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Critique de batlamb


Plus je lis Cortazar, et plus il m'impressionne par sa versatilité. Chez lui, chaque aspect du réel peut déchaîner une tempête d'idées. Au milieu de ces embruns, il érige sa petite île quasi-fantastique, située « à midi », comme le décrit la nouvelle centrale de ce recueil, qui est sans doute ma préférée.

Ses idées ne sont pas seulement des histoires, mais aussi des manières de les raconter : dans la nouvelle éponyme et dans « Mademoiselle Clara », Cortazar adopte un maillage de focalisations internes, qui se traduit par des va-et-viens incessants entre narrateurs, sans que le texte nous indique clairement qui parle. Je ne cache pas que c'est un peu épuisant à lire, mais l'intensité ainsi créée est assez fascinante, et confère à ces récits une dramaturgie digne du Colisée.

Cortazar rend aussi hommage à certaines figure tutélaires, comme celle du poète Lautréamont, qui hante le dernier texte. A qui d'autre pourrait se référer la figure de ce Sud-Américain dépourvu d'accent espagnol, tapis dans les passages nocturnes, en mal d'aurore ? Ses yeux de fantômes, tout à fait ailleurs, font dériver ce texte hors du temps et de l'espace (littéralement).

Et c'est vrai qu'il y a du Lautréamont chez Cortazar, dans ses phrases tortueuses, dont les virgules sont comme autant de volutes de la pensée, de l'imagination, qui se déploient à un rythme fiévreux, où le lecteur peut aisément se perdre ou se décourager, laissé sur le bas-côté de l'autoroute, comme le conducteur de la voiture "Floride" qui, excédé, quitte le recueil dès la moitié du premier récit, "L'autoroute du sud". Une impatience un peu regrettable mais compréhensible quand on n'adhère pas à ce nouveau rythme qui nous est imposé.

Et pourtant, ceux qui suivront Julio jusqu'au bout des embouteillages surréalistes de sa pensée pourront se surprendre à pousser des soupirs mélancoliques une fois chaque histoire achevée. Car dans ces machines à la route hasardeuse, il y a des humains pas si fantomatiques.
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