Avoir seize ans, foncer dans la nuit calme sur une route déserte et sentir la brise tiède caresser vos épaules tout en enlaçant la taille d’un garçon qui vous a embrassée hier pour la première fois, la joue appuyée contre son dos : ce devait être la définition du bonheur.
Il ne se passait pas une journée sans un geste dont la beauté la remplissait d’émotion.
J’étais dans cette humeur bizarre qui suit un enterrement, quand le néant pénètre la vie et nous rappelle la vanité de toute chose.
Pour Clarisse, le bonheur n’existait pas dans la durée et la continuité (cela, c’était le mien), mais dans le fragment, sous forme de pépite qui brillait d’un éclat singulier, même si cet éclat précédait la chute.
Une part de nous sait des choses que nous ignorons.
L’amour, n’est-ce pas ce désir qui persiste malgré tout ? N’est-ce pas ce sentiment qu’on éprouve malgré soi, quand on n’a aucune raison objective d’aimer ?
Rien ne reste. Ne reste que le rien.
« Déjà alors, je craignais l’écriture. Au fond de moi je savais qu’elle était liée à une observation douloureuse , mais je n’imaginais pas qu’avec le temps elle serait un abri, un refuge , ou non seulement je me retrouverais, mais où je retrouverais aussi ceux que j’avais connu et dont les visages avaient été conservés en moi » ….
AHARON APPELFELD, Mon père et ma mère .( Traduit par Valérie Zenatti) .
Ne faisons-nous pas arriver ce dont nous avons le plus peur ?
« Chasse la nature à coups de fourche , elle reviendra toujours en courant »
Phrase extraite des « Épîtres d’Horace » .