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EAN : 9782246862147
84 pages
Grasset (11/01/2017)
3.5/5   12 notes
Résumé :
Un vieil écrivain se souvient. Plus encore, il essaie de se remémorer comment il est devenu romancier. Alors lui revient en mémoire l'image du jeune homme qu'il a été, à Buenos Aires, dans les années 50 : un lycéen qui rêve d'échapper au milieu bourgeois et conservateur de ses parents. Un soir il s'aventure dans un bar où se produit une star vieillissante du tango, et quand un inconnu l'aborde, il n'hésite pas alors à se présenter sous une fausse identité. Il sera d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Le vieil écrivain se retrouve assis dans son fauteuil en cuir, une odeur de vieux cigares, les accoudoirs râpés par l'usure du temps, tachés par quelques gouttes de vieux whisky et de maté. Il a l'âge d'en finir se dit-il. Alors, il se souvient. Il n'a plus que le souvenir, les réminiscences d'un jeune garçon prénommé Víctor dans les années cinquante à Buenos Aires.

Ses souvenirs le font remonter à une éternité. Il se retrouve adolescent timide, mal à l'aise dans sa famille aux notes trop bourgeoises pour ses aspirations littéraires. Peu de camarades, il ne voit guère de monde dans une vie déjà solitaire, bon élève, fils discipliné, quelques contacts avec sa cousine Cecilia qui lui donna ses premiers émois sexuels.

J'aime cette littérature intimiste, l'écrivain qui s'écrit, le vieil homme qui se souvient avant de basculer de l'autre côté. J'y vois tant de nostalgie et de mélancolie, surtout avec une plume délicate telle que je la découvre sous l'encrier d'Edgardo Cozarinsky. Et dans ce genre de roman, je ne peux m'empêcher d'y voir des éléments autobiographiques d'un auteur se mettant en scène. Un roman sur un écrivain qui écrit un roman, c'est devenu du classique dans mes lectures, depuis Paul Auster, que j'admire toujours autant, même s'il se fait rare. Rare aussi doit l'être Edgardo, parce qu'avant ce titre trouvé par hasard, je ne le connaissais pas.

Un soir, Víctor entra seul dans un cabaret où une star vieillissante de tango se produisit devant le regard de quelques connaisseurs d'un autre temps. Il n'a pas l'âge et sa nature pourrait dénoter si la pénombre des lieux n'avait pas submergé l'espace et si les lumières ne se dirigeaient pas exclusivement vers cette musique du passé. Recroquevillé sur lui-même, le dos contre le mur, il se laisse happer par ce parfum de mystère qui s'envole au milieu des volutes de cigares cubains. Pourtant, un homme, Andrés va le remarquer. de là, naîtra une étrange amitié entre un homme d'âge mur, et ce pré-adolescent qui ne demande qu'à connaître la vie. Parce que pour écrire, il faut vivre d'abord.

De cette rencontre et cet échange de regard dans un coin sombre d'un cabaret oublié, la relation entre ces deux êtres restera un événement déterminant pour le jeune écrivain en devenir. Andrés lui paiera de nouveaux vêtements – un jean même – lui paiera des restaurants, lui paiera des week-ends, lui fera découvrir des connaissances – à l'accent germanique. Une autre vie s'ouvre à ses yeux. Il lui paiera aussi une vieille pute, des émois bien plus intenses qu'avec sa jeune cousine. Il est sous le charme de cet « ami » qui a le double de son âge et probablement un autre nom, comme j'ai pu être également sous le charme de la qualité d'écriture de l'auteur argentin.

Je ne danse pas le tango – ou très mal - mais je ne refuse jamais de prendre un verre avec un auteur argentin, un défaut une tasse de maté. C'est que j'éprouve une certaine tendresse, même passionnée, du tango argentin, qu'il soit à Paris ou à Buenos Aires, avec ou sans tablette de beurre. Et quand il est question d'éducation sentimentale, j'aime explorer ces sentiments profonds, ceux en l'occurrence qui ont amené à la naissance d'un écrivain.
Lien : http://memoiresdebison.blogs..
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Un vieil écrivain se souvient de son éveil à la littérature dans le Buenos Aires des années cinquante.
L'odeur du café grillé, la fumée de cigarette, le son du tango argentin au loin, là un bar mal famé, ici un nigt-club branché, une prostituée au coin de la rue. Des images de son adolescence reviennent à sa conscience, mais la mémoire efface plus qu'elle ne garde, alors « L'imagination, rusée, récupère tout ce que la mémoire a effacé et l'attrape dans les filets de la fiction ».

Et cet Andrès qui l'a guidé dans Buenos Aires d'abord mais aussi dans sa transition vers l'âge adulte et qui avait le double de son âge, qui était-il vraiment et quelles étaient ses intentions ?

Un air de bandonéon
Des volutes de cigarillos qui montent dans la nuit argentine.
Une ambiance très particulière.
Une écriture superbe.
Un roman mystérieux d'un auteur que je découvre.

« Un moment viendra dans ta vie où en l'écoutant tu t'apercevras que le tango raconte tout ce que tu ressens. Tout ce que tu as vécu». 

Challenge Multi-Défis 2023.
Challenge Riquiqui 2023.

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Je ne connaissais que de nom l'écrivain cinéaste argentin. Un compagnon de blog de longue date m'a offert un roman qui lui tenait à coeur. Ca je l'ai compris très vite en feuilletant Dark. L'Amérique du Sud, dont il est très fervent, la nuit, l'écriture, la mémoire qui revient et qui étouffe un peu, un certain goût pour les bars et la musique qu'on y entend. La musique, vous voyez le genre, selon la latitude, blues, fado, reggae, flamenco, tango dans ce cas. de la tripe.

Buenos Aires, années 50. Un adolescent, 16 ans peut-être, s'essaie à un début de rupture familiale. Un inconnu, la cinquantaine, l'aborde, un peu obscur, un peu mystérieux. Il lui sert de cicerone en l'emmenant dans une capitale méconnue, lieux insolites, monde interlope. Lui offre des vêtements que sa famille réprouverait. L'achète-t-il?

Ce bref roman, 140 pages, est fascinant et intense. Roman d'initiation bien sûr, mais par petites touches. On saisit bien le trouble de Victor le jeune homme face à Andrés. Quelques rencontres, gymnases, plages, une prostituée notamment, est-ce le début de la perdition? Puis Andres se fait plus rare, faut-il s'en inquiéter? de plus, en ces années d'Amérique Latine, les pouvoirs politiques ne font pas dans la tendresse. Edgardo Cozarinsky qui quitta l'Argentine de 74 à 85, en sait quelque chose. Victor, un demi-siècle plus tard, devenu écrivain, se souvient. Lisant Dark on comprend que l'histoire ne se départira jamais d'une réelle ambiguité. Ca nous a plu, à mon ami blogueur et à moi.

" Oui..., les garçons de ton âge n'aiment pas le tango, ils n'en comprennent pas les paroles et sa musique les laisse indifférents. Mais peu importe. le tango t'attend. Un moment viendra dans la vie où en l'écoutant tu t'apercevras que le tango raconte tout ce que tu ressens. Tout ce que tu as vécu."
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Il y a des livres où on entre lentement, progressivement, et d'autres où on est happé dès les premières pages. Dark fait clairement partie de cette deuxième catégorie, en tout cas pour moi. le premier chapitre, court mais efficace, m'a pris aux tripes. Il donne le ton d'un roman qui va voguer au fil des pages entre roman d'apprentissage et récit de la formation d'un écrivain.

Le résumé proposé par l'éditeur dévoile une bonne partie de l'intrigue, mais je crois que ce n'est pas l'histoire elle-même qui fait l'intérêt de ce roman, mais la façon dont cette histoire est racontée :

Un vieil écrivain se souvient. Plus encore, il essaie de se remémorer comment il est devenu romancier. Alors lui revient en mémoire l'image du jeune homme qu'il a été, à Buenos Aires, dans les années 50 : un lycéen qui rêve d'échapper au milieu bourgeois et conservateur de ses parents. Un soir il s'aventure dans un bar où se produit une star vieillissante du tango, et quand un inconnu l'aborde, il n'hésite pas alors à se présenter sous une fausse identité. Il sera donc Victor pour Andrés, mais ce mensonge n'empêche pas ce dernier d'attendre le futur écrivain devant son lycée deux jours après leur première rencontre. Une étrange relation se tisse entre eux.

Andrés est plus âgé que Victor, il ne semble pas exercer de profession précise, seulement prendre du plaisir à emmener son jeune protégé dans des lieux insolites, lui présenter le monde interlope de la capitale argentine et lui acheter des jeans et des blousons, vêtements interdits par les parents de Victor. Une attraction qui ne dit pas son nom lie les deux hommes, et Victor est sous le charme obscur d'Andrés, jusqu'à ce que cette relation faite de non-dits et de secrets prenne brutalement fin lors d'un accident de voiture.

A vrai dire, je ne sais trop quoi dire de ce livre. C'est un roman très court (à peine une centaine de pages), l'histoire n'est pas forcément très originale, mais j'ai trouvé l'écriture très réussie, parfois sublime. le narrateur est un écrivain argentin au crépuscule de sa vie, qui se remémore son adolescence et sa rencontre avec un quadragénaire avec lequel il va se lier d'amitié. Celui-ci va lui faire découvrir un visage de la ville dont il ignorait l'existence, et l'adolescent va progressivement s'éloigner de ses parents issus de la bourgeoisie conservatrice. Ce récit d'apprentissage est sans surprise mais s'accompagne intelligemment d'un deuxième fil qui relate comment les expériences vécues par l'adolescent aux côtés de son compagnon plus âgé vont nourrir l'écrivain qu'il deviendra.

Après Jeux de miroirs que j'ai lu juste avant et dont j'avais parlé ici, je continue donc sur ma lancée avec un autre roman qui mêle récit classique et réflexion sur l'écriture et la fiction. Je crois que j'ai définitivement un faible pour ce thème, à moins que ce soit ce thème qui ait le don de donner d'excellents romans.
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Un écrivain vieillissant revient sur une période de son adolescence quand il a rencontré une ancienne star de tango. L'écriture est agréable, le lecteur se demande comment va aboutir cette relation, le pourquoi de cet homme qui achète à ce jeune tout ce qu'il veut, qui l'emmène en week-end. Malheureusement au bout du compte, on n'en sait guère plus. Histoire et relation ambiguës.

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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Le vieil écrivain ne peut s’empêcher de sourire. Il admet que ce qui a survécu dans sa mémoire de ce moment que bien des gens imaginent capital dans la vie de tout homme, c’est moins une prodigieuse exaltation que certains superbes à-côtés : le ciel de plomb qui annonçait l’orage vu par la fenêtre de la chambre de Cecilia, gris dense traversé par de fugaces franges jaunes et rose ; les ragas de Ravi Shankar qu’elle avait choisis comme musique pour accompagner leur rencontre et qu’il entendait pour la première fois ; le parfum préféré de sa cousine, qui imprégnait draps et oreiller et que toute sa vie il ne retrouverait en aucun autre. Cecilia l’aida à atteindre la prestance nécessaire, le guida avec fermeté et sans hâte, lui indiqua les mouvements qu’il trouverait très vite spontanément et soupira, satisfaite, quand son cousin, sans aide ni indications cette fois, atteignit le rythme recherché et déchargea très vite, trop vite peut-être, tout son désir inexpérimenté.
- Très bien. Maintenant tu vas m’aider.
Víctor, qui émergeait à peine de la « petite mort », lui laissa prendre sa main et la porter entre ses jambes. Cette fois, il n’eut pas besoin qu’on guide ses mouvements, il explora, caressa, pinça cette humide et tiède intimité jusqu’au moment où un soupir de Cecilia, profond, étouffé, lui fit comprendre que sa mission était accomplie.
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Où habitait la Chinoise, se demande-t-il, mais aussitôt il rejette toute possibilité réelle et commence à se faire tout un roman. Elle dort au café, n’en sort jamais, se réveille à l’aube et ferme à la fin de l’après-midi, une fois éteinte l’animation somnambule de la journée, aucun oiseau nocturne ne choisirait de faire escale dans un réduit aussi dépourvu de charme, chaises sur les tables, pieds dressés qui dessinent un labyrinthe sépulcral. À cette heure-là, la vieille femme se retire dans une arrière-boutique crasseuse, murs lépreux, odeur de pipi de chat, que seuls rachètent… quoi ? L’adolescent devenu vieux mais infatigable propose : un paysage du pays perdu, imprimé dans les couleurs déteintes d’un almanach. Ou encore : une maxime de Confucius encadrée par des baguettes rouges, dessinée en caractères traditionnels qu’elle ne sait pas lire mais qui, elle en est sûre, la protègent par leur sagesse distante. (Savait-elle qu’à la même époque, au pays de ses ancêtres, le Grand Bond en avant avait proscrit l’enseignement de Confucius ?) Multiples sont les voies de la fiction.
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Il n’avait jamais franchi la porte de l’hôtel, jamais il n’avait mis les pieds dans ce restaurant ; cette omission permettait d’imaginaires mises en scène. Au bar du restaurant, il en était sûr, l’attendaient des cocktails aux noms exotiques et aux couleurs artificielles. Il se voyait arrivant à l’hôtel, suivi de nombreux bagages couverts de ces étiquettes qui, il ne pouvait le savoir, n’existaient plus que dans les bazars de la nostalgie, paysages au-dessus du nom d’un hôtel européen, du Train Bleu ou de l’Orient-Express. (Il reconnaîtrait un peu plus tard, tout honteux, que cette fiction était déjà vétuste à cette époque, résidu de matinées dans des cinémas de quartier dont le triple programme exhumait des films de décennies passées ; son imaginaire mise en scène serait bientôt corrigée par d’autres décors, d’autres accessoires. Sac à dos et motel. Jack Kerouac était intervenu).
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- Kintsugi. Vous avez entendu parler du kintsugi ?
- Non.
- C’est l’art japonais qui consiste à remplir les fissures d’un objet brisé, de porcelaine par exemple, avec de la résine où on a dilué de la poudre d’or. Au lieu de dissimuler la fente on la souligne avec une substance lumineuse, qui a parfois plus de valeur que l’objet même. C’est ainsi qu’on ennoblit l’objet : au lieu de cacher les cicatrices de la vie, on les exhibe.
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Anahí prit Víctor par la main et sans un mot l’emmena dans la chambre. Il n’eut pas à se déshabiller. Avec des baisers et des caresses, lentement, elle lui ôta sa chemise, lui baissa son pantalon, pendant que sa bouche parcourait chaque centimètre carré de peau qu’elle découvrait. Quand elle lui enleva son slip, elle souffla doucement sur les poils qui entouraient son sexe déjà éveillé et lui fit découvrir un plaisir qu’il n’avait pas connu avec Cecilia. Lèvres et langue exécutaient des variations nouvelles pour le corps de Víctor et quand Anahí l’entraîna sur le lit en se couchant sur le ventre, ce fut pour lui montrer une nouvelle possibilité d’exploration du corps d’une femme.
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Vidéo de Edgardo Cozarinsky
Edgardo Cozarinsky .Librairie El Salón del libro 21 rue des Fossés Saint-Jacques Paris 5e www.salondellibro.fr
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