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EAN : 9782296030817
160 pages
Editions L'Harmattan (20/04/2007)
1.75/5   2 notes
Résumé :
Le français ne vient pas du latin ! Essai sur une aberration linguistique. Linguisme. Envoi/dédicace de l'auteur a priori
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L'auteur de ce livre est l'équivalent en linguistique de ce que les anti-vaccins sont à l'épidémiologie, et de ce que Donald Trump et sa «petite grippe» soignable à l'eau de Javel, est au respect des femmes et de l'objectivité historique. Il se présente comme le seul connaisseur de l'origine du français, mais ne peut appuyer sa théorie sur aucun auteur, et est resté seul à défendre ses chimères. Pour lui, tous (sic) les linguistes, «seraient des incapables… ils vous trompent» (p. 41). Leur approche «dogmatique… occulte les lois fondamentales de la linguistique» (p. 83). Ces «charlatans» (p. 93) «aveugles» et «antiscientifiques» (p. 107), à la «fausse érudition» (p. 85), «s'avancent à la légère» (p. 31), «utilisent des combines… des procédés fallacieux» (p. 87), un «verbiage creux» (p. 108), «se trompent avec constance» (p. 110), si bien qu'avec la «grave et constante erreur que commet la linguistique officielle» (p. 28) «toute l'étymologie officielle de la langue française est fausse» (p. 117). du Littré au Larousse et au Robert, tous «se moquent pas mal de la logique scientifique, ils ne cessent de pérorer» dans leur «entêtement» (p. 120), et n'ont «aucun caractère scientifique» (p. 153). Je n'invente rien. Au contraire, j'en passe énormément! Quand on croit avoir raison contre tous les spécialistes réunis et qu'on ne l'est pas soi-même, il y a de quoi se poser des questions. Il existe un néologisme pour cela, l'ultracrépidarianisme.
Pour l'auteur, les linguistes ne sont d'ailleurs pas les seuls incompétents. C'est aussi le cas des paléontologues et des préhistoriens. Les spécialistes s'accordent aujourd'hui pour dater les Indo-Européens d'environ 4.450 avant J.-C. (certains sont allés jusqu'à 9.000), mais pour notre paléontologue amateur, ils datent tantôt de 20.000 avant J.-C. (pp. 18 et 37) tantôt d'encore plus tôt «Pour moi, l'homme de Cromagnon [environ 25.700 avant J.-C] et ses descendants étaient de langue indo-européenne» (p. 37). Ce «pour moi» ne s''appuie à nouveau sur absolument rien.
L'auteur nie en bloc l'apport au vocabulaire français du gaulois, du francique et du latin. Pour lui, le français viendrait de ce qu'il appelle l'italien ancien, qu'il distingue du latin tardif et du latin populaire car selon lui, deux peuples différents ont coexisté à Rome: «Latins et Italiens ont cohabité pendant… 7 siècles» (pp. 110 et 111). Il écrit tantôt que les Romains ne parlaient pas latin (p. 137) et tantôt qu'ils étaient bilingues latin-italien (p. 133). Pour lui, «le théâtre latin disparaît au premier siècle avant J.-C. parce qu'il n'est plus compris» (p. 135), mais s'il a disparu, qui allait donc écouter les nombreuses tragédies de Sénèque au siècle suivant? L'auteur en arrive même à écrire que «la langue que parlaient les Romains n'a rien à voir avec le latin» (p. 149), après avoir pourtant attribué une grande parenté à ses deux langues (p. 18) !
Dans la littérature antique, il n'existe pas la moindre allusion à ces deux peuples et à ces deux langues, et il n'existe aucun écrit, même mineur dans cette prétendue deuxième langue. L'auteur le reconnait, mais persévère, et comme il n'existe nulle trace de cette fameuse langue qui aurait pourtant existé pendant 7 siècles, c'est lui, en amateur, qui déclare assumer la mission de créer sur 12 pages les mots de son «italien ancien recomposé» (pp. 40-51). Même le préfacier du livre, ce n'est pas peu dire, se voit obligé de recadrer l'auteur en s'étonnant poliment: «De quel chapeau sort cet italien ancien?», et de lui conseiller diplomatiquement, au moins «pour l'humilité intellectuelle, de remplacer des certitudes par des points d'interrogation» (p. 9). Et toc !
Sur quoi se base donc l'auteur pour affirmer que le français ne vient pas du latin ? Sur ce qu'il faut bien appeler une vaste supercherie visant à la fois la syntaxe et le vocabulaire.
Ses deux langues auraient d'abord «deux systèmes grammaticaux totalement différents, étrangers l'un à l'autre» (p. 8). Par exemple, grâce à cet «italien ancien» inconnu, toutes les langues romanes auraient perdu brutalement leurs déclinaisons en même temps, ce qui est historiquement faux. le français les a gardées, certes simplifiées, jusqu'au XIVème siècle, alors que l'italien, le portugais et l'espagnol les ont perdues vers le VIIème siècle, et que le roumain les a conservées.
Pour ce qui est du vocabulaire, l'auteur cite longuement une série de mots français (et d'autres langues romanes) dont la racine est différente d'un mot latin qu'il sélectionne en passant soigneusement sous silence les synonymes et les contre exemples qui invalident sa théorie (pp. 40-51). le mot chose serait ainsi différent du latin res, et par conséquent, chose viendrait de son italien ancien recomposé, mais pour arriver à ça, il choisit comme point de comparaison res et censure causa. le procédé est facile, et il le répète à satiété. de même, cité serait différent d'urbs, mais il feint d'ignorer le mot civitas, et confond la cité et la ville. Il déclare impossible que marin vienne de nauta puisqu'il fait l'impasse sur mare, la mer, dont dérive évidemment le mot marin. Parole serait différent de verba, et ici, c'est parabola qu'il escamote. Moderne ne pourrait descendre de recens, pourtant modernus existait, outre que récent ne veut pas dire moderne. Et il continue ainsi: apprendre n'a aucun lien de filiation avec discere, mais bien avec apprendere qu'il passe sous silence. Attention serait en latin cave (prends garde) et attentio n'existerait donc pas. Traité ne pourrait venir du latin foedus car il passe tractatum à la trappe. Général ne peut être dérivé d'imperator, qui n'en est même pas la traduction, car pour lui, generalis n'existe pas non plus. Comme il ignore inimicus et luptare, il écrit qu'ennemi et lutter ne peuvent pas venir d'hostis et de pugna, qui n'est que la lutte à coup de poing. Si les mots femme, peau et manteau ne peuvent dériver de mulier, cutis et pallium, c'est qu'il dissimule femina, pellis et mantum ou mantellium. Voilà sur quelle base et sur quel total manque de sérieux il fonde sa théorie ! On peut se demander comment L'Harmattan a pu éditer un tel livre.
Conclusion, et cela vaut aussi pour Trump, pour les vaccins, et pour bien d'autres choses: Devant ce qui est écrit et devant ce qui se répète, il faut conserver un minimum d'esprit critique, et voir quelle est la formation et la compétence de celui qui avance une théorie. de tous mes cours universitaires, celui qui m'a le plus marqué est sans doute le cours de Critique historique de Léopold Génicot. Si vous cherchez l'étymologie d'un mot français, pas besoin de faux prophète. Voici un site rattaché à l'Université de Nancy. Faites le suivre d'un mot quelconque dont vous recherchez l'étymologie, et vous tomberez sur quelque chose de sérieux, étayé, et documenté :
https://www.cnrtl.fr > definition > étymologie
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