Je voudrais que les personnes handicapées se réveillent car ce n'est pas avec une manifestation tous les 10 ans qu'on obtiendra quelque chose. Je rêve que les choses changent vraiment pour cette population oubliée et invisible, mais oui, je sais : "It's a dream !"
Vous représentez dans les médias des personnes qui ont un handicap qui se voir parce que dans les médias, il faut que ça se voit, sinon comment y croire, donc vous montrez des personnes en fauteuil ou avec une canne mais il y a énormément de personnes qui ont des handicaps invisibles et là, ce n'est pas intéressant pour les médias car ça ne se voit pas.
Je sais que certains ne pourront pas travailler, car physiquement cela leur est impossible mais pour ceux qui peuvent il y a vraiment un effort à faire car le chômage des personnes handicapées est un chômage record, c'est le chômage le plus important toutes catégories confondues. Et là, les gouvernants doivent s'y atteler.
Mon sentiment c'est qu'à partir du moment où on a un travail, où on gagne sa vie, on est indépendant, tout devient plus facile et c'est pareil d'ailleurs pour tout le monde, que l'on soit handicapé ou non.
Les personnes valides doivent se rendre compte qu'une personne handicapée moteur n'est pas une personne valide qui a du mal à marcher. C'est beaucoup plus complexe que ça et le fait de la toucher pour, soi-disant, l'aider peut complètement la déstabiliser et c'est là où le danger apparaît.
Vous imaginez si on mettait, sur des panneaux publicitaires : "N'aidez pas les personnes handicapées ! " Cela provoquerait un tollé général sauf que la semaine suivante on mettrait sur ces panneaux "Demandez-leur la permission !". Est-ce que ça ne ferait pas réfléchir ?
Cette période en centre était non seulement militaire car on ne pouvait rien faire, tout était interdit, mais en plus, j'étais souvent punie car j'étais insolente, je répondais, je ne voulais pas obtempérer. Les punitions, quand on est allongé et qu'on ne peut pas bouger, c'est vite fait, il n'y a pas 36 solutions. Soit j'étais emmenée dans une pièce seule et là j'attendais qu'on vienne me rechercher. J'avais peur qu'on m'oublie et comme je ne pouvais pas bouger, je voyageais dans ma tête en m'inventant une autre vie. Ou alors, j'étais privée de lecture et là c'était pire car c'était le seul plaisir que j'avais. C'est à ce moment-là que je me suis fait une promesse : quand je sortirai de cet enfer, plus jamais je n'accepterai de dépendre des autres, plus jamais je n'accepterai une seule soumission.
les gens, voyant que j'ai des difficultés, veulent m'aider.
ils se précipitent sur moi pour m'aider de force.
Je pense qu'il faudrait qu'il y ait des campagnes de sensibilisation dans le grand public comme on le fait pour la préservation de la planète afin que les gens appréhendent mieux la situation de cette population.
C'est pour ça que j'ai beaucoup aimé le film "Intouchables" car je m'y suis retrouvée.
Il est indispensable de parler des "mauvaises pratiques" qui blessent les personnes handicapées et qui créent des malentendus.
je veux montrer une autre facette des personnes handicapées, celle que les médias ne montrent jamais, c'est-à-dire le juste milieu.
Bien sûr on va me dire que je caricature mais j'ai quand même du recul, je suis handicapée depuis plus de 50 ans et j'ai vu les choses évoluer à tous petits pas !
Je lui ai dit : "Non, ça ne va pas le faire ! Vous allez devoir me soulever en me prenant sous les bras et le plus haut possible car mes quadriceps sont totalement déficients et il faut que mes genoux soient bloqués pour que je puisse repartir".
Cette histoire d'accessibilité est vraiment une prise de tête à laquelle il faut tout le temps penser pour une personne handicapée moteur. Pour ma part, je ne veux ni me priver de vivre comme je le souhaite ni me priver de me faire plaisir