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Citations sur Les armes secrètes (15)

Si l'on pouvait déchirer et jeter le passé comme le brouillon d'une lettre ou les épreuves d'un livre. Mais il demeure obstinément et entache le texte définitif et je crois que c'est cela le futur véritable.
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C'est drôle, les gens croient que faire un lit, c'est toujours faire un lit ; que donner la main, c'est toujours donner la main ; qu'ouvrir une boite de sardines, c'est ouvrir indéfiniment la même boite de sardines. "Tout est exceptionnel au contraire", pense Pierre en tirant maladroitement sur le vieux couvre-lit bleu.
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- Ce truc du temps c'est compliqué, ça m'attrape par tous les bouts. Je commence à me rendre compte peu à peu que le temps c'est pas comme une bourse qu'on remplit à mesure. Je veux dire que même si le contenu change, il ne peut entrer dans la bourse qu'une certaine quantité et après ça, adieu.
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Michel est coupable de littérature, d'échafaudages invraisemblables. Rien ne lui plait tant que d'imaginer des exceptions, des individus hors de l'espèce commune, des monstre qui n'ont pas forcément un aspect répugnant.
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Il n'y a rien de tel que de partager un oreiller. Ça vous éclaircit les idées. Parfois même ça les supprime carrément, comme ça on est tranquille.
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Il n’y a rien de tel …


Il n’y a rien de tel que de partager un oreiller.
Ça vous éclaircit les idées.

Parfois même ça les supprime carrément,
comme ça on est tranquille.
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[L’homme à l’affût]

« Tu comprends, Bruno, ce type-là et tous les autres types de Camarillo, c’était des convaincus. Convaincus de quoi, tu vas me dire ? Je sais pas mais ils étaient convaincus. De ce qu’ils étaient je suppose, de ce qu’ils valaient, de leurs diplômes. Non, c’est pas ça. Il y en avait de modestes et qui ne se croyaient pas infaillibles. Mais même le plus modeste était sûr de lui. Et c’est ça que me foutait en boule, Bruno, qu’ils se sentent sûrs d’eux. Sûrs de quoi, dis-moi un peu, alors que moi, un pauvre diable pestiféré, j’avais assez de conscience pour sentir que le monde n’était qu’une gelée, que tout tremblait autour de nous et qu’il suffisait de faire un peu attention, de s’écouter un peu, de se taire un peu pour découvrir les trous. Sur la porte, sur le lit : des trous. Sur la main, sur le journal, sur l’air, sur le temps : des trous partout, une énorme éponge, une passoire qui se passe elle-même… mais eux, ils sont la science américaine, tu comprends, Bruno ? Leur blouse blanche les protégeait des trous ; ils ne voyaient rien, ils acceptaient ce que d’autres avaient vu pour eux, ils s’imaginaient qu’ils voyaient. Et bien sûr ils ne pouvaient pas les voir, les trous, et ils étaient très sûrs d’eux-mêmes, très sûrs de leurs ordonnances, de leurs seringues, de leur maudite psychanalyse, de leur ne fumez pas et ne buvez pas… Ah ! le jour où j’ai pu les envoyer promener, reprendre le train et regarder par la portière comme tout basculait en arrière, éclatait en mille morceaux. Je ne sais pas si tu as remarqué comme le paysage se casse en mille morceaux quand tu le regardes s’éloigner…
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Les jours de chaleur, Léticia, Holanda et moi on allait jouer près de la voie ferrée, on attendait que maman et tante Ruth soient montées faire leur sieste pour s'échapper par la porte blanche. Maman et tante Ruth étaient toujours très fatiguées après avoir fait la vaisselle, surtout quand c'était Holanda et moi qui essuyions les assiettes, car alors c'étaient des discussions, des petites cuillères par terre, des phrases que nous étions les seules à comprendre, une atmosphère où l'odeur de la graisse, les miaulements de José, l'obscurité de la cuisine finissaient d'habitude dans une mêlée générale, après quoi il ne nous restait plus qu'à nous trisser.
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[L'homme à l'affût]

- Ce truc du temps c'est compliqué, ça m’attrape par tous les bouts. je commence à me rendre compte peu à peu que le temps c'est pas comme une bourse qu'on remplit à mesure. Je veux dire que même si le contenu change, il ne peut entrer dans la bourse qu'une certaine quantité et après ça, adieu. Tu vois ma valise, Bruno ? On peut y mettre deux costumes et deux paires de chaussures ; et bien, imagine que tu les enlèves et qu'au moment de les remettre tu t'aperçoives qu'il n'y entre qu'un costume et qu'une paire de chaussures. Mais c'est pas ça le mieux, le mieux c'est quand tu comprends tout d'un coup que tu peux mettre une boutique entière dans la valise, des centaines et des centaines de costumes comme toute cette musique que je mets dans le temps, parfois, quand je joue ; la musique et ce que je pense dans le métro.
[...]
L'autre jour j'ai parfaitement compris ce qui se passait. J'étais en train de penser à ma vieille, puis à Lan, aux copains et, au bout d'un moment, j'ai eu l'impression que je me promenais dans mon quartier et que je voyais les gars qu'il y avait à cette époque. Mais ce n'était pas vraiment penser, je crois que je t'ai dit que je ne pense jamais ; c'est comme si j'étais planté à un coin de rue en train de regarder passer ce que je pense, mais je ne pense pas ce que je vois, tu saisis ? Jim dit que c'est pareil pour tout le monde, qu'en général (c'est ce qu'il dit) personne ne pense pour son propre compte. Bon, admettons, toujours est-il que j'avais pris le métro à Saint-Michel et que je m'étais mis aussitôt à penser à Lan, aux copains, et à voir mon quartier. J'étais pas encore assis que je me suis mis à penser à eux. Mais en même temps je me rendais compte que j'étais dans le métro, qu'on était arrivé à Odéon et que les gens entraient et sortaient. Puis j'ai continué de penser à Lan et j'ai revu ma vieille quand elle revenait des commissions, je les ai tous revus, je me sentais vraiment avec eux, c'était formidable, il y avait longtemps que ça m'était pas arrivé. Les souvenirs c'est toujours dégueulasse mais cette fois-là, ça me faisait plaisir de penser aux copains et de les revoir. Si je te racontais tout ce que j'ai vu, tu ne le croirais pas et puis ça prendrait un bout de temps. Même si je te passais les détails. Par exemple, pour ne parler que de ça, je voyais Lan avec cette robe verte qu'elle mettait quand elle allait au Club 33 où je jouais avec Hamp. Je voyais le costume avec les ganses, le col et cette espèce de broderie sur un revers... Je ne voyais pas tout ça à la fois, non, au contraire, je prenais mon temps, je me promenais tout doucettement autour du costume et je le regardais sans me presser. Et après j'ai examiné de près la tête de Lan et celles des copains et après je me suis souvenu de Mike qui vivait dans la chambre d'à côté, de l'histoire qu'il m'avait racontée sur des chevaux sauvages dans le Colorado, et de lui qui travaillait dans un rancho et qui parlait en bombant la poitrine comme les dresseurs de chevaux...
- Johnny, a dit Dédée de son coin.
- Et, remarque, je te raconte qu'un tout petit bout de ce que j'ai vu. Ça m'a pris combien de temps pour raconter ce petit bout ?
- Je ne sais pas, mettons deux minutes.
- Mettons deux minutes, répète Johnny en m'imitant, deux minutes et je ne t'en ai raconté qu'un petit bout. Alors, si je te racontais tout ce que les copains faisaient dans ma tête ! Il y avait Hamp qui jouait Save it, pretty mamma et moi j'écoutais chaque note, tu m'entends, chaque note et avec Hamp ça dure, il tient bien le coup. Il y avait aussi ma vieille qui s'était mise à faire une prière interminable où elle parlait de salade, il me semble, et où elle demandait pardon pour mon vieux et moi... Bon, si je te racontais tout ça, ça durerait plus de deux minutes, hein, Bruno ?
- Si réellement tu as entendu et vu tout ça, ça a dû prendre un bon quart d'heure, lui ai-je dit en riant.
- Un bon quart d'heure, eh Bruno ? Alors tu vas me dire comment ça peut se faire que j'aie senti soudain le métro s'arrêter, que je me suis sorti de Lan, de ma vieille et tutti quanti et que j'ai vu qu'on était Saint-germain-des-Prés, exactement à une minute et demie d'Odéon.
Je ne prends pas très au sérieux, généralement ce que raconte Johnny, mais cette fois il a eu un regard qui m'a donné froid dans le dos.
- A peine une minute et demie de ton temps et du temps de l'autre tordue, là-bas, a dit Johnny avec rancune. Une minute et demie du temps du métro et de celui de ma montre, qu'ils aillent se faire foutre. Alors comment ça se peut que j'ai pensé, moi, pendant un quart d'heure, hein, Bruno ? Comment est-ce qu'on peut penser un quart d'heure en une minute et demie ? Je te jure que ce jour-là je n'avais pas fumé la moindre cigarette, pas le moindre morceau de..., ajoute-t-il comme un enfant qui s'excuse. Et ça m'est arrivé d'autres fois depuis et maintenant ça m'arrive même tous les jours. Mais, ajoute-t-il d'un air rusé, c'est seulement dans le métro que je peux m'en apercevoir parce que le métro c'est comme si on était à l'intérieur d'une pendule. Les stations c'est les minutes, tu saisis, c'est votre temps à vous, celui de maintenant, mais je sais, moi, qu'il en existe un autre et j'ai pensé, pensé, pensé...
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Je sais que le plus difficile va être de trouver la bonne manière de raconter tout ça, mais je n’ai pas peur de me répéter.
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