AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de jamiK


jamiK
02 février 2023
Je me suis précipité sur ce volume sans en connaître le sujet, simplement convaincu par l'argument du prix BD Fnac France Inter - 2023 et par le nombre d'étoiles distribuées sur le forum Babelio (19 critiques sur 21 avec 4,5 ou 5 étoiles ?). Quand je l'ai ouvert, j'ai un peu tiqué, un récit épistolaire entre Renaldo MacGirth, un condamné à mort aux Etats-Unis et l'autrice, Valentine Cuny-Le Callet ! Je sens que ça va être pesant, le sujet est plutôt glauque et je ne suis pas du tout fan de la littérature épistolaire. J'ai bien cru que je n'allais pas y arriver.


L'aspect épistolaire va cependant assez vite laisser la place à un mode d'expression par le dessin. On aborde assez peu les crimes de Renaldo McGirth, ce n'est pas le sujet du livre, il ne s'agit en aucun cas d'étudier le procès, et le militantisme contre la peine de mort est présent en arrière plan, quelques faits et réflexions sont abordés, forcément, mais ce n'est pas le coeur du livre non plus.


Le graphisme de Valentine Cuny-Le Callet est en noir et blanc, très sombre, il utilise plusieurs techniques différentes, de la craie grasse pour certaines illustrations, avec quelques présence d'estompage à la gomme, un dessin de prise de notes, parfois brut et parfois très détaillé, et à d'autres moments, on passe à de la gravure sur bois ou linoleum, au contrastes plus tranchés, souvent avec plus d'iconographie symbolique, presque fantastique, comme sur la couverture. Quelques dessins de Renaldo McGirth apparaissent, intercalés dans le récit, car c'est avant tout un échange.


Il n'y a pas d'histoire d'amour, pas du tout de sentimentalisme, on est aux antipodes de tout ça. Valentine Cuny-Le Callet a fait de cette rencontre un récit plus universel sur la nature humaine, un récit anthropologique et poétique à la fois, l'échange est créatif, elle dessine, elle écrit, lui aussi, il en ressort une véritable réflexion sur la nature de la création, de sa nécessité, l'art est un médium pour comprendre la vie et sa fragilité. Je ne sais plus qui disait que l'art est une manière d'intercéder avec l'au-delà, face à la mort promise, cette bande dessinée en fait la démonstration implacable. La situation des deux correspondants est chargée d'émotion transcendée par le graphisme radical. Renaldo McGirth semble aller vers une rédemption par le biais des mots, du dessin, de la poésie et de l'art, il n'effacera pas ces actes, cela se passe ailleurs. Qui est le catalyseur, qui offre la révélation à l'autre. La peine de mort n'est qu'un avatar incongru, une ineptie profonde dans un système judiciaire qui parait en dehors de l'humanité, son aspect calculé et méthodique est mis en opposition avec l'esprit humain, tourné vers l'imagination et la créativité. Comment la poésie peut ressortir de ces lieux sordides, comment le couloir de la mort peut révéler la richesse de la vie.


C'est un livre étonnant, troublant, d'une grande richesse, qui va bien au-delà d'un simple débat sur la peine de mort, une bande dessinée magistrale.
Commenter  J’apprécie          414



Ont apprécié cette critique (37)voir plus




{* *}