plus grand dénuement, plus périlleuse inconscience et, surtout, plus terrible solitude. Inspiré d'un fait divers, Un enfant de Dieu prend en charge ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (30) Voir plus Ajouter une critique
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Vingt ans après, auto-proclamée Vicomtesse de Bragelonnette (Texas, Etats-Unis), j'entreprends une seconde lecture de cet enfant de Dieu (lequel n'a pas honte d'enfanter à tort et à travers). En 1992, des libraires plus éclairés qu'Edison avait alors enrichi mon univers littéraire d'un auteur majeur. La déflagration m'avait laissée KO.

Sur la quatrième de couverture, les éditions Actes Sud présentaient McCarthy: "Il demeure sans doute le plus méconnu des très grands de la littérature contemporaine". Heureusement, il y eut le cinéma pour propulser le styliste américain sur le devant de la scène. Et son roman "La route" paracheva une notoriété qui avait beaucoup beaucoup tardé (et dire qu'il y a des romanciers qui…)

Vingt ans après ou je n'ai pas vieilli (sourire charmeur qui attend confirmation), ou le roman n'a pas vieilli. Que ceux qui oseraient imaginer une autre hypothèse dissimulent leur sourire sarcastique dans un sac en papier recyclable. Bref, mon plaisir de lectrice demeure intact.

Un enfant de Dieu est une plongée en apnée dans le monde rance, fou, étriqué, désolé et sordide d'un de ces exclus que l'Amérique concocte dans ses coins reculés. Un enfant de Dieu est une lente descente dans une folie qui ne cesse de croître alors que croient dénuement et solitude. En contrepoint de la nécrophilie rouge et noire, trois grosses peluches gagnées dans une fête foraine rappellent que le pantin dément affublé d'un fusil, d'un scalp et d'une jupe a, un jour, fait partie de la société humaine.
Terrifiante dans son économie de moyens, effrayante par sa précision, l'écriture de McCarthy hante la montagne (et notre esprit) où grimace Lester Ballard, qui fut, un jour, oublié de ses semblables.
"Vous pensez qu'à l'époque les gens étaient pires qu'ils ne sont maintenant? dit l'adjoint.
Le vieil homme contemplait la ville inondée. Non, dit-il. Je pense que les gens n'ont pas changé depuis le jour que le bon Dieu les a créés."
Peut-être la phrase-clé du roman.
Si Lester Ballard pris dans les rets de la survie ne provoque pas l'empathie (et c'est peu dire), aucun protagoniste n'est sympathique. Ici, les hommes sont durs, égoïstes, rugueux. Dans le Tenessee, le rêve américain a fait long feu.
Mais que reste-t-il de l'homme civilisé lorsque les conditions de la civilisation se dérobent?
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Lester Ballard et un type étrange, un marginal. Armé de son fusil qu'il ne quitte jamais, presque le prolongement de son bras, il erre dans la forêt. Vagabond, à moitié sauvage, un peu fou, il vit dans une grotte, chasse l'écureuil pour se nourrir. Et parfois, ça le prend, il tue. Il tue des inconnus, qu'un hasard malheureux a placé sur sa route, sans affect, sans émotion, ni colère. Il tue poussé par son instinct, un instinct animal. Et parfois, il soulage sa frustration sur le cadavre d'une femme. Au fur et à mesure que Lester Ballard s'éloigne de la civilisation, seul et miséreux, de plus en plus animal, il s'enfonce dans la folie.

Ce thème traité par un autre aurait sombré dans la vulgarité et la facilité. Mais Cormac McCarthy n'est pas n'importe quel écrivain. McCarthy est un auteur exigeant.

Son récit est sombre, glauque, désespéré mais jamais il ne tombe dans le trash facile et racoleur. Il n'y a pas d'intrigue linéaire. le récit ressemble à la vie de Lester Ballard ; une errance sans but, guidée par le hasard. McCarthy manie parfaitement l'art de l'ellipse.

L'écriture de McCarthy est, dépouillée, directe, belle dans la simplicité. Sous sa plume, la laideur est sublimée, du sordide naît une poésie forte et violente comme la nature qu'il décrit si bien.
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Après la beigne de la route, en 2016, c'est cet Enfant de Dieu dont je viens d'achever la lecture.
Le style de ce livre de 1973, c'est déjà celui de la route: C' est âpre et dur comme l'hiver dans lequel survit effroyablement Lester Ballard, comme ce monde qui s'éteint dans lequel cheminaient le père et son fils dans La route.
La misère et l'abandon habitent ce récit. Ce n'est pas seulement le dénuement affectif et matériel de Lester, dont il est question... C'est celui de toute cette contrée et de certains de ses habitants. les personnages sont comme des fantômes, des ectoplasmes écrasés par leur condition de ploucs.
Lester n'est que l' aboutissement terrifiant et achevé d'un processus de désocialisation et d'isolement, rendu irréversible lors de l'expulsion de sa ferme.
Cormac Mac Carthy est l'écrivain du constat. Il n'accable pas son personnage, il l'observe dans son quotidien morne et horrifique...
Là ou un Erskyne Caldwell, un Jim Thompson ou un Charles Williams amènent un humour noir-soupape de sûreté pour le lecteur, Cormac Mac Carthy ne rit pas. Jamais.

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Après « Méridien de sang » et « La Route », je me plonge pour la troisième fois dans l'univers noir et sordide de Cormac McCarthy pour en ressortir à nouveau l'estomac gentiment retourné. Certes, on ne peut nier le puissant impact émotionnel suscité par la prose saccadée et incisive de McCarthy, mais plus j'avance dans son oeuvre et plus je me dis que cet univers-là n'est peut-être pas fait pour moi. Démence, meurtres sanglants, nécrophilie, inceste, viol… Rien ne manque dans cette affolante descente dans l'horreur et la sauvagerie où nous emboitant le pas à Lester Ballard, un simple d'esprit chassé de chez lui et contraint de se terrer dans la forêt , lieu où il retombera petit à petit dans la plus totale bestialité. Inutile de chercher dans « Un enfant de Dieu » la moindre trace d'exploration ou d'analyse psychologiques, c'est le Mal à l'état pur et ses effroyables ravages que McCarthy nous offre sur un plateau, un point c'est tout.

Autant le dire, c'est un peu trop pour moi. Si « Méridien de sang », le dernier roman que j'avais lu de cet auteur, avait su touché ma corde sensible malgré sa violence omniprésente par la beauté lyrique et terrible de ses descriptions, rien de tel dans « Un enfant de Dieu » où le style est réduit à sa plus grande sobriété : sec, dur et abrupte. Loin de moi l'idée de nier la qualité du roman de McCarthy ; il est même excellent dans un genre très particulier – celui qui vous donne envie de vous pendre à l'arbre le plus proche ou, à défaut, de recracher votre petit déjeuner – mais ce genre n'est de toute évidence pas ma tasse de thé. Je retenterai peut-être ma chance avec McCarthy car je n'aime pas abandonner un bon auteur, mais d'abord je pense que vais aller m'aérer l'esprit dans des territoires littéraires moins pestilentiels…
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Dans ce roman, nous suivons le parcours d'errance criminelle de Lester Ballard, jeune homme frustre, chassé de chez lui, qui va d'abord squatter une cabane, avant de se réfugier dans des grottes.

Cette lecture me laisse un peu partagé.

D'une part, j'aime vraiment le style d'écriture de Cormac Mc Carthy, son art maitrisé de la narration, à la fois minimaliste dans la description et recherchée dans les termes et images utilisés.

J'apprécie aussi le fait qu'il ne cherche jamais le sensationnel facile, décrivant les actes les plus aberrants avec une sorte de détachement.
Particularité que j'avais déjà notée dans le roman "La route".

D'autre part, je m'interroge un peu sur le but recherché par l'auteur.
Où veut il nous conduire avec cette histoire de tueur nécrophile ?
Peut-être simplement nous montrer les aspects les plus sombres de l'Homme ?
Si c'est le cas, Mc Carthy y parvient, ce récit est tragiquement simple.

Mais pour ma part, je n'ai pas totalement adhéré, tant pis...

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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Combien je vous dois en tout ? Dit Ballard.
Trente-quatre dollars et dix-neuf cents.
Ça compris ?
Ça compris.
Bon, j'vais vous donner quatre dollars et dix-neuf cents et y restera plus que trente tout ronds.
L'épicier regarda Ballard.
Ballard, dit-il, quel âge avez-vous ? Vingt-sept ans malgré que ça vous regarde pas.
Vingt-sept ans. En vingt-sept ans vous n'avez pas trouvé le moyen de mettre plus de quatre dollars et dix-neuf cents de côté ? L'épicier faisait des calculs sur son calepin. Ballard attendait.
Vous comptez quoi ? demanda-t-il soupçonneux.
Une minute, dit l'homme. Au bout d'un moment, il leva le carnet en plissant les yeux.
Et bien, dit-il, d'après mes calculs, à ce compte là, il faudra cent-quatre-vingt-dix ans pour rembourser les trente dollars. Ballard, j'ai déjà soixante-sept ans.
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Il réapparut se débattant, crachant, et se mit à battre l'eau pour rejoindre la rangée de saules qui délimitaient la berge submergée de la rivière. Il ne savait pas nager, mais comment un type comme lui aurait-il pu se noyer? La rage semblait lui tenir lieu de bouée. Une pause dans le cours normal des choses sembla se produire en ce lieu. Regardez-le. On aurait pu dire qu'il était porté par ses semblables, des gens comme vous. Qu'il en avait peuplé le rivage et qu'ils l'appelaient. Une race qui nourrit les estropiés et les fous, qui veut de leur sang mauvais dans son histoire et l'obtient.
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Non, c'était rien que des misérables, tous des salauds à trois cent soixante degrés, ce que voulait dire mon pater par là, c'est que c'était que des salopards quel que soit le point de vue où on se place.
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Qu'est-ce que tu veux, Lester ?
Je t'ai d'jà dit. J'veux que t'enlèves ton sale cul de ma propriété. Et que tu remmènes ces crétins avec toi.
Fais gaffe à ce que tu dis, Lester. Y'a des dames.
J'en ai rien à foutre des gens qui sont là.
C'est pas ta propriété.
Putain qu'ça l'est pas.
T'as déjà été au trou pour ça. Je parie que tu veux y retourner. Le shérif en chef est par là-bas.
J'm'en fous bien où qu'il est le shérif en chef. J'veux que tous autant que vous êtes, enfants de salauds, vous partiez de ma putain de propriété.
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A observer ces choses qui émergent d’une matinée par ailleurs silencieuse et champêtre, un homme, devant la porte de la grange. Il est petit, crasseux, mal rasé. Il se déplace dans la balle sèche au milieu de la poussière et des lames de soleil avec une brutalité contenue. Du sang saxon et celte. Un enfant de Dieu, sans doute, comme vous et moi.
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Comment est le monde dans le roman ?

Il y a des petits feux partout
Il est inondé
Il est recouvert de cendres
Tous les sols sont craquelés

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