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Dans tous les livres de Mia Couto il y a une tristesse poignante empreinte d'une grande poésie qui émeut profondément.
Le grand-père à son petit-fils auquel il refuse un verre d'eau :
— Ne t'inquiète pas, je bois comme les oiseaux, je picore dans les gouttes. »

Les vieux aiment raconter des histoires aux enfants qui viennent se réfugier près d'eux, « leur révéler des légendes ». Pour le faire ils « délient leurs paroles » comme l'écrit l'auteur. Mia Couto, lui, délie la langue portugaise pour la réinventer, donner une autre forme aux mots et aux phrases pour leur faire rendre les choses et les émotions plus vivantes en y mêlant un peu de fantastique (par exemple « on dîna sous le nuage du silence plutôt que dans un silence pesant). Il redonne aussi, en recréant la langue, une voix à tous les mozambicains pauvres, pris dans un monde qui leur est bien dur à vivre, qui gardent, malgré tout, une capacité d'émerveillement et savent sourire même tristement : 
« Cette nuit-là, la lune était pleine. Dans le noir, le clair de lune se répliquait en mille gouttelettes, allumant une crèche fantastique. Jamais je n'avais assisté à tant de lumière nocturne, l'étoilement du ciel juste sur notre toit. Mon père sourit :
— On a la lune électrique ! »

Et c'est encore une réussite que ce conte de « La pluie ébahie » où « la cérémonie des commandeurs de nuages » n'ayant pas porté ses fruits « le lendemain matin, la pluie demeurait accrochée à un cintre invisible, planant sans poids. »

Par le biais du conte et l'introduction du fantastique Mia Couto n'occulte pas les problèmes contemporains : la pollution, le racisme, la condition des femmes qui envahissent le quotidien du village de Senaller et de ses habitants et perturbent leur vie.
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C'est un texte très court à la fois tendre et poétique que « Cette pluie ébahie » que nous propose Mia Couto.
Pendant une heure, j'ai voyagé au Mozambique où quelque chose de terrible vient d'arriver. La pluie refuse de tomber, pire, elle reste en suspens dans l'air, créant une brume humide. Les villageois, notamment la famille du narrateur, y voient le signe d'une malédiction, causant une terrible sécheresse et une perte des récoltes à venir. Pourtant il se pourrait bien que la cause de cette pluie figée qu'ils appellent « pluviotis» soit plus simple à expliquer : depuis peu une usine nouvellement installée non loin du village recrache de noires volutes de fumée. Chacun y va de son opinion mais personne ne sait comment réagir, excepté la mère du narrateur qui prendra la décision de se rendre à l'usine pour rencontrer son directeur, dans le plus grand secret.

Avec ce roman aux allures de conte, Mia Couto nous livre une belle image de ce pays où modernité et traditions tentent de cohabiter. Une atmosphère pluvieuse et mélancolique plane au-dessus de cette famille qui ne sait plus vers qui ou quoi se tourner, perdue dans une société qui se transforme.

Je connaissais déjà la plume tellement imagée de l'auteur pour avoir lu « L'accordeur de silence ». Cette nouvelle lecture me laisse une impression étrange, comme s'il me manquait quelques éléments pour en savourer pleinement le mystère et la beauté. J'ai cependant passé un très bon moment avec ce livre.



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Quel plaisir de lire la plume de Miao Couto. Je tiens à remercier les éditions Chandeigne et Babelio pour cette seconde expérience.

Comme le premier que j'avais lu (Le chat et le noir) , la prose de Couto est très poétique mais porteuse de beaucoup plus que de belle formules lyriques.

La pluie ébahie nous parle du temps qui passe, même si elle ne vient pas elle est celle que toutes les générations qui passent attendent. Malgré le temps les hommes qui restent les mêmes dans ce petit village du Mozambique.

Des légendes des ancêtres à l'industrialisation sauvage et polluante du siècle dernier, Couto nous parle de la cupidité et du racisme ordinaire, des histoires de famille et du poids de leur passé. le tout est évoqué par teintes touches, comme en peinture.

Un très bon moment de lecture.
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Plus qu'un récit, ce texte ressemble à un long poème, ou encore une fable poétique.
Dans un pays africain où les couleurs font deux poids deux mesures, la pluie ne tombe plus: elle reste en suspens. Et le monde se renverse, c'est en haut qu'il faut regarder, chercher, pêcher, dans cette autre moitié visible. Un jeune garçon observe les réactions de sa famille, la tante vieille fille qui vampirise les hommes, la mère qui va affronter le chef blanc de l'usine qu'elle croit responsable de cette pluie immobile, le grand-père qu'on doit attacher de peur qu'il ne s'envole et qui lui raconte les mythes familiaux.

La quatrième de couverture annonCE un récit sur un Mozambique en transition et de terribles secrets familiaux.
C'est une écriture triste, onirique, qui malheureusement ne m'a pas captée comme je l'aurais espéré.
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Un conte poétique doux-amer avec des phrases joyaux et des images un peu floues qui pourtant emmènent dans un village du Mozambique et sa réalité : l'importance de l'eau, la mine qui engloutit l'humain, l'usine polluante, le chef d'usine qui désire et méprise, la couleur de peau qui interdit les jeux ensemble, la place des femmes, le rôle des anciens, la fuite des pères... dans le regard d'un enfant laissé à lui-même. Le temps d'une pluie suspendue, la légende familiale peut se retisser, et nous en quelques pages, on effleure un ailleurs, un coeur inconnu...
"Face au froid
fais avec le coeur
l'inverse de ce que tu fais avec le corps :
déshabille-le.
Plus il sera nu,
plus il trouvera
le seul réconfort possible
- un autre coeur."
(conseil du grand-père, en exergue du récit).
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Est-ce une fable? Est-ce un conte?

Je dois avouer être sans doute passée complètement à côté de ce récit auquel je n'ai pas compris grand chose. Sans doute cette pluie qui ne veut pas tomber est-elle la métaphore de quelque chose de plus grand, de plus vaste qui m'a échappé.
Cependant, j'ai bien apprécié la plume poétique et très imagée de Mia Couto. Sans compter l'exercice de style épatant d'avoir usé d'une grande partie de tout le champs lexical de l'eau.
Cette lecture fut pour moi un moment suspendu sur le fil du temps, un peu comme cette pluie ébahie qui ne voulait ni tomber ou ni refaire les nuages.
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La pluie reste-elle bouche bée devant le misérable et beau Mozambique au point d'en oublier de tomber ? Elle se contente d'un pluviotis agaçant, du jamais vu, qui accroche une goutte aux cils, de quoi pleurer un peu devant le fleuve qui n'est plus nourri et se dessèche. C'est à hauteur d'enfant que nous voyons le village s'exacerber du manque d'eau, par le regard d'un garçon que ses parents ont toujours traité d'ébahi : "Ils disaient que j'étais lent pour agir, attardé pour penser. Je n'avais pas vocation à faire quoique ce soit, peut-être n'avais-je pas vocation à être. Et bien la pluie était là, clamée et réclamée par tous et finalement aussi ébaubie que moi. Enfin j'avais une soeur tellement maladroite qu'elle ne savait même pas tomber."

Et si ce n'était pas un sort mais la fumée des usines des blancs qui empêche la pluie ? Soit, mais le père n'ira pas s'enquérir là-bas, parce ce qu'il n'a pas envie. La mère affolée insiste : – "Ce sont ces fumées qui gênent la pluie. L'eau devient lourde, elle ne peut plus se faire nuage..." et , défiant l'autorité paternelle, elle emmène son gamin par la main voir les chefs de l'usine pour leur faire entendre ses raisons. Les choses se compliquent quand la mère en sort les ongles nacrés de rouge – "un rouge triste comme un sang déjà bleui" – et le garçon se trouve légataire d'un lourd secret. Rien n'est simple au Mozambique entre les noirs et les blancs, ni entre noirs s'il est question de jalousie et d'honneur.
[...]
La contrée connaît le drame de la pénurie d'eau potable, à laquelle accède moins de 30% de la population. Les femmes qui traditionnellement s'en occupent marchent parfois plus de vingt kilomètres chaque jour vers les puits. Les maladies hydriques sont les principales causes de mortalité. Quand la pluie ne vient pas, c'est La guerre de l'eau. D'après l'Unicef, près de 2 000 enfants de moins de 5 ans meurent quotidiennement dans le monde de maladies diarrhéiques, et près de 1 800 morts sont liées à la qualité de l'eau, à un assainissement et une hygiène précaires.

Derrière les chiffres, derrière les pluies irrésolues de Mia Couto, discernons la tragédie humaine.

Billet complet sur Marque-pages (lien ci-dessous)
Lien : http://christianwery.blogspo..
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 Pour donner plus de vérité à mon nouveau livre, j'avais besoin de sentir le lieu, de revisiter des souvenirs, d'écouter les voix de la rue.
J'avais besoin de voir la ville.
Une écriture viscérale, empathique, parcourt les pages.
Cette seconde âme est perçue avec une force extraordinaire.
Mia Couto n'échappe pas à sa mémoire et par cette opération douloureuse mais nécessaire, elle fait revivre le drame de son peuple.
Revenir, c'est raconter les territoires infinis qui circonscrivent notre identité.
"Au nom de la sécurité mondiale, certains des dictateurs les plus sanglants de mémoire ont été imposés et maintenus au pouvoir."
L'analyse politique internationale est très lucide, elle illustre les faits, trouve les causes, identifie les remèdes.
De la faim dans le monde aux inégalités sociales, à l'urgence pérenne qui crée un état d'incertitude, à la lourde xénophobie des pays sud-africains, aux murs qui « séparent ceux qui ont peur de ceux qui n'ont pas peur : chaque réflexion force le lecteur à se remettre en question.
Un autisme envers l'autre sape les fondements de la coexistence civile.
Le rôle de la parole libre, intransigeante et objective est important.
« L'un des moyens qui peut nous aider à retrouver cette moralité perdue peut être la littérature.
Je me réfère à la littérature comme l'art de raconter et d'écouter des histoires.
Des mots émouvants qui nous invitent tous à être des bâtisseurs de paix en identifiant un langage commun fait de phonèmes, de gestes et d'actions.
Récupérer des petites histoires, donner la parole aux héros inconnus, se remémorer "tout le passé", celui des minorités et des vaincus."
L'auteur parvient à faire vivre son Afrique, à mettre en lumière les erreurs et les marginalités mais si l'on se concentre sur son message on se rend compte que sa pensée est aussi tournée vers l'Occident.
N'oublions jamais que "les constructions de l'imagination sont nées pour vaincre la peur de notre ignorance et la peur encore plus grande de nous savoir fragiles et finis".
Lien : http://holophernes.over-blog..
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Dans une petite ville du Mozambique, Senaller, dont personne ne peut partir, un étrange phénomène se produit. La terre est vidée de son eau, la pluie ne tombe plus non plus. Pourtant il subsiste dans l'air de fines gouttelettes. Elles mouillent lorsqu'on sort, on peut puiser de l'eau en remuant un seau au-dessus de sa tête. Est-ce que les poissons vont bientôt nager dans le ciel ? Comment faire pousser les légumes ? Faut-il lancer la terre au-dessus de sa tête et attendre que les légumes poussent dans le ciel ?

Certains blâment les ancêtres, d'autres l'usine des blancs, mais personne ne sait quoi faire. le narrateur, un jeune garçon, reste tantôt près de son grand-père, un vieillard desséché qui reste constamment près du vieux fauteuil qu'occupait son épouse décédée et qui raconte d'étranges histoires et tantôt près de sa mère qui tente de voir les blancs malgré les préjugés et les risques afin de résoudre le problème.

Ce texte est extrêmement poétique, avec un gros travail sur les jeux de mots et le champ lexical de l'eau. le fait qu'on voit au travers des yeux de l'enfant ne rend pas forcément le texte toujours très compréhensible, mais en tout cas très poétique. C'est un roman très court, presque qu'un conte, mais je ne sais pas si dans sa symbolique je n'aurais pas manqué quelques allusions peut-être en rapport avec ce pays dont j'ignore quasiment tout.

En tout cas, c'était une petite lecture plaisante, très poétique, comme un long poème aquatique d'un pays mystérieux et asséché.
Lien : http://girlkissedbyfire.word..
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Un village n'a pas eu de pluie depuis plusieurs jours. Une famille s'en inquiète et livre différentes légendes sur la corrélation entre la pluie et les hommes. Un conte bien écrit mais pas toujours compréhensible.
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