Remarquable, ce livre rend intelligent
Cet ouvrage n'est pas le descriptif d'une aventure extraordinaire , c'est une réflexion sur la façon de voyager intelligemment, ce livre modifiera votre façon d'aborder vos prochaines migrations touristiques, après l'avoir lu vous comprendrez que voyager doit être un art. En ces périodes de confinement (passées et à venir) vous pourrez vous échapper sans justificatif, un vrai luxe à partager sans modération !
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J'ai voyagé depuis mon canapé ! Je recommande vivement ce roman très bien écrit. le périple, la découverte des cultures et même de l'histoire qui a façonné les pays parcourus, les paysages et les "routes", les rencontres, les choix, les impressions, les allusions à d'autres explorateurs et auteurs qui ont entre autre participés à cet élan d'escapade, les réflexions personnelles, les imaginations et divagations...
"Un art de parcourir le monde" donne envie de voyager et changer notre façon de le faire et ça fait du bien dans l'époque actuelle. Excellente lecture !
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En les suivant docilement, nous découvrons une procession fabuleuse, exubérante, une fête effrayante et dionysiaque. Dans la rue principale, toute la foule indienne célèbre un dieu inconnu, dans la folie pure, un festival de couleurs, de formes, de bruits, d’odeurs. En tête du cortège, des éléphants parés de mille atours avancent nonchalamment dans le hourvari, suivis de chevaux et de dromadaires pareillement vêtus. Ensuite viennent crescendo des chars ébouriffants. Dans des décors somptueux, toutes les couleurs de l’arc-en-ciel sont réunies et mélangées pour représenter des scènes vivantes du panthéon hindou. Des hommes, des femmes, des enfants sont tout entier peints en bleu, en vert, en rouge, en jaune, en fuchsia. L’un Brama, l’autre Vishnou, le dernier Ganesh, ils sont grimés d’un pagne, d’un habit de lumière, d’armes dorées, de coiffures improbables, de rivières de bijoux, sous des flots de peinture. Entre ces êtres merveilleux, tout droit sortis de la plus haute antiquité védique, des sonos à fond et des groupes d’adolescents en transe, l’oeil extatique, se
trémoussant comme dans une rave party.
L’expression « au milieu de nulle part » prend ici toute sa profondeur. C’est le genre de coin où tout pourrait mal tourner si nous faisions une mauvaise rencontre. Sous le préau, nous partageons un plat de riz et de lentilles avec les parents, la grand-mère et les ouvriers. Ce soir-là, nous dormirons dehors, sous l’auvent, juste à côté des travailleurs qui se coucheront sur les bancs où nous avons mangé. Je serai allongé entre eux et Laura, mais elle n’est pas bien rassurée par cette situation. La présence des femmes et des enfants reste un gage de sécurité lorsque nous nous endormons dans la nuit la plus noire que nous n’ayons jamais connue.
C’est peut-être ça, une bonne définition de l’aventure. Si vous vous trouvez dans une situation où, dans l’éventualité où vous vous faites découper en petits morceaux, vos parents ne retrouveront aucune partie de vous, c’est que vous êtes en train de vivre une aventure.
Dans quelle direction partir, dans ces conditions ? Si Laura pense au Nouveau Monde, je ne jure que par l’Est. Pauvres hères rejetés au bout de la péninsule eurasiatique, il suffit d’une chiquenaude et nous tombons dans les eaux de l’Atlantique. Partir vers l’Ouest, c’est commencer l’aventure terrestre en prenant l’avion, c’est aller parler les langues du futur, l’anglais et l’espagnol. Vers le levant, ce sont dix mille kilomètres sans interruption qui s’ouvrent au départ de Paris, c’est se plonger dans un amas de langues exotiques : allemand, yougoslave, grec, turc, géorgien, farsi, ourdou, dérivés du sanskrit, birman, karen, thaï, khmer, viet, mandarin et nippon. C’est remonter toutes les migrations qui nous ont jetés sur ce promontoire extrême.
p. 219 La rudesse et la bonhomie montagnardes sont de retour. Peut-être aurions-nous dû rester le long des montagnes plutôt que plonger dans la plaine la plus déshéritée de l'Inde ? Les peuples himalayens nous séduisent à nouveau. Nous comprenons mieux ce qui pousse les Priscilla Telmon, Sylvain Tesson, Alexandra David-Neel et tant qu'explorateurs à parcourir le Tibet, le Népal, le Bhoutan, le Sikkim et toutes les contrés de !'Himalaya, paisibles et accueillantes.
p.323 Las, le temps de faire partager notre voyage au plus grand nombre n'est pas encore venu. Trop de pays, trop de peuples, trop de langues, trop de personnes rencontrées, trop d'émotions, trop de tribulations, trop de kilomètres parcourus. C'est la saturation, le burn-out du voyage. Il faut savoir s'arrêter.
Florian Coupé, par ABM TV