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Critique de R2N2


Pourquoi j'ai lu La chair & le sang

J'admets qu'on peut se demander comment quelqu'un qui affirme ne pas aimer et ne quasiment pas lire de fantasy en est venu à lire ceci. Voici mes raisons qui, je l'espère, pourront vous convaincre de vous y mettre aussi.

La bonne et la mauvaise fantasy

Il y a des formes de fantasy (à moins que ce ne soit du fantast…) auxquelles je suis particulièrement rétif (le medieval fantasy par exemple) et des personnages de fantasy qui me bloquent singulièrement (tout ce qui est orques, gobelins, trolls, elfes… sans même parler des hobbits!). Ici, on est dans de la fantasy urbaine intégralement ancrée dans notre époque, les personnages centraux sont des vampires (probablement la créature fantastique qui m'a le plus intéressé depuis ma première lecture de Bram Stocker) des loups-garous (ben quoi, même Fred Vargas y a touché) et des sorcières (une forme de prolétaires parmi les prolétaires, conscientes et intéressantes).

Loin du tout venant

Autant dire que la fantasy urbaine de la chair & le sang n'a pas grand chose à voir avec la bit-lit classique. Stéphanie Meyer n'est pas près de porter plainte pour plagiat. Les personnages savent délaisser les gousses d'ail et les pieux au profit de gros flingues et d'explosifs au besoin. Les vampires ne s'envolent pas à tire d'aile mais au volant de tires conduites de façon sportive, et certaines apprécient même les frites et la bière, ce qui est un signe de civilisation supérieure. Enfin, il y a un univers culturel qu'on ne voit pas souvent avec notamment une louve-garou skinhead et une vampire punk (et accessoirement tueuse à gage, mercenaire…), ce qui ne peut que m'allécher.

Mais il n'y a pas que ça, laissons la parole à l'autrice pour définir son oeuvre :

"Lizzie Crowdagger écrit des romans fantastiques et de fantasy. Ces derniers abordent des thématiques sérieuses avec des choses comme des vampires, de la sorcellerie, des armes à feu et des explosions ; mais ils parlent aussi de choses plus légères, comme le féminisme, l'homosexualité, la transidentité, la lutte des classes, etc."

Si vous en avez marre des bouquins où les mecs tiennent toute l'action, si n'avez jamais lu de livres où les héroïnes sont lesbiennes sans que ce soit juste dans le but de faire fantasmer les lecteurs mâles, si vous étiez persuadés d'être calés en lutte des classes mais que vous ignoriez tout des manifs et syndicats loups-garous ou des ouvertures de squats vampiriques, si vous voulez une autre approche du masochisme que 50 shade of grey… La chair & le sang vous tend les pages.

Pourquoi je veux vous faire lire La chair & le sang

Tout simplement parce que c'est bien et que, même si ça ne sera jamais le coeur de mes lectures (noir, c'est la vie) je trouve sans hésitation que ça mérite d'être lu donc j'essaye à ma très faible échelle de participer à sa popularisation. Aussi parce que si ce blog est principalement dédié à la littérature noire, je revendique ne pas le laisser enfermé hermétiquement dans son domaine central. Par ailleurs, l'autrice présente La chair & le sang comme une « romance paranormale lesbienne », alors finalement, on retombe sur nos pattes, en plein coeur de cible d'un blog qui s'appelle Romance Rouge, Nouvelles Noires!

L'écriture qui va bien

J'ai parfois l'impression à la manière dont elle en parle que l'autrice complexe un peu sur son style littéraire. Moi je trouve ça très bien écrit. Certes il peut arriver qu'une faute d'orthographe ou de français soit passée à la trappe (il faut imaginer le boulot monstre quand on est à la fois autrice, correctrice, graphiste, distributrice, maquettiste …). Certes, certaines tournures ou formulations peuvent parfois paraître un peu naïves voir maladroites, mais en fait c'est ce qui en fait la force. A fortiori quand, comme dans La chair & le sang, la narratrice est une personnage, qui plus est une personnage … disons qui a un sens des réalités hors des canons habituels, un personnage qui, à mon sens, raconterait son histoire exactement tel que c'est fait. Surtout, l'écriture est enlevée, fluide et hyper efficace, garanti, elle t'entraîne jusqu'au bout de la nuit.

Atmosphère, atmosphère…

Qu'elle soit glauque et violente ou dégueulant de bons sentiments (ce qui n'est d'ailleurs pas incompatible), l'ambiance est souvent ce qui fait que je n'adhère pas à la fantasy. Tout comme le style héroïsme triomphant n'est pas mon genre (en parlant de genre, il parait que maintenant « heroïc fantasy » ne serait plus synonyme de fantasy mais un sous-genre de celle-ci ? Non, vraiment je ne veux pas le savoir). Ici, rien de tout ça. L'ambiance est à la fois survoltée par le rythme effréné de l'action pour nous filer notre dose d'adrénaline, décalée à souhait et un rien déjantée pour nous muscler les zygomatiques (la scène quasi finale dans le dernier tome, qui dans un autre contexte ou racontée autrement aurait pu n'être que ridicule me fait encore marrer quand je l'imagine plusieurs mois après la lecture) et malgré tout terriblement proche de ce qu'on connaît pour qu'on s'y retrouve.

Les personnages

Peut-être la réussite de cette série. Les personnages principales sont drôles et attachantes. Jessica, la narratrice est complètement décalée et hilarante mais aussi touchante. Mêlant hédonisme, détachement, naïveté mais aussi une certaine fragilité malgré sa fouge de tête brûlée, elle m'a agacé quelques pages (son prénom n'y est-il vraiment pour rien ?) avant que je n'y vois l'âme du roman. Son crush, Chloé, skinhead, louve-garou, communiste libertaire un peu fleur bleue est carrément classe. Quant à l'énigmatique Séléna, la vampire punk qui bouffe des frites et boit de la bièremais aussi qui n'hésite pas à tirer à l'arme lourde si nécessaire et même quand ce ne l'est pas, son attitude 100% badass dynamite l'histoire. le fait qu'elle soit accessoirement mercenaire ou tueuse à gage ne constitue pas sa part d'ombre mais vient simplement renforcer son personnage.

Les personnages secondaires restent à leur place, au second plan. J'aime quand ceux-ci ne viennent pas envahir l'espace des personnages principaux. Certains auteurs ont l'air de vouloir faire de tous les personnages des personnages principaux, c'est con. On ne s'attache et ne s'intéresse pas à trente personnages dans un bouquin, il n'y a pas la place dans nos cerveaux ni nos coeurs, ils arrivent alors juste à effacer les personnages principaux. D'autres auteurs font l'inverse et ne citent des personnages secondaires que parce qu'ils sont nécessaires au suivi des personnages principaux mais ils n'existent que comme des noms et des ombres. Ici ce n'est pas le cas, tous les personnages sonnent juste, sont dotés d'une personnalité. La flic de l'histoire, décrite comme « bâtarde qui s'assume » rempli pleinement son rôle. La seule chose que je lui reproche est d'arriver parfois à m'être sympathique, ce qui n'est pas pour me plaire (je suis spéciste). Heureusement on trouve aussi de vrais connards que ça ne rend pas sympathique, des patrons-garou qui ne dépareillerait pas dans la branche dure du Medef, des noblions réacs en queue de pie, et même un indic, nazi et trafiquant appelé Serge Armand (mais pourquoi donc ai-je failli écrire Claude Hermant?).

Cette critique est extraite d'une chronique plus longue que vous pouvez retrouver en intégralité en suivant le lien ci-dessous
Lien : https://romancerougenouvelle..
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