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Critique de beatriceferon


Maria-Fernanda est obligée de quitter son Brésil bien aimé. Après la trahison de son minable époux, elle est seule avec deux jeunes enfants et une mère au chômage. Elle s'envole vers notre capitale où une vague connaissance accepte de l'accueillir et de l'aider à trouver un travail. Les voici en train de scruter le tableau d'affichage au supermarché. le regard de Maria-Fernanda est immédiatement aimanté par ce bristol bleu : « Famille nombreuse cherche femme de ménage du lundi au vendredi, de 9 heures à 17 heures. Bonne rémunération. »
Même si elle n'en comprend pas un traître mot, le jeune femme sait que cette offre lui est destinée. C'est le premier pas vers une aventure mystérieuse et un peu inquiétante.
Lors d'une rencontre consacrée à un précédent ouvrage, Valentine de le Court évoquait son roman en cours d'écriture et m'avait donné bien envie de le découvrir.
Après beaucoup de patience, il est là sur la table de la librairie. Il n'attend que moi.
Dans les premières pages, rien de très original : une jeune femme abandonnée par un « abruti » et obligée de se débrouiller pour nourrir sa famille. La voici donc loin du soleil brésilien, perdue dans une ville grise et froide, sans un sou en poche et ne connaissant que trois mots de français : « bonjour, merci, d'accord ». Comment pourrait-elle être engagée ? Mais la providence a l'air de s'en mêler sous la forme d'un banal bout de carton. Quelque chose de magique l'entoure, car, sans savoir ce qui est écrit, Maria-Fernanda est attirée par sa couleur, celle du ciel de son pays.En dépit des doutes formulés par Cristiana : pas de numéro de téléphone, pas d'adresse électronique, aucun moyen de prendre contact avec les rédacteurs de l'annonce, Maria-Fernanda est sûre que celle-ci lui est destinée. Pourtant, à son arrivée devant le bâtiment, personne ne répond à ses coups de sonnette. Personne pour l'accueillir. Une porte entrebâillée sur un hôtel de maître cossu, en plein Bruxelles, ça sent le piège. Comment croire que, dans cette ville connue pour ses vols, vandalisme, agressions en tout genre, personne ne profiterait de cette aubaine pour faire main basse sur les trésors que recèle la demeure silencieuse ? Maria-Fernanda entre, patiente, appelle sans succès. N'importe qui dans sa situation serait ressorti pour chercher un autre emploi. Pas Maria-Fernanda. L'annonce demande une femme de ménage ? Eh bien, elle retrousse ses manches et se met à l'ouvrage. le soir, à son retour, Cristiana la regarde comme une bonne poire qui a travaillé pour rien. Maria-Fernanda, elle, pense que « des gens qui habitaient dans une demeure aussi ravissante, qui avaient lu tant de livres, ne pouvaient être malhonnêtes. Ils allaient la dédommager. »
On se croit plongé en plein conte de fées. Cette demeure vide fait songer au château de la Belle au bois dormant. Toutes les pièces, toutes les armoires sont ouvertes. Seul un tiroir du bureau est protégé par un imposant cadenas flambant neuf, comme la petite pièce interdite dans le manoir de Barbe bleue.
En visitant les chambres, Maria-Fernanda imagine que les habitants sont raffinés : Madame possède d'innombrables toilettes de grand prix et deux armoires pleines de chaussures dont les semelles rouges trahissent les Louboutin. Les chemises de Monsieur sont bien coupées, ses bottines et richelieus du cuir le plus fin. La femme de ménage remarque , dans la salle de bain, parmi les parfums et lotions de luxe, un flacon dont la notice en portugais décrit un « baume anti-frisottis rebelles pour cheveux frisés » comme les siens. Et si, en dépit des différences de classe et de fortune, Madame et elle étaient semblables ? Peut-être pourraient-elles même devenir amies ? D'autant que, comme elle, sa patronne a un petit garçon et une grande fille, dont les jouets plairaient sûrement à Tiago et Lucrecia. Mais Madame possède un bonheur qui a été refusé à Maria-Fernanda. Tout en haut, une nursery abrite ce bébé qui manque tellement à la jeune femme. Au fil des jours, la domestique apprend à connaître cette famille à travers ses meubles, ses objets, ses habitudes alimentaires. Même si elle ne les voit jamais, même si elle ne découvre pas une seule photo, Maria-Fernanda se projette en eux, s'identifie à sa patronne, souffre de leur absence, guette les bruits, espère à tout moment voir surgir l'un d'entre eux. Pourquoi ne croise-t-elle jamais personne ?
Le titre du roman est « une maison bruxelloise », car c'est elle, la maison, qui est le personnage central. C'est un lieu magique qui joue un rôle bien précis. Parfois, une scène surréaliste nous surprend, telle celle du pigeon qui me rappelait le roman de Patrick Süskind ou un passage de « Tête dure » de Francesco Pittau. Un peu d'humour aussi, comme la lettre, soumise au traducteur automatique, qui en ressort absolument incompréhensible.
A travers Maria-Fernanda, le lecteur fait mille suppositions, passe par toute sorte de sentiments.
L'auteur nous réserve une surprise de taille pour la fin et, même si je l'avais pressentie depuis bien longtemps, j'en ai quand même été très frappée.
J'ai beaucoup aimé cette histoire.
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